Interview / Roger Lecourt : « De nombreux paramètres conditionnent le dialogue social en entreprise »
Comment le dialogue social est-il organisé au Québec ? Quelles sont les différences fondamentales avec le système français ? Comment se nourrir d’autres paradigmes pour faire évoluer les relations entre employeurs et salariés ? Le point avec Roger Lecourt, ancien vice-ministre du Travail au Québec, expert auprès du Bureau international du travail… et gentleman des relations sociales.
Roger Lecourt, comment le dialogue social québécois fonctionne-t-il ?
« Le Québec fait partie, au cœur du Canada, d’une fédération de provinces. Le champ du travail – conditions de travail, négociation collective – relève de ces provinces, et de l’une à l’autre, il existe des différences de législation, des variations significatives, outre la base commune. La particularité du Québec est d’avoir et de maintenir le taux de présence syndicale le plus élevé en Amérique du Nord, quatre fois plus important qu’aux États-Unis. Ainsi, l’activité de négociation collective
est conséquente.
A la différence de pays comme la France, la représentation syndicale n’est pas une affaire de choix individuel (un salarié qui déciderait d’adhérer à l’une des organisations syndicales). Il s’agit au Québec d’un choix collectif, qui peut être effectué par les salariés d’un établissement, d’un lieu de travail (un site). Pour qu’il y ait représentation syndicale, et les droits et obligations qui en découlent, il faut que la majorité des salariés d’un établissement donné choisissent d’adhérer à une organisation représentative. Celle-ci aura alors une reconnaissance légale. Cela véhicule une protection importante du droit syndical, et l’obligation pour l’employeur d’engager la négociation avec cette organisation, pour conclure une convention collective, qui elle-même va régir les conditions de travail et de rémunération. Cela veut également dire que dans un établissement ou un site donné, il n’y aura qu’une seule organisation syndicale représentée. La négociation se fait au niveau du site physique de travail ; elle peut également avoir lieu à l’échelle de l’entreprise, et au niveau des branches, ce que l’on nomme les négociations sectorielles. »