Politique

L'Association des maires de France questionne la place des collectivités territoriales par rapport à l'Etat

Le président de l'Association des Maires de France demande une plus grande liberté d'action pour les maires… Interview de François Baroin.

Les maires se battent pour une plus grande possibilité d’action. Pensez-vous que la place de la collectivité territoriale devrait être plus importante ?

François Baroin : “J’ai probablement été l’un des premiers à plaider – depuis que j’ai pris la présidence des maires de France, il y a bientôt sept ans, sous le quinquennat de François Hollande – pour une très grande loi de libertés locales. “Décentralisation” est un terme un peu technique. Il ne parle pas trop aux gens. On voit à peu près l’idée de liberté locale et on doit récupérer des compétences que l’État ne peut plus exercer.

Le postulat, alors que je suis gaulliste et que j’ai un attachement profond à l’État, c’est que si on veut sauver l’Etat dans l’exercice de ses responsabilités pour lesquelles il est attendu : la sécurité et la défense, la diplomatie, la justice, les sujets régaliens, il doit s’alléger. Il n’a plus les moyens d’être présent partout.

L’État est “obèse” à Paris. Il est “famélique et squelettique” dans les territoires. Il y a beaucoup de secteurs, comme le domaine de la santé où l’ultra-centralisation montre les limites de l’exercice et même des défaillances qui peuvent être criantes. De ce point de vue, il faudra tirer les conséquences de la Covid-19. Nous plaidons donc pour que les présidents de régions coprésident les agences régionales de santé si elles demeurent et pour que les autres niveaux de collectivités locales y soient correctement représentés. Nous plaidons aussi pour que le président du conseil de surveillance de l’hôpital redevienne le président du conseil d’administration. C’est souvent le maire en place qui devrait le faire, pour avoir une vraie maîtrise et ne pas être simplement sur la cheminée et regarder qui est autour de la table. Dans ce rôle, il pourra vraiment être un animateur de rapprochement entre le public et le privé.

La même réflexion nous anime sur le transfert du médicosocial aux départements. Et quand on dit transfert, c’est transfert d’effectifs, de moyens budgétaires et, évidemment, d’exercice de compétences. L’État disparaîtra en quelque sorte ou, en tout cas, s’effacera très largement pour laisser soit aux régions, soit aux départements, soit aux communes, le soin d’exercer de nouvelles compétences à différents échelons. Par exemple, ce sont les communes qui financent le sport. Il faut donc leur transférer les effectifs et les moyens. Ce sont également les communes qui financent la culture, que ce soient l’entretien du patrimoine, l’égal accès pour tous à la culture et l’aide à la création.

Il faut aussi donner aux collectivités locales la possibilité d’exercer un peu plus et un peu mieux. Le même esprit nous anime sur le tourisme comme sur le logement. Bref, c’est un projet de grande envergure, parce que ma conviction est que le statu quo n’est plus possible, sauf à avoir un accident de parcours un jour ou l’autre sur le plan démocratique.”

Devrions-nous garder le département, qui nous vient de la Révolution ?

François Baroin : “Je suis attaché aux départements, mais il nous faut réfléchir à un nouveau modèle d’organisation des pouvoirs publics locaux et des libertés qui y sont attachées. Cela ne peut pas être un modèle fédéral, parce que ce n’est pas l’histoire de notre pays et qu’au fond, cela n’a pas vraiment marqué d’une empreinte psychologique la nation française. En revanche, la décentralisation est acquise dans l’esprit des gens, mais pas dans l’esprit d’une bonne part des hauts fonctionnaires qui dirigent les ministères. C’est un problème culturel. Donc, il faut imaginer un modèle. Il faut naturellement des représentants de l’État dans chaque département. Il faut leur donner plus de pouvoirs. Je suis favorable à ce que les préfets récupèrent une autorité naturelle sur toutes les administrations, parce qu’on a besoin d’un partenaire fort. Nous avons un partenaire faible, qui a très peu d’effectifs, assez peu de moyens budgétaires et qui, en réalité, décline une production de normes, élément de contrainte et bloquant, plus que de libertés locales. Il faut trouver ce juste équilibre. Il faut trouver relativement vite parce qu’il y a des forces centrifuges dans notre pays qui peuvent dilater le modèle et créer des tensions supplémentaires. Donc il vaut mieux que l’État s’approprie ce débat, plutôt que de le subir et d’être sur la défensive.”

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