LE 121ème JOUR par Antoine ALLEMAND
Plus que 120 jours (à quelques mois près ?) avant l'ouverture annoncée du centre…
Plus que 120 jours (à quelques mois près ?) avant l'ouverture annoncée du centre aquatique des Champs Blancs.
La construction de « cette gigantesque construction qui est un ouvrage d'art étonnant et très particulier » (interview d'André Tobéna lors de la visite de chantier du 2 mars dernier) entre donc dans sa phase ultime.
Comme le suggèrent l'interviewer et l'interviewé, on ne peut rêver que de « réussite » pour cet établissement que tous les contribuables agathois, volontairement ou à leur corps défendant, ont et vont financer.
Mais, sur le sujet, il n'est pas inutile de rappeler les opérations d'enfumage et le déballage de contre vérités qui ont tenu et tiennent encore lieu de communication.
PLANNING
D'abord, bien que ce soit d'une incidence mineure, revenons sur les annonces liées à l'avancée des travaux :
– En 2004, le projet de centre aquatique est évoqué en conseil d'agglomération.
– Le chantier aurait dès le début pris « deux ans de retard » pour « formalités administratives », sans autre précision.
En fait, il s'agissait « tout simplement » d'obtenir le permis de construire dans une zone protégée et de faire plier l'Architecte des Bâtiments de France qui s'opposait au projet. La décision a été emportée grâce à la réunion d'une commission « ad hoc » qui a entériné le fait de construire dans la dite zone (en modifiant au passage la ZPPAUP, Zone de Protection du Patrimoine Architectural Urbanistique et Paysager) à cause ou grâce à une entourloupette : c'est le projet de création d'une école sur le site qui a motivé l'avis favorable…L'école était nécessaire, mais certainement pas dans un lieu vide d'habitation ( déplacements automobiles obligatoires et économies assurées).
– Le 23 juillet 2007 annonce est faite en conseil communautaire de la pose de la première pierre pour décembre de la même année…
– Pose effective de la première pierre le 23 mars 2009.
– Le 11 janvier 2011 annonce lors d'une « visite de chantier » de l'ouverture du centre pour « dans cinq mois…en juin ».
– Dans la foulée, le quotidien régional n'utilisant certainement pas les mêmes sources parle du mois de septembre; ce qui sera d'ailleurs confirmé en conseil municipal où il sera question de « la rentrée ».
– « Visite de chantier du 2 mars 2011 : « Concernant les délais, on arrive à 6 mois de retard (???, l'entreprise de maçonnerie générale ayant pris du retard, tous les autres corps de métier ont fait de même »…L'ouverture est prévue pour dans « cinq mois » soit « 120 jours » (???), « Certainement en juillet .Tout sera mis en oeuvre pour respecter cette échéance… »
BUDGET D'INVESTISSEMENT
– La présentation du projet en 2004 était accompagné d'une estimation prévisionnelle des travaux de 8 054 000 euros HT.
– En juillet 2006, le coût est revu à la hausse à 9 724 000 euros HT.
– Le rapport d'activité de l'agglomération pour 2006, présenté en 2007, fait état de 11 598 000 euros ( comparables à l'estimation suivante : 10,7 millions de travaux + 0,9 millions de subventions) auxquels il convenait de rajouter 2 082 000 euros de frais d'ingénierie.
– Le 23 juillet 2007, nouveau conseil communautaire, le prévisionnel s'élève désormais à 10 700 000 euros plus 1 300 000 euros de frais d'ingénierie et 900 000 euros de subventions dèjà acquises. D'Ettore table alors sur 6 500 000 euros de subventions dont des « subventions de l'Europe ».
– Le 18 juin 2009, Henri Couquet en conseil municipal avance le chiffre de 21 millions TTC de dépenses.
– Le 28 novembre 2010, Frey a le front d'affirmer : « Je n'ai qu'1% de dépassement… un chantier exemplaire »
– La visite de chantier de mars 2011 parle de 13 millions HT et d'une progression de 3, 5 millions entre 2009 et 2011(soit une augmentation de « seulement » 37 %).
A noter qu'il est question de « 9,5 millions en 2009 » alors que le rapport de la communauté d'agglomération faisait déjà état de 11,6 millions en 2007.
Comment justifier, d'une part, un tel écart entre version officielle et version off et, d'autre part, un écart important entre chiffre « officiel » de départ et chiffre « officiel » d'arrivée ?.
Tout d'abord, il faut savoir que la municipalité refuse d'intégrer dans le coût global du projet les frais d'études et les coûts d'aménagements annexes et retranche du total les subventions perçues ou estimées (comme si celles-ci tombaient du ciel et n'avaient pas pour origine des cotisations fiscales).
Pour le reste ( de 8 millions, subventions inclues, en 2004 à 13 millions hors subventions en 2011), la justification avancée est la « nette augmentation du prix des matières premières dans les 2 ans perdus pour cause de formalités administratives ».
Cette excuse déjà servie en 2006, est ressortie en 2011; y a-t-il eu de nouveaux retards liés à des « formalités administratives » ? Si oui, quelles sont-elles ? Cette notion de « formalités » s'appliquerait-elle aux appels d'offres infructueux qui concernaient les ailes mobiles de l'édifice ?
Un instant il a été question de rallonge budgétaire dûe à la « trouvaille » de roches basaltiques sur le site; ce que l'interviewer de ce mois de mars qualifie de « problèmes liés à la coulée de basalte ».
Il fallait être aveugle ou complètement ignare pour ne pas avoir pris en compte cette réalité du territoire local.
Conscient que cette excuse ne pouvait tenir, André Tobena, aujourd'hui, abandonne la thèse un moment défendue par le maire : « On savait pertinemment que les chantiers sur Agde échappent rarement au probléme du basalte que les entrepreneurs connaissent bien et savent traiter ».
Mais il trouve une nouvelle justification aux dérapages : « s'est rajouté le secteur balnéo ».
Ce qui est bien évidemment faux : le secteur balnéo était prévu dès l'origine, il a même servi d'argument pour justifier une différence de coût entre le projet agathois et le projet d'égale importance de centre aquatique sur Béziers.
BUDGET DE FONCTIONNEMENT
Resté pendant longtemps l'Arlésienne du projet ( la seule référence avancée était celle du coût de fonctionnement de la vieille piscine tournesol ), le budget de fonctionnement fait enfin l'objet d'une estimation en décembre 2010.
Les frais de fonctionnement s'élèveraient à 900 000 euros pour 9 mois (à partir d'avril 2011) dont 423 000 euros de frais de personnel; les recettes d'exploitation seraient équivalentes à 412 000 euros; l'agglomération verserait une « subvention d'équilibre » de 310 000 euros (équilibre instable puisqu'il reste un écart de 178 000 euros entre dépenses et recettes).
Il est notable que ce budget prévisionnel prend en compte le fait que la partie balnéothérapie du centre aquatique est confiée à un exploitant privé fournissant le personnel et s'acquitant d'un loyer annuel.
Et c'est là que, si on en doutait jusqu'alors, l'amateurisme des initiateurs du projet éclate au grand jour : Accrochés obstinément à mener leur chantier de construction au bout, ils ne se sont jamais véritablement préoccupés de l'exploitation du site.
– Le 20 septembre 2010, à Florence Denestebe qui s'inquiète de la chose et dit sa préférence pour une gestion de l'ensemble par la collectivité, le Maire, alors favorable à une gestion privée de l'espace balnéo, ironise : « Je n'ai pas en stock de masseurs kinésithérapeutes ».
– En décembre de la même année, nous l'avons vu, l'option reste à la gestion partielle par un privé.
– Le 17 février 2011, soit seulement 2 mois plus tard, il est annoncé en conseil que la municipalité recherche un « spa manager ». La gestion privée est abandonnée, l'appel d'offre auquel avaient répondu une dizaine d'entreprises s'étant avéré improductif.
– Aujourd'hui, pour finir, on nous dit que la configuration du bâtiment est « mal adaptée pour une gestion partagée »…Il était temps que l'on s'en aperçoive.
Il est en même temps affirmé que « la municipalité et le personnel veilleront particulièrement sur les dépenses respectant ainsi les deniers publics ».
Il va falloir faire des prouesses car, non seulement les recettes prévisionnelles tablaient sur une fréquentation optimale du centre aquatique (100 000 usagers, à 5 euros l'entrée ou 6 euros selon la qualité du client), mais aussi sur un personnel municipal moindre et moins spécialisé que celui sur lequel il faut désormais compter (on est passé, pour la période de démarrage, de 15 à 25 salariés).
Plus la construction avance et plus le bâtiment jure avec l'espace environnant : esthétiquement le léger coléopthère qu'il était supposé évoquer prend de plus en plus l'allure d'un vilain cloporte ; il ne présente aucune unité architecturale avec les bâtiments proches et est surdimensionné par rapport à eux. Tout ce qu'on peut espérer, c'est que les aménagements extérieurs permettront de mieux l'intégrer.
Comme il n'est plus possible de faire marche arrière, on ne peut désormais que souhaiter un bon démarrage, une fréquentation assidue et une longue vie à l'établissement.
Au 121ème jour viendra le temps de faire les comptes…
Antoine Allemand