Sète, musée Paul-Valéry : quand la peinture inspire des poètes…

De tout temps, les artistes et les différents arts se sont mêlés. Nombreuses sont les amitiés entre artistes, quelle que soit leur discipline, qu’ils soient peintres, musiciens, écrivains ou poètes. Mais une fois les œuvres entrées dans un musée, à part les journalistes et les critiques d’art, il est rare que des auteurs et des poètes écrivent à leur propos. Maïthé Vallès-Bled, conservateur en chef du patrimoine, directrice du musée Paul-Valéry de Sète, a souhaité réactiver ce lien, en demandant à 250 poètes contemporains, français et étrangers, d’écrire sur 250 œuvres de la collection du musée. Une idée originale et belle, à savourer jusqu’au 4 novembre 2018…

C’est en réalisant un catalogue anthologique du fonds du musée Paul-Valéry et en sélectionnant parmi 8 000 œuvres que Maïthé Vallès-Bled en est venue à imaginer lier peinture et poésie. Le musée Paul-Valéry avait déjà une tradition poétique, puisqu’il tire son nom de la donation en 1948 de la veuve du poète Paul-Valéry, déposée dans une salle du musée. Et la brillante directrice du musée est par ailleurs l’organisatrice du festival poétique Voix Vives de Méditerranée en Méditerranée…

L’idée d’aller au-delà du catalogue a ensuite fait son chemin dans son esprit, et l’exposition a été mise sur pied. Il lui semblait en effet important que les Sétois et les autres visiteurs puissent voir des œuvres depuis longtemps gardées dans les réserves du musée.

Pour cette exposition-événement qui occupe les deux étages du musée, Maïthé Vallès-Bled a souhaité faire un focus sur les divers mouvements et périodes qui constituent la collection du musée Paul-Valéry, tout en montrant le dynamisme de la création artistique à Sète depuis la fin des années 1940.

En général, le regard porté sur les œuvres d’art est le fait de critiques et d’historiens d’art. Dans l’exposition Pleins feux sur les collections – Peinture et poésie – Les peintres vus par les poètes, ce sont à la fois le tableau et l’émotion suscitée par celui-ci qui priment…

Côté scénographie, chaque tableau est accompagné comme il se doit du cartel comportant notamment son titre et le nom de son auteur, la date de réalisation, etc… Mais aussi d’un poème ou d’un texte ! Le visiteur est invité à prendre le temps d’admirer l’œuvre, plonger dedans, puis à lire le poème qu’il a inspiré et s’en délecter… Les périodes ou mouvements sont symbolisés par des couleurs de murs différentes, pour que le public puisse s’orienter dans l’exposition et en comprendre le cheminement. Une vidéo résume le propos de la directrice du musée.

Visite

Le parcours débute par des tableaux des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles. Ceux-là mêmes qui n’ont pas été montrés depuis longtemps au public et dont certains ont dû être restaurés. Parmi ceux qui ont représenté Sète au XIXe, on apprend que la ville a été prisée à l’époque par les peintres pour la lumière vive du Midi et son littoral. Robert Mols, Julius Hintz par exemple. Non loin de là, Gustave Courbet réalise alors son Mer calme à Palavas (1857). Au début du XXe siècle, Albert Marquet signe Voiliers à Sète (1924).

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Albert Marquet, “Voiliers à Sète” (1924).

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Mais c’est le groupe Montpellier-Sète qui, le premier, dans les années 1950, associe Sète avec la peinture. De Montauban, le peintre François Desnoyer vient alors s’installer à Sète à l’invitation de Jean Vilar. Autour de lui se forme un groupe constitué de Gabriel Couderc – qui deviendra le conservateur du musée Paul-Valéry –, Georges Dezeuze, Jean-Raymond Bessil, Gérard Calvet, Camille Descossy, Pierre Fournel, André Blondel, Colette Richarme et Jean Hugo. La prééminence de la couleur est capitale chez eux, qu’ils captent l’âme de l’Ile Singulière ou soient plus intéressés par d’autres types de paysages ou par les personnages. La matière de leurs tableaux est souvent épaisse.

Dans les années 1960-70, la seconde vague de créateurs sétois est essentiellement constituée de Pierre François et François-René Gregogna. Autodidactes tous les deux, ils ont pour point commun de peindre sur toile et sur des objets de récupération : pavois de joutes, bois flottés… La palette de Pierre François est particulièrement vive et sa liberté formelle est grande. Il dit faire de la « figuration débridée ». Tous deux créent une imagerie nouvelle à partir de la culture populaire. Ils seront une source d’inspiration pour la génération suivante…

La Figuration libre naît à Sète au début des années 1980. Loin de tout art conceptuel alors en vogue, Robert Combas et Hervé Di Rosa pratiquent une figuration jouissive et exubérante, hyper colorée et saturée de références à la culture rock, BD, mythologique ou historique. Pour eux, la couleur est une fête…

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Robert Combas, “A quoi l’O ?”, 1992.

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Actuellement, « Sète continue d’être un foyer vivant de création », souligne Maïthé Vallès-Bled. La ville abrite une multiplicité d’artistes, regroupés sous le nom d’Ecole sétoise contemporaine bien que leurs pratiques soient très diverses et leurs cheminements différents. Topolino, André Cervera, Aldo Biascamano, Christophe Cosentino ont chacun côtoyé Pierre François et sont de proches amis de Combas et Di Rosa. Tous ont créé leur propre style…

Prendre le temps d’apprécier les œuvres et les textes…

L’exposition temporaire couvrant la totalité du musée – sauf la salle Paul-Valéry – il faudrait sans doute une demi-journée voire une journée pour admirer les tableaux et lire en les appréciant comme il se doit tous les poèmes. Chaque visiteur peut, à sa convenance, piocher ici ou là des lectures, ou passer la journée au musée pour profiter pleinement de chaque texte. Le catalogue permet de conserver une trace fidèle de la visite.

Une rencontre un poète / une œuvre ou un artiste / une œuvre est organisée chaque jour à 16h00. Le programme est téléchargeable en ligne sur le site http://museepaulvalery-sete.fr.

Cette exposition a le grand mérite de montrer au public certaines œuvres très peu vues (parfois restaurées pour l’occasion) et d’autres bien connues avec un regard neuf, dans une atmosphère encore embellie par la poésie. Le visiteur apprécie de découvrir les ascendances créatives sétoises. Ce qui permet de mieux comprendre les origines de la Figuration libre, par exemple, mais aussi de la création actuelle, pour les non-initiés…

Virginie MOREAU
vm.culture@gmail.com

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André Cervera, “Art Chine.com”, 2012.

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Informations pratiques

> Musée Paul Valéry – 148, rue François Desnoyer – 34200 Sète. Tel. : 04 99 04 76 16 – www.museepaulvalery-sete.fr

> L’exposition Peinture et poésie est visible jusqu’4 novembre 2018, tous les jours de 9h30 à 19h00.

> Tarifs pendant l’exposition temporaire : Entrée : 9,70 € – Visite commentée : 1 €. Jeunes (10-18 ans), étudiants : 5,10 €. Enfants – 10 ans, demandeurs d’emploi, scolaires de Sète : gratuit. Groupes plus de 10 personnes : 7,70 €.

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