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OCCITANIE - Intervention de Christophe RIVENQ à l'Assemblée Plénière de la Région Occitanie

Assemblée plénière de la Région Occitanie du 2 février 2017Intervention de M. Christophe RIVENQ,…

Assemblée plénière de la Région Occitanie du 2 février 2017

Intervention de M. Christophe RIVENQ, Président du groupe UEDC

Madame la Présidente,

L’Assemblée plénière de ce jour est, à n’en pas douter, l’une des plus chargée et l’une des plus politique depuis votre élection à la Présidence de notre Région. En effet, vous nous proposez sur deux jours, pas moins de X rapports, dont certains auront une portée sur l’ensemble de votre mandat. En moins de 48 heures, vous allez nous demander de nous prononcer sur le SRDEII, le SRADETT, les Etats Généraux du Rail, le plan éducation, le Plan Littoral 21 et rien de moins que le Budget 2017.

Je ne sais pas ce que nos concitoyens, et les médias présents, vont en retenir, mais il y a fort à parier que beaucoup auront mal au crâne après ces débats.

Si je vous fais confiance pour mettre en place une communication tout à votre avantage, je doute qu’une fois de plus nos interventions ne trouvent quelque échos à vos yeux. Sachez que nous le regrettons. Et comme j’ai déjà eu l’occasion, à plusieurs reprises, de le dire devant cette Assemblée, je dénonce à nouveau la faible place que vous faites aux élus régionaux que nous sommes. Avez-vous peur d’affronter la réalité, Madame la Présidente, ou n’avez vous pas le courage de confronter votre vision à la nôtre.

Alors que beaucoup de Régions Françaises osent mettre en place de nouvelles politiques publiques, sur l’emploi, sur les transports, sur la formation, vous restez enfermée dans vos dogmes et vos postures qui ont échoué ces dernières années en dépensant sans compter, et surtout en faisant fi des difficultés financières que rencontrent notre Pays et ses habitants, à l’image du gouvernement de la France dont vous-même et votre 1e Vice-Présidente avez fait partie et qui vient dimanche dernier d’être sanctionné vertement par vos électeurs. Cela ne peut plus durer. Pourtant, comme nous le verrons également au cours de cette séance, vous allez réserver un enterrement de première classe à un certains nombre de mesures emblématiques de votre gestion passée, comme LoRdi, le TER à 1€ ou encore les PRAE, et ce contrairement à vos promesses de campagne, sans que cela ne se traduise par des baisses de dépenses. Bien au contraire. Nous y reviendrons.

Pourtant, tout a été dit sur la gestion des Régions par les majorités de gauche lorsque celles-ci régnaient presque sans partage dans le paysage institutionnel local, particulièrement entre 2004 et 2015.

Investissements paillettes et gaspillages en tous genres, politiques clientélistes et émiettement des interventions, dérives sur les dépenses de personnel, dette en croissance exponentielle, explosion de la fiscalité sur les ménages et sur les entreprises, dégradation continue de l’épargne, chute de la part des investissements dans les budgets : au plan régional, la gauche n’a pas échappé à son bilan, pas davantage qu’au plan national.

L’examen des rapports de notre session plénière nous offre donc aujourd’hui l’occasion de changer de registre et de quitter le terrain de la gestion pour aborder celui de la stratégie.

Bien entendu, pour prendre la pleine mesure de la stratégie exprimée dans les projets de délibérations inscrits à l’ordre du jour de notre session plénière, il faut faire l’effort de lever le nez du guidon, de prendre du recul et de s’extraire de la seule lecture des rapports fleuves que vous proposez au vote de l’assemblée.

A la condition de s’astreindre à cet effort, nous pouvons déceler une forme de cohérence d’ensemble dans vos propositions. Mais cette cohérence n’est pas mise au service des acteurs des territoires, loin s’en faut.

Qu’il s’agisse en effet du budget primitif, du « Plan Marshall » pour l’emploi en faveur des entreprises du BTP, des contrats de filières, de l’organisation dite « sécurisée » de la commande publique régionale, du PPI 2016 – 2021 pour les lycées, de la nouvelle politique éducative 2017, de « la stratégie régionale pour l’emploi et la croissance », déclinée en deux Schémas et en un contrat de plan, ou de votre vœu intitulé « Donner aux Régions les moyens de préparer l’avenir »,  toutes vos propositions sont fondées sur un postulat : en dehors de la Région, point de salut.

Derrière ce constat apparemment inoffensif se profile une réalité accablante. Nombre de rapports que vous soumettez aujourd’hui au vote de notre assemblée illustrent cette réalité, même si vous déployez des trésors d’imagination pour gommer la nature véritable de votre politique, en la noyant sous des centaines de pages de littérature indigeste.

Cette politique, c’est d’abord la résurgence d’une forme de jacobinisme qui tend à faire de la Région un acteur tutélaire dans la mise en œuvre des politiques locales. Vous exhumez avec gourmandise les vieilles convictions jacobines et étatistes. C’est la négation même du processus de décentralisation engagé depuis plus de trois décennies dans notre pays pour mettre nos collectivités territoriales au même niveau de responsabilité et d’autonomie que celles des pays voisins.

Votre rapport sur « la nouvelle politique éducative 2017 » s’inscrit dans la droite ligne de ce retour au jacobinisme. Nous y reviendrons tout à l’heure. A vous lire, toutes les questions ayant trait à la politique éducative et par extension, à la jeunesse, relèveraient désormais de votre mission. Ainsi, je vous cite, vous voulez « faire des jeunes des citoyens à part entière, des acteurs des politiques régionales ». Les autres niveaux d’administration locale sont priés d’obtempérer et les familles sont invitées à vous remettre les clés de leurs maisons…

Cette politique, c’est aussi l’affirmation d’un discours technocratique qui transpire non seulement dans les délibérations mais encore dans tous les supports de communication de la Région. Ce discours nous délivre une vérité : « citoyens d’Occitanie, la Région est là et s’occupe de tout ». Ecole, santé, emploi, culture, sport, transports, logement, industrie, agriculture, tourisme, infrastructures, énergie, aucun des actes de notre vie quotidienne n’échappe à l’interventionnisme tous azimuts de notre collectivité. Mais le résultat saute aux yeux : à vouloir être partout, la Région n’est finalement nulle part. Les principaux indicateurs socioéconomiques de la Région le démontrent cruellement.

Votre projet de Budget Primitif pour 2017 illustre magistralement cette boulimie interventionniste alors que dans un contexte financier très tendu, l’urgence commande de décliner l’action publique sur un nombre limité d’interventions prioritaires précisément identifiées. Or, vous vous obstinez dans votre dogme de l’émiettement budgétaire. Nous y reviendrons également tout à l’heure.

Votre rapport sur le PPI 2016 – 2021 dans les établissements d’enseignement relève lui aussi de cette même idéologie. Ce n’est pas la conception que nous avons de la programmation pluriannuelle.

Nous reparlerons également demain de votre « plan rail » ou sous la pression d’une partie de votre majorité, vous nous proposerez plusieurs milliards d’investissements et des centaines de millions d’euros de fonctionnement supplémentaires en oubliant plus de 90% des habitants de notre Région.

Le corollaire de ce discours est l’avènement d’une technostructure tout entière consacrée à édicter des normes et des règles qui s’additionnent à l’inflation de textes législatifs et réglementaires produits par l’Etat et par l’Europe. Cela contribue à rendre encore plus illisibles, plus complexes et plus inopérants vos propres programmes d’intervention.

Ainsi, tout un pan des attributs de la démocratie locale devient inaccessible aux citoyens,  progressivement dépossédés des ressources et des libertés qui devraient leur permettre de concrétiser leur esprit d’initiative.

Dans un rapport du Conseil d’Etat de 1991, on pouvait déjà lire : « Quand le droit bavarde, le citoyen ne prête plus qu’une oreille distraite… ». La haute juridiction parlait alors de « logorrhée législative et réglementaire… de raffinements byzantins… de droit mou… de droit à l’état gazeux ». Quelques 400.000 prescriptions techniques sont aujourd’hui applicables aux collectivités territoriales et les élus locaux, toutes tendances politiques confondues, crient à l’asphyxie. Et de votre côté, plutôt que de juguler les effets dévastateurs de cette dérive normative qui bat en brèche l’exercice de la démocratie locale, vous ajoutez vos propres prescriptions.

Votre rapport sur les contrats de filières dans les secteurs du bâtiment et des travaux publics répond également à cette logique. Certes, vous vous gaussez de la concertation exemplaire menée avec les fédérations du BTP, avec les organismes consulaires et avec les représentants des banques. Mais à vous lire de plus près, on apprend que cette noble démarche est strictement encadrée par des dispositifs de suivi et de contrôle au sein de « comités de pilotages transversaux » dirigés par la Région et par des indicateurs de réalisation et de résultat. En somme, c’est le régime de la liberté conditionnelle… Or, chacun sait bien que pour être efficients, les contrats de filière devraient être directement pilotés par les Chambres de Commerce et d’Industrie d’une part, par les Chambres de Métiers et de l’Artisanat d’autre part, sans qu’il soit besoin de les soumettre à d’inutiles contraintes. 

Telle est la réalité de votre politique.

Pour faire bon poids, vous ajoutez le recyclage des recettes du passé que vous habillez de formules nouvelles, car pour donner sa pleine mesure, votre stratégie a besoin de propagande.

Avec votre rapport intitulé « Donner aux Régions les moyens de préparer l’avenir » vous voudriez, contrairement à l’adage populaire, nous démontrer que l’histoire repasse les plats. Souvenez-vous : le 26 mai 2016, vous nous proposiez déjà un rapport sous le titre « Pour le rétablissement de l’autonomie fiscale des Régions », qui présentait les mêmes requêtes qu’aujourd’hui. Curieusement, vous oubliez d’y faire référence dans votre présent rapport. Ne serait-ce pas parce que notre Assemblée ne l’avait finalement pas voté ? Ayez donc l’honnêteté de nous dire que vous nous proposez une session de rattrapage !

Mais il y a plus grave sur le fond et là encore, votre mémoire, ainsi que celle de votre 1ère vice-présidente, est défaillante. Doit-on vous rappeler que vous avez soutenu sans sourciller, comme membre du gouvernement, toutes les lois fiscales et budgétaires dont vous dites aujourd’hui qu’elles ont provoqué une véritable hémorragie des concours financiers de l’Etat aux Régions ? Demander le rétablissement des ressources financières au niveau des dotations accordées par l’Etat en 2013 en même temps qu’une refonte de la fiscalité locale, relève de la duplicité.

Durant 5 ans, vous déteniez tous les leviers du pouvoir, aux plans national et local, non seulement pour mettre fin aux dérives des financements croisés et aux pratiques clientélistes, mais encore pour mettre en place des outils régionalisés favorisant les investissements des entreprises, seuls créateurs d’emplois. Qu’avez-vous donc fait ?

Au total, quelle trajectoire à moyen et long termes avez-vous tracée pour notre Région ? Aucune, sinon une tentative de ravalement des projets du passé, comme si vous vouliez vous exonérer des droits de succession sur les politiques engagées au cours de la dernière décennie. Ainsi, côté Languedoc-Roussillon, vous soldez le « frêchisme », comme avec votre Plan Littoral 21 dont les crédits sont absorbés, pour une très large part, par les ports de Sète et de Port-La Nouvelle, lancés il y a plusieurs années par votre prédécesseur.

Au total, vous exhumez et recyclez les projets du passé, au lieu de vous recentrer sur les interventions régionales et sur ses compétences historiques, seules à même de restaurer la crédibilité de notre institution. Ce sont les raisons pour lesquels, Madame la Présidente, nous ne pourrons malheureusement vous suivre dans la plupart de vos propositions.

Je vous remercie.

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