Droit

Le nucléaire en France : un grand débat suivi d’un référendum ?

Une fois le baromètre émotionnel stabilisé essayons, décemment et avec sérénité, de poser les…

Une fois le baromètre émotionnel stabilisé essayons, décemment et avec sérénité, de poser les bases d’un débat qui s’impose. Notamment dans nos communes littorales. Parce qu’elles ont  déjà débattu, récemment, de plusieurs projets énergétiques : la torche à plasma, la problématique des déchets, et les éoliennes en mer. Ce dernier avait mobilisé les populations d’Agde, de Vias, de Portiragnes, de Sérignan, de Valras, et de Vendres. Aujourd’hui, la catastrophe du Japon réveille des inquiétudes, et suscite moult questions légitimes auxquelles les responsables concernés devront, cette fois-ci, répondre sans aucune échappatoire. En effet, les citoyens ont le droit de savoir. Ils demandent, plus que jamais, la transparence. Notamment dans un secteur d’activités resté trop longtemps sous couvert du secret, voire du secret-défense. Ses enjeux économiques, commerciaux, financiers, et en termes d’emplois, sont reconnus. Doivent-ils, pour autant, prévaloir sur la vie et la salubrité des autochtones ? Lesquels se sentent, depuis la création des centrales nucléaires, potentiellement menacés. Et, pire : pas du tout informés ! Il s’agit donc, aujourd’hui, de dépasser les passions et le fameux clivage politicien, pour revenir à l’essentiel : notre qualité de vie, et celle des générations à venir.

Petit rappel historique

La première centrale nucléaire fut construite en 1956. Les autres l’ont été, sous l’impulsion du général de Gaulle, entre 1956 et 1963. Il a fallu attendre 1991, pour qu’une première loi sur la gestion des déchets radioactifs vienne encadrer cette activité exceptionnelle. Née des recherches sur l’énergie atomique, sous le secret militaire, l’industrie nucléaire fournit, environ, 75% de l’électricité consommée en France. Laquelle se trouve à la tête d’un parc de cinquante huit réacteurs à eau pressurisée, répartis dans dix neuf centrales nucléaires. Sur l’ensemble, douze fonctionnent pour l’exportation d’électricité vendue par EDF aux pays voisins européens. Par contre, les déchets radioactifs, eux, sont stockés en France : sous terre et en mer. Cinq réacteurs servent à fournir l’énergie nécessaire au propre fonctionnement de l’industrie nucléaire (autoconsommation). La Cour des comptes avait estimé à dix milliards d’euros, les sommes englouties dans Super Phénix. Un Super générateur qui n’a été exploité que pendant neuf mois sur cent trente deux ! Malgré cette faillite inouïe, les promoteurs du nucléaire civil n’ont jamais eu de comptes à rendre à personne. Pire encore : en cas d’accident, la législation les décharge de leur responsabilité financière. La suspicion, le manque de transparence, voire l’opacité entourant les activités nucléaires, depuis son origine, ont été renforcés par l’accident de Tchernobyl en 1986 (son souvenir reste présent dans tous les esprits). Au point que le gouvernement, cette année-là, a légiféré. La loi sur la transparence et la sécurité en matière nucléaire a été promulguée. Ce qui n’a pas empêché les autorités compétentes d’occulter l’accident nucléaire du 14 octobre 2009, à Cadarache. Peut-on faire confiance aux autorités concernées ?

Pourquoi le choix du nucléaire ?

Rappelons qu’en 1970 la dépendance énergétique de la France frôlait les 80%. La conséquence en fut, au moment du premier choc pétrolier de 1974 (au lendemain de la guerre du Kippour), l’envolée de la facture pétrolière. Laquelle fut multipliée par huit (de 20 à 162 milliards de francs), entre les deux chocs pétroliers (1974 et 1979). Cette crise du pétrole a conduit EDF, conformément aux directives du gouvernement, à amplifier considérablement son programme d’équipement nucléaire. D’autant que la fin des énergies fossiles (pétrole, gaz et charbon) était annoncée avec insistance par tous les spécialistes. Il fallait donc pallier cette pénurie planifiée. Au total, le programme nucléaire a coûté environ 600 milliards de francs d’investissements, financés, pour les deux tiers, par autofinancement, pour moins de 8% par dotation de l’Etat actionnaire, le reste ayant été emprunté. Pourquoi le choix d’une seule et unique énergie ?

Un point sur le solaire régional

Un premier four solaire expérimental a été construit à Mont-Louis, en 1949. Quelques années après, au vu des résultats obtenus, un autre four solaire, de taille quasi industrielle, fut construit à Odeillo. Après six ans de travaux, il devint opérationnel en 1970, atteignant la puissance thermique d’un mégawatt. Ils ont, tous deux, servi de modèles dans le Monde entier, démontrant le potentiel de l’énergie solaire et ses multiples applications. Avec le four solaire de Parkent en Ouzbékistan, il était l’un des deux plus grands au Monde. Fervents partisans de l’énergie solaire et à la suite du premier choc pétrolier de 1974, les chercheurs du four solaire d’Odeillo orientèrent davantage leurs travaux vers la conversion de l’énergie solaire en électricité. Ces travaux participèrent à l’étude d’une centrale solaire thermique, THEMIS, qui sera réalisée par EDF en 1983. Son expérimentation durera de 1983 à 1986. Sa fermeture, entre 2004 et 2007, prononça la mise en sommeil des recherches sur la conversion de l’énergie solaire en électricité. Etait-ce à bon escient ?

Faut-il organiser un grand débat ?

Lors du Grenelle de l’Environnement, les ONG avaient accepté de ne pas aborder la problématique du nucléaire à condition qu’ait lieu, en France, un grand débat sur la production et la consommation d’énergie. Ce débat n’a jamais eu lieu ! N’est-ce pas le moment opportun de l’organiser ? Non seulement, sous les ors républicains, entre parlementaires et acteurs institutionnels, mais aussi avec les représentants de la société civile. Laquelle, de facto, doit être partie prenante. Ce débat, a priori indispensable, se justifie aujourd’hui plus que jamais, après le désastre nippon que les français, interdits, ont suivi, crises après drames.

Quelles alternatives au nucléaire ?

C’est parce que notre consommation énergétique est de plus en plus importante, que les pouvoirs ont recours à des technologies à risque. Nous pouvons devenir moins énergivores, si le deviennent aussi : l’industrie, l’habitat, les moyens de transport, l’agriculture, les équipements électroménagers, l’éclairage public, les institutions publiques, etc …. 
Cette mutation sociétale est possible. Encore faut-il pour cela, une volonté au plus haut niveau. Et des pouvoirs locaux qui agissent dans le bon sens. L’Etat aurait-il les moyens de ses ambitions, avec un endettement aussi lourd ? Car, néanmoins, la diversification du bouquet énergétique s’impose ! Hors, depuis des décennies, la politique énergétique de la France reste immuable. En 2001, l’Etat allouait 423 millions d’euros au nucléaire contre 40 au développement des énergies renouvelables. Aujourd’hui, 95% des subventions attribuées dans la recherche et le développement, sont allouées au nucléaire. Etait-il judicieux d’abandonner le solaire, notamment dans notre région ? Pourquoi la géothermie, la biomasse, l’hydraulique, la cogénération, l’éolien domestique horizontal, le système de pompage/turbinage, et bien d’autres technologies de même nature, ne sont-elles pas subventionnées, ou si peu ?

Nucléaire et changement climatique

Le nucléaire n’est et ne peut être la solution au changement climatique. Car il ne peut se substituer aux énergies fossiles. Lesquelles représentent, actuellement, plus de 70 % de la consommation d’énergie en France. Malgré son surdéveloppement, le nucléaire ne répond, en France, qu’à 17 % de ladite consommation. Seule une diminution importante de cette dernière pourrait atténuer les effets dudit changement.

Perte et/ou abus de confiance ?

Force est de constater que les discours ne sont qu’opérations de communication. Or, la demande est d’une toute autre nature : être informé ! Rappelez-vous les propos du président du SMOH (Syndicat Mixte Ouest de l’Hérault), maire d’une commune voisine, et du représentant de la société SOLENA GROUP, à propos de la torche à plasma. Rappelez-vous les arguments de la société porteuse des projets industriels d’éoliennes en mer. EDF Energies Nouvelles, celle-là même qui investit dans le nucléaire. Elle voulait implanter au large du Cap d’Agde, jusque dans les eaux de Gruissan, 180 monstres ailés de 160 m de haut (l’équivalent d’un immeuble de cinquante étages) sur une zone maritime de 175 km2. Les options prises par les décideurs s’appuyaient plus sur des profits à engranger et sur des stratégies de marché, que sur des réponses à apporter aux attentes et aux besoins des populations locales. Mais, pour qui les nuisances et la pollution ? Voilà l’un des traits de notre société : l’intérêt privé et le profit priment sur l’intérêt général. Sauf dans les discours, bien évidemment ! Nous avons tous en tête les mensonges et/ou l’opacité à propos de l’amiante, des produits chimiques, des pesticides, du nuage de Tchernobyl, plus récemment du système français de contrôle de la sécurité des médicaments (cf. l’affaire du Médiator), et tant d’autres …
Le nombre d’incidents et d’anomalies au sein des centrales nucléaires françaises a doublé en dix ans. Mille incidents nucléaires ont été recensés en 2010, selon un rapport de l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN). Qui est au courant ? La déconstruction de la centrale de Brennilis s’opère en catimini, dans des conditions peu orthodoxes, si l’on en croit les médias. Heureusement qu’ils prennent leur responsabilité, eux, les ‘’mal aimés’’ ! Et les travaux se termineront trente cinq ans après sa fermeture. Est-ce acceptable ? Tolèrerons-nous, encore longtemps, de telles attitudes ? 

Conclusion

Difficile démarche que celle d’aborder une si vaste et si complexe question. D’autant qu’elle recouvre la problématique de la politique énergétique de la France. Ne devons-nous pas en débattre, en connaissance de cause ? Et en mesurant tous les effets induits ? Cela permettrait à chacun de se forger une opinion, en connaissant les tenants et les aboutissants. N’est-il pas légitime de soumettre, ensuite, cette question cruciale au suffrage des citoyens ?  Surtout si la démarche permet de réinstaurer la confiance entre les citoyens et les décideurs. Chacun doit y réfléchir et se préparer à prendre position. A suivre …


Il serait peut-être intéressant que chaque lecteur donne son avis sur la question introductive et ouvre le débat en réaction à l’article


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