Société — Monde

Le métavers : les potentiels enjeux juridiques futurs du tout nouveau monde virtuel

Le métavers est un monde fictif, analogue au nôtre. Dernièrement, ce concept connaît une véritable ascension dans le monde digital.

En quoi consiste le métavers ? Quel intérêt a-t-il dans notre monde actuel ? Comment le droit va-t-il être amené à réguler ce tout nouveau concept encore assez méconnu du grand public ?

Définition du métavers

Le concept du métavers a été décrit pour la première fois dans le roman Simulacron 3 de Daniel Galouye, paru aux Etats-Unis en 1964 et en France en 1968. Ce roman fut retranscrit sur nos écrans en 1973 dans Le Monde sur le fil, puis repris dans Le Samouraï virtuel en 1992 par Neal Stephenson, qui a donc inventé le terme de « métavers ».

À l’origine un métavers – venant du mot metaverse en anglais – est un monde virtuel. En effet, ce terme est particulièrement utilisé afin de décrire une version futuriste d’Internet. Cette version futuriste d’Internet contiendrait des espaces virtuels, persistants – un monde persistant est un monde virtuel contenant un jeu de rôle – qui seraient accessibles par une interaction 3D.

Plus récemment, une autre définition est apparue : le métavers serait un ensemble de mondes virtuels connectés à Internet, qui seraient perçus en réalité augmentée. C’est le concept poussé par Mark Zuckerberg – fondateur de Facebook, maintenant Meta – qui en a fait sa nouvelle mission, et même son identité. L’entreprise y voit donc le « prochain internet » et d’autres entreprises comme Nvidia, Epic Games ou bien Roblox en parlent également comme l’événement du futur.

Le métavers selon Mark Zuckerberg

En revanche, le fondateur de Facebook n’est pas le créateur du métavers à proprement parler. Il existe déjà des start-up proposant des mondes virtuels. Mais Mark Zuckerberg souhaite en faire un monde beaucoup plus poussé que ce qui existe déjà. Les utilisateurs du futur métavers auront un contrôle total sur les différents mondes arborant ce dernier. La mise en place d’un avatar représentant chaque utilisateur du monde virtuel sera requis pour poursuivre l’aventure dans le métavers. Mark Zuckerberg ne parle pas d’un simple avatar, il parle d’un « vous » virtuel, avec la possibilité de créer ce dernier à partir d’une photographie de vous. De plus, vous aurez le choix de porter des vêtements de créateurs, de posséder une maison et la possibilité de décorer cette dernière ainsi que d’y inviter vos amis. Tout sera prévu dans les moindre détails. Beaucoup d’autres spécificités sont à l’heure actuelle encore non dévoilées.

L’existence d’un métavers actuel

En ce qui concerne les mondes virtuels déjà existants, l’entreprise Republic Realm, basée à New York, a annoncé avoir dépensé la somme de 4,3 millions de dollars pour l’achat d’un terrain virtuel sur The Sandbox. C’est également le cas pour un des sites concurrents, comme Decentraland, dans laquelle la société canadienne Tokens – spécialisée dans les cryptomonnaies – a déboursé 2,4 millions de dollars en novembre 2021 pour un achat immobilier.

Tout cela peut sembler irréel et amène donc à se questionner sur l’intérêt de débourser des millions dans des biens non-réels. Andrew Kiguel, ancien banquier d’investissement sur le secteur immobilier, affirme que ces terrains virtuels représentent une opportunité semblable aux biens du monde réel.

Ainsi, en vertu de ces évolutions dues au métavers, comment le droit va-t-il réguler ce secteur encore méconnu de notre législation ? En effet, toutes les évolutions peuvent amener à de potentiels excès…

Le métavers et le droit

Plusieurs personnalités songent à réguler le métavers, comme la commissaire européenne à la concurrence, Margrethe Vestager. En effet, fixer des règles concernant ces mondes virtuels amèneraient à une solide protection dès le départ. Néanmoins, réguler à l’avance un champ économique naissant pourrait freiner cette innovation. Or, la régulation est d’autant plus utile quand elle ne s’applique pas avec des années de retard à un secteur déjà mature et dominé par des géants, comme c’est le cas pour les moteurs de recherche, les réseaux sociaux, les logiciels, etc.

À l’heure actuelle, la portée du métavers ainsi que son implication dans la vie des particuliers restent à déterminer. Il n’existe aucune base légale ni aucune jurisprudence à ce sujet. De ce fait, les professionnels du droit mettent en garde contre les litiges liés à la propriété intellectuelle, à la protection des données, aux licences de contenu ainsi qu’aux risques liés aux crypto-actifs. À titre informatif les crypto-actifs ne sont pas une monnaie au sens propre, mais sont a fortiori la détermination de la valeur d’une chose en fonction de l’offre et de la demande. Grâce au raisonnement par analogie, certains éléments de notre législation peuvent, peut-être, être applicables au métavers.

Une potentielle législation sur les utilisateurs du métavers

Les utilisateurs du métavers seront représentés sous forme d’avatars. Il est ainsi peu probable que la personnalité juridique leur soit reconnue : ce ne sont pas des personnes stricto sensu, ils ne disposent d’aucune autonomie réelle. En revanche, ces utilisateurs virtuels pourront être vus comme une extension à la personnalité juridique. De manière schématisée, admettons qu’un utilisateur viendrait usurper l’identité d’un autre avatar. Si l’usurpateur de l’identité venait à conclure un contrat à travers un avatar qui n’est pas le sien, le contrat pourrait-il être annulé ? Si on vient admettre l’intuitu personae dans un contrat conclu, l’invocation de la nullité de ce dernier pour erreur sur les qualités essentielles du cocontractant fondée sur l’article 1134 du Code civil, serait donc admise. Sans oublier que l’usurpation d’identité serait également punie par le Code pénal.

Une éventuelle législation sur la liberté des utilisateurs

La liberté sur le métavers sera avant toute chose déterminée par les programmeurs. Si l’exemple du futur métavers de Mark Zuckerberg est pris, on ne s’attend pas forcément à des nuisances « physiquement virtuelles » ou « moralement virtuelles », mais ce n’est pas pour autant qu’il faut délaisser le domaine du droit pénal. Le vol d’identité peut être une infraction à envisager afin de garantir en premier lieu une sécurité sans faille. D’autant plus que le vol de données personnelles des utilisateurs, ou encore les nouvelles formes d’escroqueries et de fraudes qui pourraient naître de ce nouveau concept virtuel, sont également à prendre en compte. En ces termes, l’adage latin « nullum crimen, nulla poena sine lege », autrement dit, le principe de la légalité des délits et des peines mérite d’être rappelé. En effet, il découle de ce principe que nul ne peut être puni pour un crime ou pour un délit dont les éléments ne sont définis par la loi, ou pour une contravention dont les éléments ne sont pas définis par le règlement.

L’hypothétique législation sur les échanges entre utilisateurs

Parmi les nombreux visionnaires du métavers, l’espace interactif et immersif de ce dernier va se traduire par des échanges entre utilisateurs. Ces échanges, nous les retrouvons déjà dans notre monde réel depuis des millénaires. Par le biais du caractère interactif de la future plateforme virtuelle, la transparence et la traçabilité des opérations doivent être garanties afin de résoudre les litiges relatifs aux propriétaires des œuvres créées dans le métavers. La création d’assurance serait peut-être envisageable au regard de potentielles fraudes, pour indemniser les futurs utilisateurs. Nos professionnels du droit sont compétents pour ce genre de litige, ainsi cela conduirait à la création d’un nouveau secteur juridique, comme par exemple, un avocat spécialisé en droit du métavers. Cela aurait donc pour conséquence la création et le développement du monde professionnel réel. 

En outre, cela génère une multitude de problématiques, notamment d’un point de vue du droit fiscal : qu’en sera-t-il de l’impôt sur le revenu ? Sera-t-il retranscrit virtuellement aux biens acquis dans le métavers ?
Ces débats et ces enjeux juridiques ne sont que d’ordre philosophique, à l’heure actuelle. Mais il faut tout de même s’attendre à l’arrivée de ce nouveau monde et à de potentiels changements autant ordinaires que juridiques.

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