L’articulation entre assurance dommages-ouvrage et garantie de parfait achèvement
L’assurance dommages-ouvrage garantit la réparation des dommages matériels de nature décennale. Elle peut donc s’appliquer à des désordres réservés à la réception ou apparus dans le délai de la garantie de parfait achèvement.
L’articulation entre la garantie de parfait achèvement et l’assurance dommages-ouvrage n’est pas toujours simple. Il serait, en effet, tentant de croire que les désordres réservés à la réception ainsi que ceux qui apparaissent dans le délai d’un an suivant la réception ne peuvent pas entrer dans le champ d’application matériel de l’assurance dommages-ouvrage, tout simplement parce qu’ils peuvent être réparés sur le fondement de la garantie de parfait achèvement. La garantie de parfait achèvement prévue à l’article 1792-6 du Code civil (N° Lexbase : L1926ABX) est, au risque du truisme, une garantie. L’entrepreneur doit réparer tous les désordres, qu’ils soient apparents ou cachés, qu’ils soient esthétiques ou de nature décennale.
Date de prise d’effet de l’assurance dommages-ouvrage
Cette approche est d’autant plus tentante que l’article L. 242-1 du Code des assurances (N° Lexbase : L1892IBP) dispose, en ses alinéas 7 et 8, que l’assurance dommages-ouvrage prend effet après l’expiration du délai de garantie de parfait achèvement.
Des exceptions
Mais, comme souvent, le principe souffre d’exceptions et, notamment, le cas dans lequel, après la réception, après mise en demeure restée infructueuse, l’entrepreneur n’a pas exécuté ses obligations outre, bien entendu, la démonstration d’un dommage de gravité décennale (Cass. civ. 3, 19 janvier 1994, n° 92-13.994 N° Lexbase : A7740CWL, RGAT 1994, p. 561). L’affaire rapportée en est une illustration.
Cas d’espèce
En l’espèce, un maître d’ouvrage entreprend la construction d’un bâtiment à structure en bois. Se plaignant d’infiltrations en provenance des menuiseries extérieures moins de six mois après la prise de possession, le maître d’ouvrage déclare le sinistre à son assureur dommages-ouvrage lequel refuse sa garantie, faute de réception. La cour d’appel de Paris, dans un arrêt rendu le 13 mars 2019 (CA Paris 13 mars 2019, n° 16/06960 N° Lexbase : A6347Y3H), rejette la demande en réparation formée à l’encontre de l’assureur dommages-ouvrage. Le refus de procéder à la réception de l’ouvrage rend l’action formée à l’encontre de l’assureur pour des désordres réservés à la réception inéluctablement vouée à l’échec.
La Haute juridiction censure pour défaut de base légale au visa de l’article L. 242-1 précité. Les juges du fond auraient dû se demander, en l’état de la mise en demeure adressée à l’entreprise, si les désordres réservés à la réception et non-réparés au titre de la garantie de parfait achèvement pouvaient tout de même entrer dans le champ d’application de l’assurance dommages-ouvrage.
La décision est fidèle à la lettre de l’alinéa 8 de cet article. L’assurance dommages-ouvrage joue, également, lorsqu’après la réception et une mise en demeure restée infructueuse (Cass. civ. 1, 14 octobre 1997, n° 95-19.390, inédit au bulletin N° Lexbase : A2687CTP, RGDA 1998, p. 94), l’entrepreneur n’a pas exécuté ses obligations dans le cadre de la garantie de parfait achèvement.
Le fait que le désordre ait été réservé à la réception n’y fait pas obstacle (Cass. civ. 3, 23 avril 1986, n° 84-15.559 N° Lexbase : A4784AAG). L’assignation en référé signifiée par le maître d’ouvrage à l’entrepreneur est considérée comme valant mise en demeure (Cass. civ. 1, 14 octobre 1997, n° 95-19.390, inédit au bulletin N° Lexbase : A2687CTP, RGAT 1998, p. 94).
Réf. : Cass. civ. 3, 1er avril 2021, n° 19-16.179, FS-P (N° Lexbase : A47464N4)