BEZIERS - SORTIEOUEST - Savoir enfin qui nous buvons de Sébastien BARRIER du 18 au 27 mars 2016 dans le cadre du Grand Tour
LE GRAND TOUR ! DU THEATRE SORTIEOUEST Elaboré en partenariat avec les Communautés de…
LE GRAND TOUR ! DU THEATRE SORTIEOUEST
Elaboré en partenariat avec les Communautés de communes et villes de l’Ouest Hérault, le Grand Tour ! est l’un des axes majeurs du projet artistique de sortieOuest. Il favorise la circulation des œuvres et du public sur l’ensemble du territoire.
Depuis 2007 il participe à l’aménagement culturel de l’ouest héraultais. Chaque saison plus de 40 représentations sont organisées en partenariat avec des communautés de communes et villes du territoire.
THÉÂTRE – 4H ET +
SAVOIR ENFIN QUI NOUS BUVONS
De et par Sébastien Barrier
Production L’Usine, Scène conventionnée pour les arts dans l'espace public (Tournefeuille / Toulouse Métropole)
Rabelais savait bien « que dans le vin est cachée la vérité ». Sébastien Barrier nous verse le vin dans les oreilles autant que dans le gosier avec cette « dégustation commentée ». Il nous conte l’aventure des vins nature et des vignerons-artistes qui l’élèvent dans la Loire avec amour (sans chimie ni modification à la vigne ou à la cave). Du vocabulaire, de l’histoire, des portraits et des travaux pratiques avec sept vins pour nos palais ravis. C’est jubilatoire. Á la culture et à la culture, donc, trinquons !
Savoir enfin qui nous buvons oscille entre / est fait de / emprunte à la fois à la dégustation commentée, à l’apéro documenté, au récit d’expérience, à l’affirmation et au partage d’un goût, au prêche de bistrotier, au dévoilement de portraits, au carnet de voyage, à la succession de récits, à la célébration du présent, à l’ode à l’ivresse, à la performance de camelot, à la conférence oenolo-ludique et à la lecture.
GENESE
Le sujet, le prétexte à savoir enfin qui nous buvons, c’est le vin, et celles et ceux qui le font. L’envie de monter cette histoire est née suite à la rencontre avec une dizaine de personnes, vignerons et vigneronnes, réunis autour d’une même conception du vin : du jus de raisin fermenté, dont la production est localisée, située, ancrée sur un terroir aux caractéristiques forcément singulières, et réalisé au plus près de son expression naturelle, c’est à dire sans recours à la chimie, tant au niveau de la culture de la vigne qu’à celui de la vinification.
Qui étaient ces hommes et femmes, loquaces, généreux, militants, parleurs, partageurs, philosophes et paysans, dont les vins sont parfois mieux connus à New York ou Pékin qu’à quelques kilomètres de leur lieux de production, s’agitant dans une indifférence quasi générale à l’époque, et incarnant à quelques-uns une résistance dérisoire face à une industrie dont on connaît la puissance ?
Quelles étaient leurs histoires, leurs parcours ? Comment dévoiler leurs parcours, relayer leurs convictions, faire connaître leur travail, diffuser leur parole, tout en offrant aux spectateurs/goûteurs un moment, un récit, une performance voire un spectacle dignes d’intérêt ?
DANS LES SONGES DE SEBASTIEN BARRIER
Entretien avec Sébastien Barrier, le 11 mars 2016. Propos recueillis par François Rodinson
Sébastien Barrier dort sur un petit matelas, entre les tables du restaurant. Ni le soleil déjà haut qui se reflète sur la Seine ni les coups frappés à la porte ne le réveillent. Il poursuit sa rêverie.
Où est ma bague ? J’ai perdu ma bague ! Qui frappe à la porte ? J’ai encore le temps. Ce soir, on joue à Blois Savoir enfin qui nous buvons. Le nouveau spectacle, Chunky Charcoal, c’est le 22 mars à Evry, à l’Agora. Ne pas se mélanger les pinceaux. J’attends l’arrivée de Jérémie, mon régisseur.
On ira manger à L’Herbe rouge, à Valaire, c’est juste à côté de Blois, au bord de l’eau. J’ai téléphoné pour prévenir Cécile, tout va bien. C’est Antony qui frappe ? Antony fait la cuisine ici jusqu’au 27 mars. Ah non, ce sont peut-être les frères Cozic. C’est un grand nom, à Rennes. Une boulangerie renommée ! Le pain, là-bas, c’est quelque chose ! Les Cozic font un stage avec Antony. Aujourd’hui, ils doivent préparer un repas pour un mariage.
Ah oui ce doit être eux qui sont à la porte. Antony leur ouvrira. Mais qu’est-ce qui m’arrive ? J’ai rien bu pourtant. Cinq bouteilles à trois, à peine. Fumé… Trois fois rien. Il y avait deux mecs qui s’engueulaient hier, en bas. Il a fallu les séparer. Et je ne trouvais plus mon chat. We We, tu es là ? Oui tu es bien chaude, toi, tu es gentille, allez, viens, on dort encore un peu tous les deux. Mais où est ma bague ? Elle vaut trois Euros mais c’est ma mère qui me l’a offerte. Ma chatte s’appelle We We. Pas Oui Oui, hein ! We We, comme le morceau de Chuck Berry We We Hours que l’on peut traduire par Les Petites heures. Elle est toujours avec moi en tournée. Hier, j’étais chez Laurent Goumarre à France Inter. Quel titre, cette émission ! Qu’importe la notoriété pourvu qu’on ait l’ivresse…
Quel dos il a, Antony ! Regarde ce dos ! Il a du coffre aussi : « Hé, Barrier, t’as pas perdu ta bague ? » C’est Antony qui m’a fait découvrir le vin nature.
Je parle dans mon spectacle de gens qui font des vins en se passant le plus possibles de saloperies exogènes. Ou de choses exogènes, disons plutôt. Antony m’avait vu faire un spectacle précédent qui s’appelait Tablantec. Et il l’avait suffisamment aimé pour m’inviter à jouer à Vinocircus qui, comme son nom l’indique est un rassemblement de vignerons sous chapiteau (60, en gros). Et des spectacles et des concerts… C’est lui qui m’a fait découvrir le vin nature. J’ai été jouer là-bas et il m’a présenté tous les producteurs dont je parle. Sept, ils sont sept. Antony est en photo, dans mon livre. Je n’ai pas fait un très bon spectacle, la première fois. « Il avait mal à la tronche ! » tonne Antony. Et ma vie a un peu changé. Ma bague, ma bague… Et en fait, de rebond en rebond… La navette Macron passe sur la Seine. Ils sont à 20 nœuds, au moins ! T’as vu comment il prend le virage ! Un sarcophage fluvial blindé gris fonce vers Matignon. La navette Balladur, en fait. Elle date de Balladur. T’as vu, Jérémie, dans Le Télégramme, ce type qui a un projet futuriste de transport en commun sur la Seine. Des bulles volantes. C’est celui qui a conçu l’hydroptère de Tabarly, Alain Thébault. Dans le monde marin, dont Jérémy est membre, tout le monde est en deuil du Père Jaouen. Jérémie a fait le tour du monde sur un voilier, quand il était ado, avec une asso. Ce n’était pas avec le Père Jaouen. Le père Jaouen, lui, il emmenait des toxicos. Toi, ça va, Jérémie ? Ha ha ha ! Le Père Jaouen est mort il y a une semaine. Tu ne savais pas ? Tu aurais dû savoir. Jérémie est marin. Il avait quatre-vingt-dix et quelques. Un âge qu’on n’aura peut-être jamais. Thierry Puzelat ne sera pas là, il est à New York. Thierry est un vigneron du spectacle et on va jouer chez lui, à Blois. Pour moi, avant, les pourvoyeurs de vin étaient des gens anonymes. Pour une fois, après ce salon Vinocircus, j’ai bu des vins… Devant eux ! Et en plus, comme ils font des vins pas trop traficotés, qui laissent, comme tu peux le voir… indemne… ça m’a un peu marqué. Thierry est là, lui aussi, en photo dans mon livre. Thierry m’a invité pour jouer à une fête, à une soirée. Une fin de vendanges, un mariage… Je suis retourner les voir et je me suis attaché à eux. Ces sont des gens attachants. Contrairement aux apparences. Il n’a pas l’air très attachant mais ce mec là est très attachant. Une tête de sanglier avec un foulard rouge autour du cou, au mur. C’est un cadeau que leur a fait François Hadji Lazaro, du groupe Pigalle (et avant Les Garçons bouchers). Thierry a été punk. Peut-être l’est-il encore… Ils sont très copains tous les deux. Au point qu’il a offert une parcelle de Romorantin (un cépage de Loire) qu’on ne vinifie qu’en Loire. En fait, en Sologne. Leur amitié l’a conduit à lui offrir une parcelle qu’il vinifie pour lui. Et du coup, au mariage de Thierry et Cécile le sanglier fut le cadeau de mariage de la part de Hadji Lazaro. L’entonnoir sur la tête du trophée est un hommage à un vigneron, Chau-Chau qui était un grand ami à eux. Je l’ai rencontré juste avant sa mort. On le retrouve aussi sur une photo de leur chai. Ce livre (et mon spectacle) est plein d’humour irrévérencieux sur des gens qui sont morts. Car Thierry pas plus que les autres et pas plus que moi ne respectent la ou les morts. Thierry, c’est quelqu’un qui ne respecte absolument rien. Rien du tout. Et pas non plus la mort. Beaucoup de punks sont morts. Pas lui, mais bon… Tout le monde rigole. Antony précise : « Il s’est quand même dépunkisé un peu ! Hé hé, il était copunk avec moi ! » Sur la photo on voit aussi l’affiche « Les raisins de la mort ». C’est quoi, Les Raisins de la mort ? C’est un micro salon qu’ils faisaient en Touraine.
Chau-Chau, c’était un vigneron qui s’appelait Christian Chaussard, de Sarthe. Quand il est mort d’un accident de vendange, en 2012, ils lui ont fait une affiche. Il y a eu une célébration au crématorium de Tours et ils lui ont rendu hommage. Il est tombé de son tracteur et il s’est fait aplatir par sa remorque. Mais il avait un cancer, donc, euh… Nous la mort, on la traite comme ça, on s’en fout. On la traite pas.
Louis Cozic ! On pourrait raconter l’histoire de la dynastie Cozic à Rennes ! Il me faut du café. Café du Honduras ! Hyppolyte Corti ! On doit être à midi à Blois. We We m’a fait courir hier soir ! Deux heures au moins ! Ma baaague !
Savoir enfin… n’est pas un spectacle littéraire. Pas du tout ! Bon il y a quand même Georges Perros. Je le cite et le récite. Perros est mort là où j’ai eu vie, c’est à dire à Douarnenez. Un port récurrent dans mon récit, un port du Finistère. C’était un comédien qui a vécu et travaillé à Paris avec Jean Vilar, Gérard Philippe et Jeanne Moreau, à l’époque. Quand il a commencé à s’ennuyer un peu du théâtre parisien, il est parti à Douarn’ et un maire stalinien de l’époque lui a prêté une maison là-bas. Pas Rabelais, pas machin… Bon, on ira manger à L’Herbe rouge plutôt ce soir. Je vais téléphoner. On va directement au théâtre. Allez, debout ! Personne n’a vu ma bague ? Antony amène du saumon fumé avec des rondelles de radis noir marinées au vinaigre. Cette crème, mon Dieu, cette crème ! La meilleure crème fraîche de France. « Du saumon à la ficelle !! Ben oui, fumé à la verticale, c’est autre chose. Goûte-moi ça… »
Livre :
Savoir enfin qui nous buvons, de Sébastien Barrier, éditions Actes-Sud.
Vendredi 18 mars à 19h – Mons La Trivalle , salle polyvalente
Samedi 19 mars à 18h – Cruzy, Salle polyvalente
Samedi 26 mars à 18h – Montblanc, salle des fêtes
Dimanche 27 mars à 17h- Portiragnes, salle Jean Ferrat
TARIFS 10/6 €
RENSEIGNEMENTS & RESERVATIONS : 04 67 28 37 32