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Coup d’envoi à l’automne pour la future cour criminelle départementale de l’Hérault

A l’heure où les libérations de détenus accusés de crime sont de plus en…

A l’heure où les libérations de détenus accusés de crime sont de plus en plus fréquentes en raison du non-respect des délais raisonnables de jugement, le raccourcissement de ces délais devient impératif. L’Hérault, confronté à une importante criminalité, est particulièrement concerné par ce problème. La prochaine création d’une cour criminelle départementale devrait contribuer à améliorer la situation.

Conformément à un arrêté du ministère de la Justice en date du 2 mars 2020, l’expérimentation de la cour criminelle est étendue aux départements de l’Hérault et des Pyrénées-Atlantiques, qui s’ajoutent à 7 autres départements du nord de la France désignés par un arrêté d’avril 2019. L’expérimentation durera deux ans dans l’Hérault, les premières audiences de la future cour criminelle départementale étant prévues à partir de fin septembre ou début octobre prochains.

Créées à titre expérimental par la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice (23 mars 2019), les cours criminelles départementales ont pour objectif de contribuer à la diminution du délai de jugement des affaires criminelles. Composées de 5 magistrats professionnels dont un maximum de deux magistrats honoraires juridictionnels ou exerçant à titre temporaire, elles jugent en première instance les personnes majeures non récidivistes accusées d’un crime puni de quinze ou vingt ans de réclusion. En cas d’appel, le jugement est du ressort de la cour d’assises.

Des délais de jugement trop longs dans l’Hérault

La cour d’assises de l’Hérault fait face à un grand nombre d’affaires à juger. Une évaluation récente des délais théoriques d’écoulement du stock a montré que le délai moyen atteint 35 mois contre 13,5 mois en moyenne nationale. Cette situation s’explique par une criminalité importante et un sous-calibrage des effectifs de justice. Récemment à Montpellier, 2 accusés ont été remis en liberté sans avoir comparu, les délais raisonnables de jugement n’ayant pas été respectés.

Tristan Gervais de Lafond, premier président de la cour d’appel de Montpellier, prévient : « On ne peut pas exclure qu’il y aura d’autres remises en liberté de détenus non jugés, étant donné la jurisprudence très stricte de la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH). La chambre criminelle de la Cour de cassation estime que passé un certain temps, le délai déraisonnable est sous la responsabilité de l’Etat, celui-ci devant donner à la justice les moyens de juger les personnes dans un délai raisonnable. »  

A l’avenir, la pression sera d’autant plus forte que la loi du 23 mars 2019 impose aux cours criminelles de juger dans un délai maximal d’un an et aux cours d’assises dans un délai maximal de deux ans.

Sur la voie du redressement

Depuis l’affectation d’un quatrième président d’assises au niveau du ressort de la cour d’appel de Montpellier, le nombre d’affaires en attente de jugement a légèrement diminué. Il se situe actuellement à 159 dossiers (75 % avec détenus) dont une grande majorité dans le département de l’Hérault. Le premier président se fixe pour objectif d’atteindre le nombre de 90 dossiers criminels jugés en 2020 (contre 83 en 2019 et 75 en 2018), puis de 100 par an ensuite.

Le renfort attendu de la future cour criminelle départementale

Selon le procureur général Jean-Marie Beney, « dans l’esprit du législateur, la cour criminelle est conçue de manière à raccourcir un peu ce que j’appelle l’excès d’oralité, mais la procédure de jugement n’est pas fondamentalement changée ». L’expérimentation dans les départements du nord du pays a montré une diminution du temps des audiences de 25 à 30 %. Et un gain de temps important résulte des délibérés, puisqu’ils ont lieu entre magistrats professionnels et non avec des jurés.

Actuellement, afin d’éviter la libération de détenus non jugés, l’audiencement ne concerne plus que les dossiers prioritaires (accusés déjà libérés sans avoir comparu) et ceux de détenus. Depuis début mars, soit les accusés sont renvoyés devant la cour d’assises, soit devant la cour criminelle départementale de l’Hérault. « Selon nos évaluations, on estime que 30 % des dossiers criminels peuvent ressortir de la compétence de cette dernière », précise Jean-Marie Beney. En outre, pour une quinzaine de dossiers renvoyés antérieurement devant la cour d’assises et qui peuvent ressortir de la cour criminelle, les accusés et leurs avocats ont la possibilité de choisir entre les deux juridictions criminelles.

Des inquiétudes pour l’avenir

L’arrivée de 3 magistrats du siège en septembre va permettre de créer la cour criminelle départementale de l’Hérault. Un poste de greffier est également créé, mais il n’est pas sûr qu’il soit effectivement pourvu. Autre inquiétude, l’organisation matérielle des procès, très lourde pour les assises et la cour criminelle. Le premier président explique : « Il faut des salles de délibérés, des salles pour isoler, et nous risquons d’être confrontés à un problème immobilier ». Celui-ci se manifesterait réellement, non dès l’expérimentation, mais en cas de succès de celle-ci, lorsqu’à partir de 2022, les cours criminelles seront généralisées et donc créées au sein des 3 autres départements du ressort de la cour d’appel de Montpellier.

 

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