Loi Liberté de choisir son avenir professionnel : les 10 points clés

L’Assemblée nationale a adopté le mercredi 1er août 2018, à une large majorité avec 137 voix pour et 30 voix contre, la loi pour la Liberté de choisir son avenir professionnel. Voici ce qu'il faut en retenir…

Cette loi doit apporter de nouveaux droits aux concitoyens français et leur donner les moyens de construire leur propre voie de réussite professionnelle grâce à des protections collectives. Elle fait suite aux ordonnances pour le renforcement du dialogue social (acte I) dont l’objectif est de faire converger l’impératif de performance économique avec celui de progrès social. Le gouvernement indique avoir fait le pari de la confiance dans les acteurs, les entreprises, les salariés et les partenaires sociaux. Toujours selon le gouvernement, ces ordonnances ont permis de lever les freins à l’embauche des entreprises ; et dès lors, les compétences deviennent un enjeu primordial.  C’est tout l’enjeu de l’acte II, la loi pour la Liberté de choisir son avenir professionnel. Selon Muriel Pénicaud, la ministre du Travail qui porte la loi, celle-ci intègre l’ambition de l’émancipation sociale par le travail et la formation : “…pour que la croissance profite à tous, pour que chacun puisse choisir et non subir sa vie professionnelle, cette loi permet d’établir un accès plus simple, plus rapide, plus vaste, et plus juste à l’atout majeur du XXIe siècle : les compétences”.

La loi comprend plusieurs titres :

– Titre I : vers une nouvelle société de compétences : le développement massif de l’apprentissage et l’accès réel à la formation professionnelle ;

– Titre II : une indemnisation du chômage plus universelle  et plus juste : de nouveaux droits à l’assurance chômage ;

– Titre III : dispositions relatives à l’emploi : une société plus inclusive pour une égalité professionnelle réelle entre les femmes et les hommes et la lutte contre le harcèlement sexiste et sexuel au travail, un accès à l’emploi des personnes en situation de handicap plus universel et une protection plus efficace pour les travailleurs détachés.

Selon la ministre, et comme pour toute réforme structurelle, “cette transformation de notre modèle social mettra plusieurs mois à porter concrètement ses fruits”. “Mais l’inclusion n’attend pas, dit Muriel Pénicaud et nous devons, dès aujourd’hui, aider les plus éloignés de l’emploi. C’est le sens du Plan d’investissement dans les compétences, lancé fin 2017, et qui a pour objectif, à travers la formation, d’insérer durablement dans l’emploi un million de jeunes et un million de demandeurs d’emploi”.

 

Les 10 points-clés de la loi


1 – Décider de son propre avenir professionnel

Aujourd’hui, seulement 6 % des ouvriers choisissent de se former, alors qu’ils sont 25 % chez les cadres. La loi précise qu’une information transparente et simple sera fournie à tous les actifs pour qu’ils deviennent acteurs de leur formation professionnelle :

Une nouvelle application CPF (compte personnel de formation) disponible à l’automne 2019 donnera un accès simple et égal à la formation à tous les actifs. Grâce à l’application, chaque actif, avec son CPF et sans intermédiaire, pourra comparer la qualité des formations des organismes certifiés, le taux de réussite, la satisfaction des utilisateurs, et ainsi trouver la formation correspondant à ses aspirations professionnelles, mais aussi s’inscrire et payer en ligne.

Tous ceux qui le souhaitent pourront se faire conseiller sur leur projet professionnel, en faisant appel à des conseils en évolution professionnelle gratuits présents sur tout le territoire.


2 – Se former et acquérir des compétences, quelle que soit sa situation de départ

50 % des métiers sont amenés à changer dans les dix prochaines années. Les entreprises disent ne pas trouver suffisamment de compétences pour se développer. Dans le même temps, les ouvriers, les employés et les salariés des TPE et de PME ont deux fois moins accès à la formation que les cadres et les salariés des grandes entreprises . Avec la nouvelle loi, chacun devrait pouvoir se former, évoluer dans sa carrière et s’adapter aux évolutions du monde du travail :

Les jeunes pourront entrer en apprentissage jusqu’à 30 ans.

Chaque actif disposera sur son CPF de 500 € par an pour se former, et 800 € pour les moins qualifiés, soit respectivement 5 000 € et 8 000 € sur dix ans.

Les personnes à mi-temps, qui sont à 80 % des femmes, bénéficieront des mêmes droits à la formation que les salariés à temps plein.

Les travailleurs des plateformes auront également accès à la formation professionnelle pour pouvoir changer d’activité et se reconvertir.

Les personnes en situation de handicap auront un abondement de leur CPF.


3 – Être accompagné dans sa reconversion professionnelle

64 % des Français souhaitent engager une reconversion professionnelle. Cela concerne avant tout les jeunes : les personnes de moins de 30 ans sont aujourd’hui 69 % à vouloir changer de métier ou d’entreprise. De nouvelles mesures doivent permettre de répondre à ces attentes, pour s’adapter aux besoins spécifiques de certains secteurs d’activité, pour anticiper les reconversions liées aux mutations des métiers :

la création d’un nouveau dispositif de reconversion ou de promotion par l’alternance (Pro-A) permettra aux salariés, tout en gardant leur contrat de travail et leur rémunération, d’accéder à une formation qualifiante en alternance, soit pour une promotion interne, soit pour une reconversion ;

le CPF de transition permettra de changer de métier ou de profession dans le cadre d’un projet de transition professionnelle tout en bénéficiant d’un congé spécifique pendant le temps de formation ;

toutes les personnes qui le souhaiteront  pourront être accompagnées par un conseil en évolution professionnelle gratuit ;

les droits au chômage seront ouverts pour les personnes démissionnaires qui ont un projet professionnel ;

de nombreuses places supplémentaires en apprentissage seront ouvertes afin de permettre à plus de jeunes de se former, jusqu’à 30 ans, y compris après une première expérience professionnelle.


4 – Faire pour apprendre : choisir l’apprentissage, une alternative pédagogique porteuse d’avenir

70 % des apprentis ont un emploi sept mois après leur diplôme et nombreux sont ceux qui se lancent dans l’entreprenariat. Ils sont environ 400 000 jeunes à choisir cette voie de formation initiale. La loi entend renforcer l’attractivité de l’apprentissage pour le développer massivement à tous les niveaux de qualification :

500 € d’aide au permis de conduire pour les apprentis majeurs.

une augmentation de 30 € par mois pour les apprentis de moins de 20 ans en CAP ou en Bac pro.

tout contrat entre un jeune et une entreprise aura sa formation en CFA financée.

les passerelles entre l’apprentissage et le statut scolaire ou étudiant seront facilitées et les campus de métiers regroupant toutes les filières seront développées.

15 000 jeunes apprentis auront la possibilité chaque année de partir en « Erasmus pro » en Europe d’ici la rentrée 2022.

tous les jeunes auront la possibilité d’entrer tout au long de l’année en apprentissage, et de faire valoir leurs acquis pour raccourcir la durée de la formation ou, au contraire, en cas de difficulté, de l’augmenter avec une « prépa apprentissage » financée par le Plan d’investissement dans les compétences du gouvernement.

le nombre d’écoles de production sera doublé d’ici 2022.


5 – Permettre aux entreprises de développer l’apprentissage

Pour le gouvernement, développer l’apprentissage, c’est lever les freins spécifiques à chaque entreprise. Les mesures consistent à :

• octroyer une aide unique (pour plus de lisibilité) aux entreprises de moins de 250 salariés qui forment des jeunes en CAP ou en Bac pro ;

donner à toutes les entreprises la possibilité d’ouvrir un CFA, mettre en place un collecteur unique (URSAFF), donner aux jeunes la possibilité d’entrer en apprentissage tout au long de l’année, créer une durée de contrat tenant compte des acquis de l’apprenti…

• simplifier les démarches pour tous les CFA ;

laisser les branches professionnelles coconstruire le contenu des diplômes avec l’Etat ;

le droit du travail tiendra compte des spécificités de certains métiers.


6 – Aider les jeunes et les salariés à mieux s’orienter

Choisir son avenir professionnel est un élément clé de la construction de la vie de chacun, pour cela :

les taux d’insertion dans l’emploi et de réussite aux diplômes de tous les CFA et de tous les lycées professionnels seront publics ;

les régions organiseront avec tous les collèges et lycées une découverte des filières et métiers par la rencontre de professionnels qui viendront partager leur passion et leur savoir-faire ;

la création d’une classe de troisième « prépa-métiers » pour préparer l’orientation des collégiens vers la voie professionnelle et l’apprentissage permettra de poursuivre l’acquisition du socle commun de connaissances et de compétences ;

le conseil en évolution professionnelle permettra aux actifs qui le souhaitent d’être accompagnés gratuitement dans le choix de leur parcours professionnel et de leur formation.


7 – Donner de nouveaux droits aux salariés démissionnaires et responsabiliser les acteurs

La mobilité professionnelle est une opportunité d’engager une reconversion ou une création d’entreprise, mais les salariés se trouvent confrontés à des obstacles qui les en dissuadent, comme le risque de perte de revenus en cas de démission. Par ailleurs, les indépendants ne bénéficient d’aucune protection systématique contre le risque de chômage lorsque leur activité cesse. De nouveaux mécanismes de protection sont annoncés :

les personnes qui démissionnent en ayant un projet de création d’entreprise ou de reconversion professionnelle auront désormais droit à l’assurance chômage au même niveau d’indemnisation que les autres ;

les indépendants bénéficieront d’un premier filet de sécurité pour rebondir lorsque leur activité connaît une liquidation judiciaire. Ils recevront 800 € par mois durant six mois, sans avoir à payer de cotisation supplémentaire ;

par ailleurs, une négociation sur le système d’assurance chômage débutera à la rentrée 2018 afin de lutter contre la précarité excessive (ex : bonus-malus…) et inciter au retour à l’emploi.


8 – Rendre réelle l’égalité entre les femmes et les hommes dans les entreprises

Quarante-cinq ans après la loi pour l’égalité professionnelle, les écarts de salaires entre les femmes et les hommes perdurent avec 9 % de différence à travail égal et 25 % sur l’ensemble de la carrière. Pour une égalité enfin réelle dans le monde professionnel, la loi dispose ceci :

les entreprises auront 3 ans pour se conformer à l’égalité salariale. Pour cela, un instrument commun de mesure sera mis en place ;

les entreprises devront dédier une enveloppe au rattrapage salarial et un contrôle sera effectué, avec sanctions si ce dispositif n’est pas respecté au bout des trois ans prévus ;

les salariés à temps partiel, qui sont à 80 % des femmes, auront les mêmes droits à la formation que les salariés à temps plein ;

pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles, un référent, élu du personnel, sera désigné dans les CSE (Comité social et économique) de toutes les entreprises, et un référent ressources humaines sera nommé dans les entreprises de 250 salariés ou plus ;

les inspecteurs du travail et les professionnels de la médecine du travail seront formés de manière systématique pour prévenir les situations de violence, apporter une réponse adéquate et accompagner les victimes.


9 – Faciliter l’accès à l’emploi pour les personnes en situation de handicap

Avec seulement 3,4 % des salariés et 1,2 % des apprentis en situation de handicap dans les entreprises, notre société n’est pas assez inclusive. La loi propose de développer les compétences et l’accès à l’emploi durable des personnes handicapées. Selon le gouvernement, élargir la palette des outils existants est une priorité :

le périmètre de l’obligation d’emploi sera désormais apprécié au niveau de l’entreprise, ce qui permettra d’ouvrir 100.000 emplois aux personnes en situation de handicap ;

les créations d’emplois dans les entreprises adaptées passeront de 40.000 à 80.000 d’ici 2022 ;

chaque CFA aura un référent handicap et percevra une aide supplémentaire pour chaque apprenti en situation de handicap. Les enseignements et les postes de travail seront ainsi adaptés.


10 – Mieux protéger les entreprises et les salariés contre les fraudes au travail détaché

S’il permet parfois à des entreprises de trouver des compétences indisponibles rapidement en France, le travail détaché ne doit pas favoriser le dumping social en Europe et doit être mieux régulé et contrôlé. C’est pourquoi, sous l’impulsion de la France, la directive « travailleurs détachés » a été révisée en 2018. Elle prévoit désormais le principe « à travail égal, salaire égal » dans tous les pays européens :

quel que soit le statut du salarié (résidant en France ou travailleur détaché), le salaire net devra être le même, y compris les avantages accordés par la branche.

de plus, pour lutter efficacement contre la fraude, les pouvoirs de contrôle de l’administration sont fortement renforcés par la loi. Concrètement, l’administration pourra désormais ordonner la suspension d’une prestation (ex : la fermeture temporaire d’un chantier) lorsqu’une entreprise condamnée pour fraude au travail détaché ne s’est pas acquittée de l’amende prononcée.


Pour en savoir plus sur la loi…

Retrouvez le détail de la loi sur le site du ministère du Travail : www.travail-emploi.gouv.fr/grands-dossiers/liberte-de-choisir-son-avenir-professionnel

Lire le discours de Muriel Pénicaud prononcé le 11 juin 2018 en séance publique devant l’Assemblée nationale.


Bon à savoir :

LE PLAN D’INVESTISSEMENT DANS LES COMPÉTENCES

Le gouvernement a lancé le Plan d’investissement dans les compétences. Doté d’un montant de 15 milliards d’euros sur cinq ans, il doit permettre de former et d’accompagner un million de demandeurs d’emploi peu qualifiés et un million de jeunes décrocheurs à l’horizon 2022. Il se réalise à travers un partenariat avec les Régions et des actions innovantes notamment dans le secteur numérique, la transition écologique, les métiers en tension et l’inclusion dans l’emploi des plus vulnérables.


(Source : ministère du Travail)

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