Réduction des émissions de gaz à effet de serre : le gouvernement forcé de se justifier

Le gouvernement doit justifier, dans un délai de trois mois, que son refus de prendre des mesures complémentaires est compatible avec le respect de la trajectoire de réduction d’émission de gaz à effet de serre choisie pour atteindre les objectifs fixés pour 2030.

Rappel

L’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 40 % entre 1990 et 2030 fixé à l’article L. 100-4 du Code de l’énergie (N° Lexbase : L5422LTY), qui mentionne désormais expressément la convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques ainsi que l’accord de Paris, a pour objet d’assurer, pour ce qui concerne la France, la mise en œuvre effective des principes posés par cette convention et cet accord.

A cet égard, afin d’atteindre effectivement cet objectif de réduction, les dispositions de l’article L. 222-1-A du Code de l’environnement (N° Lexbase : L3019KGW) confient à un décret le soin de fixer un plafond national des émissions de gaz à effet de serre pour la période 2015-2018 puis pour chaque période consécutive de cinq ans.

Dans ce cadre, l’article 2 du décret n° 2015-1491 du 18 novembre 2015, relatif aux budgets carbone nationaux et à la stratégie nationale bas-carbone (N° Lexbase : L0542K8L), a fixé pour la période 2015-2018, correspondant au premier budget carbone et à la seule période achevée au jour de la présente décision, une valeur limite de 442 millions de tonnes de CO2 par an.

Constat

Le décret n° 2020-457 du 21 avril 2020 (N° Lexbase : L7218LWA ) ayant reporté après 2020 et notamment après 2023 une partie de l’effort de réduction des émissions devant être réalisé, le Conseil d’État demande au gouvernement de justifier que son refus de prendre des mesures plus strictes est compatible avec le respect de l’objectif pour 2030.

Pour la période 2015-2018, le plafond d’émissions prévu a sensiblement été dépassé. La France a seulement réalisé une baisse moyenne de ses émissions de 1 % par an, alors que le plafond fixé imposait une réduction de l’ordre de 2,2 % par an. Par le décret du 21 avril 2020 précité, le gouvernement a modifié plusieurs plafonds d’émissions. Il revoit à la baisse l’objectif de réduction des émissions pour la période 2019-2023 et prévoit donc un décalage de la trajectoire de baisse pour atteindre l’objectif prévu pour 2030 : une partie des efforts initialement prévus est ainsi reportée après 2023, ce qui imposera alors de réaliser une réduction des émissions en suivant un rythme qui n’a jamais été atteint jusqu’ici.

Décision

Face à ces nouvelles données, le Conseil d’État estime qu’il ne dispose pas des éléments nécessaires pour juger si le refus de prendre des mesures supplémentaires est compatible avec le respect de la nouvelle trajectoire résultant du décret d’avril dernier pour parvenir à l’objectif de 2030. Le gouvernement devra donc lui fournir, dans un délai de trois mois, les justifications appropriées, et à la commune requérante ainsi qu’aux intervenantes tous les éléments complémentaires. S’il estime les justifications suffisantes, le Conseil d’État pourra alors annuler le refus de prendre des mesures supplémentaires permettant de respecter la trajectoire prévue pour atteindre l’objectif de baisse de 40 % d’émission de gaz à effet à horizon 2030*.

Yann LE FOLL

Réf. : CE 5° et 6° ch.-r., 19 novembre 2020, n° 427301, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A944734N).

* voir, sur le même sujet, La reconnaissance de la carence fautive de l’Etat en matière de lutte contre la pollution en Ile-de-France, TA Montreuil, 25 juin 2019, n° 1802202 N° Lexbase : A3655ZGH ; TA Paris, 4 juillet 2019, n° 1709333 N° Lexbase : A5750ZHG, n° 1810251 N° Lexbase : A5735ZHU, n° 1814405 N° Lexbase : A5738ZHY).

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