AGDE - Quel peuple pour quel référendum ? Libre expression par Antoine ALLEMAND
Quel peuple pour quel référendum ? A l’issue d’un suspense insoutenable le président candidat…
Quel peuple pour quel référendum ?
A l’issue d’un suspense insoutenable le président candidat s’est enfin déclaré candidat président. Dès son premier meeting à Annecy, il a évoqué les lignes directrices de sa nouvelle campagne : il renvoie à leurs chères études tous les corps intermédiaires, syndicats, partis et associations confondus; il s’adressera désormais directement au Peuple, lui permettant, en dernier ressort, de décider des grandes questions de société par voie référendaire.
S’adresser directement au Peuple
S’il ne s’appelait pas Sarkozy, tout le monde aurait crié au populisme; mais voilà, comme il s’agit de Nicolas, cela ne peut que constituer une fulgurance de sa pensée avant-gardiste.
Mais c’est qui ou c’est quoi ce Peuple désormais tout puissant?
Tout d’abord, il faut éliminer les syndicalistes, les militants de partis politiques (fussent-ils UMP) ou les membres d’associations puisque le candidat entend s’adresser au Peuple par-dessus et contre tous ceux là.
Décemment on peut penser qu’il ne compte pas s’adresser à tous les karchèrisés de banlieues pas plus qu’aux pauvres c… qui refuseraient de lui serrer la main. Eliminons aussi les 55 % de la population qui n’a pas voulu du traité de Lisbonne relooké façon sarkocompatible.
Reste plus grand monde… Ah si !… Les invités du Fouquet’s.
Peut-être bien qu’on aura mal compris ou qu’on ne maîtrise pas bien la langue de Shakespeare : c’était certainement « people » qu’il voulait dire…
Un référendum contre le chômage
On croyait que le référendum était l’occasion d’un engagement solennel, à utiliser avec parcimonie et pour des sujets d’importance.
Certes, l’objet du premier référendum envisagé par le candidat président, le chômage, est tout ce qu’il y a de sérieux. Le but poursuivi par le gouvernement (car le candidat ne cesse de gouverner) est d’imposer à tout demandeur d’emploi d’accepter, quelles que soient les conditions, le travail qui lui serait proposé suite à une formation qui lui aura été elle-même imposée. Le refus d’une proposition d’emploi serait sanctionné par la suppression des allocations chômage.
La question à poser, formulée sans équivoque, aurait été, par exemple : « Un demandeur d’emploi doit-il continuer à percevoir des indemnités s’il refuse les propositions qui lui sont faites ? ». La proposition, brutale, aurait le mérite d’être claire… Mais le risque est qu’elle n’entraîne pas la réponse attendue.
Gros malin, l’encore président envisage de poser la question ainsi : « Etes-vous favorable au transfert du budget de la formation professionnelle vers un budget de formation des demandeurs d’emploi ? ». Quelle que soit la réponse, elle ne remettrait pas en cause la volonté gouvernementale de donner un coup de ciseau aux prestations chômage; mais le fait d’avoir participé au sondage grandeur nature équivaudrait à donner un aval à la volonté politique sous-jacente.
Revenons cependant sur la question telle qu’il la formule : c’est un monument de bêtise.
La formation professionnelle, c’est avant tout la formation continue qui permet aux salariés de réactualiser leurs connaissances de façon à rester performants dans leur métier. C’est en second lieu, la formation par l’apprentissage qui permet aux jeunes d’accéder à leur premier emploi et/ou d’obtenir une qualification professionnelle. C’est enfin, l’aide à la réinsertion des salariés ayant perdu leur emploi.
Basculer partiellement ou totalement le budget de la formation professionnelle sur la seule catégorie des chômeurs (Fillon parle d’un transfert de 30 milliards… une paille) serait handicaper profondément les capacités de production des entreprises en diminuant les compétences de leurs salariés sans résoudre pour autant le problème du chômage : Il y a actuellement 200 000 emplois non pourvus pour 2,9 millions de chômeurs. Vous pouvez former 200 000 personnes et leur imposer de se mettre au travail quelles que soient les conditions, il restera toujours 2 700 000 « réfractaires » (parce que selon la philosophie ultralibérale, un chômeur est un fainéant qui s’ignore)… Reste plus que le STO.
Bref, le roi de l’enfumage new look n’a rien à envier à son avatar de 2007 : Lorsqu’il fait appel au Peuple, c’est pour se f… de sa gueule.
Antoine Allemand