Entreprises

La politique du handicap en entreprise, un enjeu bien réel

D'après le baromètre Handicap, emploi et prévention en entreprise publié récemment par le réseau Club Être, le recrutement de personnes en situation de handicap au sein de l’entreprise constitue une réelle difficulté. Et les dirigeants sont peu au fait de leurs obligations légales, en particulier dans les petites structures.

Selon un rapport établi par France Stratégie et la plateforme RSE, 35 % des personnes reconnues handicapées sont employées, contre 64 % pour le reste de la population. Le taux d’emploi des travailleurs handicapés reste inférieur aux obligations légales de 6 % de l’effectif total de l’entreprise. Dans le secteur public, la proportion est de 5,4 % ; elle chute à 3,2 % pour le privé.

Un cadre légal méconnu, mais jugé utile

Le baromètre de l’institut Kantar TNS intitulé Handicap, emploi et prévention offre un aperçu des perceptions, des attentes et problématiques des acteurs clés – dirigeants, directeurs des ressources humaines, managers et responsables de la politique handicap – face à l’inclusion des personnes en situation de handicap au sein de l’entreprise. Réalisé pour le Club Être – réseau d’entreprises engagées en faveur des politiques et de la prévention du handicap – à l’occasion du Salon Handicap, emploi et achats responsables du 28 mai, à Paris, il révèle que…

une entreprise sur quatre estime ne pas connaître les implications de la loi Handicap de 2005.

Cette dernière maintient l’obligation d’emploi de 6 % pour les entreprises de plus de 20 salariés et prévoit des sanctions strictes en cas de non-respect, avec notamment l’augmentation de la contribution à l’Agefiph (Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées). Interrogés sur leur connaissance et leur perception du cadre légal,81 % des représentants d’entreprise le considèrent « utile», mais non moins « perfectible» (78 %). Dans les grandes entreprises de plus de 250 salariés, la connaissance du cadre légal est instaurée (87 % des sondés). Mais elles le jugent à 80 % « contraignant», contre 67 % à l’échelle de toutes les entreprises.

Pas une priorité

Pour la moitié des décideurs de grandes entreprises, la politique concernant le handicap est importante. Mais pour 57 % des sondés, d’autres priorités prennent le pas sur la mise en place d’actions en faveur de l’inclusion et de la prévention du handicap. Bien que 97 % des entreprises reconnaissent l’importance de la mise en œuvre d’une politique dédiée, 80 % des décideurs interrogés consacrent moins de 5 % de leur temps aux questions du handicap et de l’accompagnement des travailleurs handicapés au sein de l’entreprise, et seulement 5 % d’entre eux y dédient plus de 20 % de leur temps. Ces chiffres différent dans les grandes entreprises (plus de 250 salariés), où 38 % des sondés allouent plus de 20 % de leur temps à la question du handicap, et 33 % à l’accompagnement.

Deux freins évoqués

Le recrutement de personnes en situation de handicap est jugé difficile voire très difficile par près de 70 % des décideurs, quelle que soit la taille de l’établissement. 64 % estiment également qu’il est difficile de reconvertir et maintenir dans l’emploi les travailleurs handicapés. Plus de la moitié relèvent également un problème d’intégration dans les équipes. Le manque de candidats disposant des compétences (83 %) et le manque de moyens humains en interne (71 %) pour mettre en place la politique handicap sont les deux freins principaux évoqués. Xavier Kergall, directeur général du Salon Handicap, emploi et achats responsables le confirme : « pour les PME, PMI, ETI, il est encore très difficile de mettre en place une politique handicap […] faute de moyens humains et financiers dédiés. […] Il est essentiel qu’elles soient suffisamment sensibilisées aux bénéfices sociaux et business d’une politique handicap volontariste et qu’elles soient efficacement accompagnées en ce sens ».

Un meilleur dialogue et des démarches simplifiées

L’amélioration de la solidarité, un sentiment d’attachement plus fort à l’entreprise et une meilleure réputation sont les bénéfices cités en premier lieu par les décideurs interrogés sur les vertus d’une politique handicap. Un quart d’entre eux estiment que cela contribue à l’amélioration des performances de l’entreprise. Pour favoriser la mise en place ou la conduite plus dynamique d’une politique handicap, les décideurs interrogés souhaitent un meilleur dialogue avec les autorités institutionnelles, comme l’Agefiph, la Direccte (Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi) ou la MDPH (Maison départementale des personnes handicapées). La simplification des démarches et l’assouplissement du cadre légal sont également demandés.

Emma BUTTIN et B.L.

Priorité gouvernementale

Le projet de loi pour « la liberté de choisir son avenir professionnel »,qui sera débattu en juin à l’Assemblée, comporte un volet visant à améliorer l’insertion professionnelle des personnes handicapées. Dans les entreprises d’au moins 20 salariés, le taux de 6 % de travailleurs handicapés de l’effectif total de l’entreprise est maintenu, mais il fera l’objet d’une révision tous les cinq ans. Pour répondre à l’obligation, il n’y aura plus qu’une seule manière de satisfaire au taux prévu : l’emploi direct. Faire appel à une entreprise adaptée, un établissement et service d’aide par le travail ou un travailleur indépendant handicapé permettra uniquement de faire baisser la contribution due, quand le taux requis n’est pas atteint. Par ailleurs, le projet de loi Pacte (Plan pour la croissance et la transformation des entreprises), qui serait finalement présenté en Conseil des ministres mi-juin après de nombreux reports, prévoit, pour les entreprises, la suppression du seuil de 20 salariés et des obligations qui y sont liées, « à l’exception de celles concernant l’emploi des personnes en situation de handicap », a confirmé le Premier ministre, Edouard Philippe, le 18 mai, devant les Jeunes dirigeants d’entreprise (CJD) réunis pour leur congrès annuel à Nancy.

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