Expositions — Montpellier Méditerranée Métropole

Montpellier, 21es Boutographies : retour sur une édition attendue

Lieu emblématique de la photographie à Montpellier, le Pavillon Populaire accueillait du 19 au 30 mai dernier le festival des Boutographies, première manifestation culturelle de la saison. Les faits marquants de cette édition.

Malgré la crise sanitaire, le Pavillon n’a pas désempli. Il s’agissait d’une édition spéciale pour les Boutographies cette année, puisqu’elle regroupait les sélections officielles de 2020 et de 2021. Les clichés d’une quinzaine de photographes étaient visibles en accrochage au Pavillon Populaire, en plus des images des 40 autres photographes de la sélection officielle en projections.

Comme à son habitude, le festival des Boutographies a eu la volonté de présenter à Montpellier la jeune scène photographique européenne. Avec une dizaine de pays européens représentés, les Boutographies prennent le pouls de l’actualité européenne grâce à des sujets percutants et variés. Ce qui démarque le festival, c’est incontestablement la multiplicité et la diversité des regards. Comme à son habitude, l’équipe du festival a choisi de mettre en lumière des photographes tant plasticiens que documentaristes. On notera également une forte présence féminine puisqu’elles représentent plus de la moitié de la sélection officielle de cette année.

Une jeune photographie qui casse les codes

L’édition 2021 illustre parfaitement ces nouvelles formes hybrides de documentaires qui définissent cette jeune génération de photographes. Terminé le temps où les cadres se suivent les un après les autres. Aujourd’hui, les photographes accordent une grande importance à la scénographie ; le collectif arlésien VOST en est un bel exemple. Installé sur près de la moitié de la grande salle du Pavillon Populaire, sa série Proxima B raconte de manière ludique les métamorphoses et les altérations de notre époque. Wallpaper, photographies suspendues, enchevêtrées, posées, cette importante accumulation d’images iconographiques dénonce le caractère omniprésent de l’image dans notre société.

Autre exemple de scénographie cassant les codes, celle d’Antoine Lecharny avec sa série Même pas morts. Le jeune photographe de 26 ans interroge ses proches sur la perte d’êtres chers et le deuil. Une scénographie pour le moins minimaliste, où les images, imprimées sur du papier japonais extrêmement fin, sont accrochées avec de simples clous au mur. Le photographe assume complètement cette fragilité matérielle qui illustre en réalité celle de son propos. Antoine Lecharny est un photographe à l’avenir prometteur, puisqu’il est déjà lauréat de plusieurs grands prix nationaux, dont le Prix du Public 2021 des Boutographies.

Présence polonaise

A l’honneur dans cette édition, on notait une grande présence polonaise puisque que l’on dénombrait pas moins de 5 photographes originaire du pays. Hasard ou non, face à une actualité houleuse qui agite la Pologne aujourd’hui.

On retiendra une trame forte, celle de la question de l’assignation à divers sujets, comme celle du genre dans la série d’Agata Wieczorek, Fetish of Image. La jeune photographe fait preuve d’une grande maturité dans ses images, avec un travail en studio incroyablement précis. Elle dévoile une communauté peu connue du grand public et pourtant très repandue dans le monde entier : le fétichisme du masquage. On découvre une communauté majoritairement composée d’hommes, qui a comme activité principale « de devenir quelqu’un d’autre » : une femme. Agata Wieczorek allie photographies de studio, ainsi qu’une partie plus documentaire dédiée à l’industrie de la fabrication de ces masques en silicone. Enfin, pour compléter cette série, on pouvait voir de vrais masques exposés, à l’aspect extrêmement réaliste.

D’autres interrogations sur l’assignation liée à la maternité cette fois-ci, interpelle dans le travail de Jagoda Wisniewska, My Mother is an Hippie. Diplômée de la prestigieuse école de photographie de Lausanne l’ECAL, Jagoda questionne l’image de la maternité. «  Le projet «Ma Mère est une hippie» s’inscrit dans ma fascination de longue date pour la figure maternelle. Dans cette série, je m’attaque à ce poncif qui voudrait que l’amour d’une mère pour son enfant soit « inconditionnel ». J’explore la façon dont pouvoir et impuissance se côtoient et s’imbriquent profondément dans la relation mère-enfant », explique la photographe.

Autre exemple de la présence polonaise, la série Niewybush, réalisée par Natalya Kepecz. Star de plusieurs festivals cette année, la photographe relate avec une grande douceur le quotidien de camps d’été militaires. Devenus très populaires auprès des adolescents polonais, ces camps d’entraînement ont pour but de renforcer l’esprit patriotique. C’est avec une grande consternation que les visiteurs ont pu découvrir l’esprit récréatif dans des mises en situations hyper réalistes. Faux sang, armes de gros calibres et matériels militaires sont mis à la disposition de jeunes ne dépassant parfois pas les douze ans. Une série qui questionne la photographe : « J’ai découverts ces camps en revenant visiter mes parents il y a quelques années. Ces lieux m’ont interpellée tout de suite. Pour moi, ils sont le miroir de la société polonaise actuelle, qui se renferme sur elle-même. Je suis extrêmement inquiète et choquée de voir des parents qui ne réalisent pas l’ampleur que ces camps peuvent avoir sur leurs enfants ».

Prix du jury

La grande gagnante de cette année n’est autre que la photographe Julie Joubert, avec sa série MIDO. Dans ce travail au long cours, Julie Joubert dessine le portrait d’Ahmed. La photographe fait la rencontre d’Ahmed lors d’un travail photographique qu’elle effectuait dans un centre de réinsertion en 2017. Mido, c’est le surnom d’Ahmed ; une manière pour lui de brouiller les pistes dans un quotidien incertain et ponctué d’allers et retours en prison. La photographe parisienne mêle dans sa série des portraits qu’elle réalise et des images prises au téléphone, qu’Ahmed lui envoie de prison. Une volonté de la photographe de documenter au plus près le quotidien du jeune garçon.

Julie Joubert s’est déjà fait remarquer avec cette même série puisqu’elle a remporté cette année le Prix Caisse d’Epargne, le Prix Caritas et enfin elle est finaliste du prestigieux Prix Mentor.

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