Faits divers

HERAULT : «Non à une réforme de la justice qui creuse la fracture territoriale !»

Le bâtonnier de Béziers Me Éric Guilhabert, Me Frédéric Vidal le président de la…

Le bâtonnier de Béziers Me Éric Guilhabert, Me Frédéric Vidal le président de la Chambre des notaires de l'Hérault, et Me Éric Baldy le président de la Chambre régionale des huissiers de justice co-signent dans Le Figaro une tribune qui dénonce les conséquences que va avoir le projet de réforme de la justice de Nicole Belloubet sur les territoires périurbains et les populations les plus fragiles.
 
Ils maintiennent leur opposition à ce projet de loi qui va être présenté vendredi matin en conseil des ministres.
 

«Non à une réforme de la justice qui creuse la fracture territoriale !»

 
Me Éric Guilhabert est le bâtonnier de l'ordre des avocats du Barreau de Béziers, et s'exprime au nom de tous les avocats de Béziers.
Me Frédéric Vidal est le président de la Chambre des notaires de l'Hérault, et Me Éric Baldy est le président de la Chambre régionale des huissiers de justice. Ils s'expriment tous deux au nom de l'ensemble de leur profession dans le département de l'Hérault.
 
Le gouvernement affiche l'ambition de mener certaines des réformes fondamentales que notre pays attend depuis longtemps. C'est un objectif auquel tout citoyen soucieux de l'intérêt général ne peut que souscrire. Cependant, certaines des dispositions du projet de réforme de la justice porté par Mme Belloubet auront pour conséquence inévitable de creuser profondément les fractures sociale et territoriale que l'on se doit de chercher à résorber quand on préside aux destinées de la France.
 
C'est pourquoi, nous, professionnels du droit, avocats, huissiers et notaires du département de l'Hérault, nous appelons à un changement de cap dans la marche que le gouvernement veut faire prendre à la justice française. Nous sommes fondés pour le faire : nos métiers nous placent au carrefour de tous les moments clés de l'existence, des plus heureux aux plus tragiques. Qu'il soit riche ou pauvre, honnête ou malhonnête, en bonne ou en mauvaise santé, chaque Français a été ou sera un jour en relation avec l'un de nous. Nous sommes les témoins privilégiés des événements de l'existence de nos compatriotes qui forment la réalité de la France. Il est donc de notre devoir d'alerter quand l'on engage notre pays sur une fausse route.
 
Nous le constatons au quotidien sur notre territoire de l'Hérault : notre pays est traversé par des tensions profondes. Ne les attisons pas avec des décisions qui vont à contresens de ce que la situation réclame.
 
On creuse la fracture sociale quand on confie le règlement de litiges à des entreprises commerciales sous prétexte qu'ils impliquent une valeur inférieure à 10 000 euros. On prive ainsi les personnes les plus modestes de l'accès gratuit à un juge en leur imposant le recours à des plateformes de médiation payantes.
 
On creuse la fracture territoriale quand on supprime les tribunaux d'instances. Cette juridiction est géographiquement proche des justiciables, son mode de saisine est facile, elle est peu coûteuse et juge dans des délais satisfaisants.
 
On creuse encore la fracture sociale quand on promeut un numérique qui remplace le juge au lieu de l'assister. Le recours non contraint à des algorithmes laissera le citoyen seul face aux calculs d'une machine, sans échange possible avec un juge. Par ailleurs, seules les personnes maîtrisant bien ces outils seront à même de pouvoir défendre leurs droits.
 
On creuse toujours la fracture territoriale quand on concentre la plus grande part du traitement des affaires dans les capitales départementales. Les justiciables des territoires ruraux se trouveront encore plus éloignés de la justice.
 
On creuse enfin la fracture sociale quand on instaure une procédure totalement dématérialisée avec un jugement rendu sans audience, donc sans que les parties ne passent devant le juge. Les citoyens peu à l'aise à l'écrit n'auront plus la possibilité d'échanger directement avec juge pour exprimer simplement leur problème ou se défendre.
 
Nous appelons le gouvernement à réviser son analyse de la situation afin de mener à bien son projet de réforme de la justice. La France a besoin d'un effort de modernisation pour sa justice, nous en sommes tous convaincu. Mais face à l'évolution rapide du monde, aux bouleversements qui marquent notre époque, l'Etat doit plus que jamais tenir bon sur ses principes fondamentaux et concentrer toutes ses forces sur ses fonctions régaliennes. L'Etat doit jouer un rôle de repère stable dans un monde en mouvement. La justice a besoin d'être restaurée et non pas diluée. Faire l'inverse c'est ouvrir un peu plus les fossés qui divisent les Français.
 

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