Société — Béziers

Béziers : “Ragnar”, 1er chien d'assistance judiciaire de la police nationale, entre en fonction

Le concept du chien d'assistance judiciaire est arrivé en France en 2019, à l'initiative du procureur de la République du Lot. Cette semaine, une nouvelle étape s'est déroulée à Béziers : le recrutement du premier CAJ de la police nationale.

Ce mercredi 4 janvier 2023, 3 ans après la première expérimentation, c’est au commissariat de Béziers que le premier chien d’assistance judiciaire de la police nationale a fait sa rentrée. “Ragnar”, labrador de 2 ans au regard doux et concentré, est d’ores et déjà prêt à se mettre au travail. Sa fonction : réduire le stress des victimes et être un facilitateur de la vérité.

Un recrutement qui a du chien

“L’arrivée de Ragnar est la concrétisation d’un projet qui est né avec Philippe, référent principal du chien et ancien policier, qui a souhaité s’investir après son départ à la retraite, se souvient la commissaire adjointe Sandrine Couzinet. Nous avons immédiatement été séduits par le dispositif. Ragnar est le premier chien d’assistance judiciaire du département. C’est aussi le tout premier chien à travailler au sein d’un commissariat en France. Alors que les dix autres chiens d’assistance judiciaire actifs dans le pays sont rattachés à la Justice, l’activité de Ragnar résulte d’un partenariat mis en œuvre entre la police, l’association France Victimes 34 et Handi’Chiens, qui s’occupe de la formation et de la mise à disposition du chien”.

Formés pendant 18 mois en famille d’accueil, Ragnar et ses semblables ont reçu un socle d’enseignement complet axé sur l’assistance des personnes. “Tous les chiens formés reçoivent la même formation pour assister les malades et les institutions, précise t’elle. L’association décide ensuite, selon les aptitudes, le potentiel et le caractère du chien, quelles sont les attributions qui lui correspondent le plus. Ragnar nous a été recommandé en raison de son tempérament et de son côté vif. Nous avons de la chance, car c’est un chien qui adore travailler. Maintenant qu’il s’est familiarisé aux lieux, il est prêt à entrer en action”.

Sa mission : rassurer et réconforter

“Le rôle de Ragnar est d’assister psychologiquement la victime dans les différentes étapes judiciaires, développe Philippe, son référent principal. Empathique, l’animal va savoir comment se positionner face à elle, voire sur elle, afin de réduire son stress et de l’aider à verbaliser les faits qui ont conduit à sa présence. Les précédentes expérimentations ont prouvé que l’animal avait une vraie incidence sur la manifestation de la vérité et la réduction du seuil de stress.”

Concrètement, lorsqu’une victime signalant des faits accepte l’assistance du labrador, son intervention va se dérouler en plusieurs temps :

  • la mise en relation entre le chien et le bénéficiaire, basée sur l’échange, un brossage ou encore une balade (environ 20 minutes)
  • l’audition avec l’officier de police judiciaire, durant laquelle Ragnar sera à proximité ou en contact avec la victime
  • un temps de jeux et de détente afin de relâcher les tensions ressenties par la personne interrogée et le chien

“Le souhait est que Ragnar accompagne les victimes qui le souhaitent sur toutes les phases, complète-il. Notre volonté est de faire en sorte que la personne qui se présente au commissariat puisse bénéficier de la présence du chien à chaque étape : audition, confrontation avec l’agresseur, interrogatoire du juge d’instruction, procès…”.

ragnar
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Le travail de Ragnar aura un impact majeur sur celui des policiers, qui auront moins d’énergie à mobiliser face aux enfants et aux victimes enfermées dans un certain mutisme. “Les expérimentations ont prouvé que les personnes signalant des faits ont plus de facilité à parler en présence du chien, explique la commissaire adjointe. Chez les enfants, une étude américaine avance que la présence du chien de soutien permet d’obtenir des témoignages dans 82 % des cas, contre 34 % sans l’animal.”

Une alliance solide

Tripartie, la convention signée entre la police, France Victime 34 et l’association Handi’Chiens repose sur une série d’engagement visant à garantir la pérennité de l’action et le bien-être de l’animal. Pour gérer ses interventions, un système de référents est mis en place au sein du commissariat. “Trois référents de France Victimes 34 vont intervenir sur la base du volontariat, ajoute Joséphine Cesbron, directrice de France Victimes 34. Pour cette action spécifique, il s’agit de 3 juristes spécialisés en droit pénal et en procédures pénales. Tous ces acteurs seront vigilants au bien-être de la personne signalant les faits et à celui de l’animal, qui peut être impacté par certaines interventions.”

La bonne réussite de l’opération repose également sur un partenariat financier, visant à alléger les coûts. “Actuellement, la formation et l’accès au chien coûtent 17 000 €, une somme prise en charge par Handi’Chiens, développe Sandrine Couzinet. Ensuite, il faut couvrir les formations des référents, soit 3 000 € pour le principal, qui a la responsabilité quotidienne du chien, et 1 500 € pour les secondaires, qui travaillent à ses côtés. Pour les coûts du quotidien, le commissariat ainsi que tous les acteurs nationaux impliqués peuvent compter sur l’investissement de la société Royal Canin. L’entreprise s’est engagée à couvrir les besoins en alimentation et frais de vétérinaires à hauteur de 1 million d’euros.” Le commissariat de Béziers a également monté l’association “L’Ami Ragnar”, un cadre juridique lui permettant de recevoir des dons pour les frais quotidiens de l’animal et les besoins en termes d’aménagement. La priorité des prochains mois : créer un espace spécifique afin d’améliorer le confort de l’animal et des personnes auditionnées.

Une valeur ajoutée vouée à se développer

3 ans après “le recrutement” du premier chien d’assistance judiciaire français, le garde des Sceaux Éric Dupont-Moretti, venu appuyer la démarche, annonçant qu’il souhaitait que dans un avenir proche, tous les départements possèdent un chien de ce type. “Nous avons lancé ce projet au commissariat de Béziers, il y a presque 2 ans, à l’initiative de Philippe, donc on peut dire que nous avons devancé l’annonce du ministre de la Justice, se félicite la commissaire adjointe. Les vrais précurseurs sont à Cahors bien évidemment, mais nous avons ajouté notre pierre à l’édifice en mettant en place pour la première fois cette démarche dans un commissariat. Notre volonté aujourd’hui est d’avoir cette démarche dans d’autres services, en premier lieu ceux dédiés aux mineurs et aux atteintes aux personnes”.

Pour la directrice de France Victimes 34, qui salue la démarche du commissariat, l’arrivée de Ragar pourrait avoir des suites. “Le but n’est pas de multiplier le dispositif à outrance mais ce serait formidable d’avoir un deuxième chien à Montpellier, reconnaît Joséphine Cesbron. Nous avons 2 juridictions et, à mon sens, suffisamment de travail pour qu’ils soient actifs”.

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