Droit

AGDE - La ville a t-elle délibérément censuré l'opposition dans le dernier bulletin municipal ?

" Suppression de la tribune d’expression des groupes minoritaires dans le dernier Journal Municipal,…

Suppression de la tribune d’expression des groupes minoritaires dans le dernier Journal Municipal, la censure est de mise, tout cela ne respire pas la sérénité du coté de Mirabelle ! ” s'exprimait ce mercredi matin Fabrice Mur, conseiller municipal minoritaire de la commune d'Agde.

Sa colère s'exprime après la parution du dernier journal municipal, le n°104 où la page habituellement réservée à la libre expression des groupes politiques a tout simplement disparue.

Un droit d'expression prévu par le code général des collectivités territoriales

Pourtant, l’article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales garantit le droit d’expression des conseillers municipaux qui n’appartiennent pas à la majorité en leur réservant, pour les communes de 3 500 habitants et plus, un espace dédié à la publication d’une tribune libre dans le bulletin d’information générale publié par la commune.

La page réservée à cette libre expression est systématiquement présente sur le magazine municipal agathois mais pas sur le dernier.

Une suppression due à la période électorale 

Interrogé sur le sujet, Jérôme Cavaillès, directeur de cabinet du maire d'Agde et directeur délégué de la publication répond en toute franchise sur le sujet : ” Pendant la période électorale, les supports de communication de la ville ne doivent pas être utilisés à des fins électorales. Ce principe vaut pour la majorité comme pour l'opposition. C'est ainsi que nous avons supprimé sur le dernier numéro, l'édito du maire et la tribune libre expression des différents groupes politiques, à savoir celui de la majorité municipale, celui du groupe citoyen “Réussir Agde Ensemble, des élus du rassemblement national divers droites et celui de Gérard Rey, Marc Bouvier-Berthet et Germain Castel. Six mois avant une élection, le journal municipal doit se cantonner à rester informatif et non être une tribune politique. Nous avons fait ce choix par prudence et suivant l'esprit du code général des collectifs territoriales. C'était déjà le cas lors des élections précédentes en 2008 et 2014″

Que dit la Loi ?

Autant dire que la jurisprudence s'avère fluctuante sur le sujet.

Par un arrêt du 3 juillet 2009, le Conseil d'Etat a précisé qu'une tribune libre réservée à l'opposition dans le journal municipal conformément à l'article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales pouvait être regardée, en fonction de son contenu, comme propagande en faveur d'un candidat aux élections municipales et, comme telle, être assimilable à un don provenant d'une personne morale prohibé par l'article L. 52-8 du code électoral. Sa parution était donc proscrite.

Toutefois, le 7 juin 2012, le Conseil d'Etat revenait sur cette jurisprudence et indiquait qu'un espace d'expression réservé à l'opposition municipale devait être maintenu dans le bulletin d'information municipale et que la commune ne saurait contrôler le contenu des articles publiés dans ce cadre, qui n'engagent que la responsabilité de leurs auteurs.

Dans ces conditions, si de tels articles sont susceptibles d'être regardés, en fonction de leur contenu et de leur date de parution, comme des éléments de propagande électorale de leurs auteurs, ils ne sauraient être assimilés à des dons émanant de la commune, personne morale, au sens des dispositions de l'article L. 52-8 du code électoral. 

Enfin, le 17 juin 2015, le Conseil d'Etat est venu encore préciser les choses

Ni le conseil municipal ni le maire d'une commune de 3 500 habitants et plus qui diffuse un bulletin d'information générale ne sauraient décider de suspendre la publication des tribunes réservées à l'expression des conseillers n'appartenant pas à la majorité municipale en vertu des dispositions de l'article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT), même pendant une période qui précède un scrutin électoral.

Cependant, alors même que les tribunes publiées par des élus municipaux dans le bulletin d'information générale de la commune sont susceptibles de comporter des éléments de propagande électorale, la suspension de leur publication, qui porte atteinte au droit d'expression reconnu aux élus concernés par la loi, ne peut être regardée, en elle-même, comme les privant d'un moyen de propagande électorale.

Il résulte de l'instruction que, pendant les six mois qui précédent les opérations électorales, la publication des tribunes des conseillers appartenant à la majorité municipale et celle de l'éditorial du maire sortant est à suspendre, comme celle des tribunes des élus d'opposition et que le bulletin doit par ailleurs conservé un caractère informatif, sans être utilisé à des fins de propagande électorale.

Par suite, l'absence d'une telle rubrique n'altère en rien l'égalité entre les candidats ou à la sincérité du scrutin.

Difficile donc d'y voir clair dans cette jurisprudence plutôt fluctuante bien que la dernière en date semble ne pas donner tort à la mairie.

La carte de la prudence en mairie 

Vous comprenez bien pourquoi nous sommes très prudents sur le sujet et que nous nous sommes appliqués un principe de précaution. Ceci dit, même si nous nous l'interdisons de le faire pour la majorité municipale, nous ne sommes pas opposés à l'ouvrir à nouveau aux groupes minoritaires dans le prochain numéro qui sortira courant décembre, nous n'avons aucun souci avec cela !” précise le cabinet du maire d'Agde.

Fabrice Mur à nouveau sur la tintaine en 2020 ?

En tout cas, le sujet aura été instructif à plus d'un titre puisque, outre ces précisions juridiques, la sortie du bois de Fabrice Mur, ex candidat à l'élection municipale en 2008 et 2014, donne peut-être une indication sur une prochaine implication dans la campagne électorale de 2020. Pour l'instant, l'homme, champion de joutes, était resté très discret sur le sujet.

Si son absence lors du dernier conseil municipal présentant le débat d'orientation budgétaire avait plutôt plaidé vers un forfait, sa soudaine réaction sur la “tribune libres expressions” laisse un espoir à ses fidèles supporters et à une gauche et un centre gauche qui se cherchent toujours un leader, capable de mener une alternative crédible à la majorité actuelle.


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