Brigitte Vidard : départ en retraite de la présidente du tribunal administratif de Montpellier
A 66 ans, Mme Brigitte Vidard, présidente du tribunal administratif de Montpellier, a souhaité faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er avril 2021.
Une belle carrière
Brigitte Vidard est née et a passé son enfance à Lyon, dans le quartier de la Croix Rousse. Issue de l’ENA, elle a débuté sa carrière en 1982 à la direction générale de l’administration et de la fonction publique, puis, de 1986 à 1988, l’a poursuivie à la direction du développement local de la Caisse des dépôts et consignations, à Paris.
Elle a intégré la juridiction administrative en 1989 comme conseiller au tribunal administratif de Bordeaux. Affectée au tribunal administratif de Montpellier en 1994, elle a accédé au grade de président en septembre 2000. Elle a été vice-présidente du tribunal administratif de Toulouse, de 2000 à 2002, puis vice-présidente du tribunal administratif de Montpellier, de 2003 à août 2008. De septembre 2008 à août 2011, elle était présidente de section au tribunal administratif de Paris. De septembre 2011 à août 2013, elle a présidé le tribunal administratif de Nîmes. De septembre 2013 à novembre 2016, elle a présidé le tribunal administratif de Grenoble, avant de revenir à la présidence du tribunal administratif de Montpellier en décembre 2016. Sa prise de retraite vient couronner une belle carrière. Brigitte Vidard est Chevalier de la Légion d’honneur et Chevalier dans l’Ordre national du Mérite.
Des réalisations remarquées au tribunal administratif de Montpellier
“Le tribunal administratif de Montpellier était à l’équilibre depuis bien longtemps quand je suis arrivée”, se souvient Brigitte Vidard, qui ajoute, modeste : “De ma présidence, on pourra retenir deux choses : le développement de la médiation et les Rencontres du droit”.
Des rencontres du droit constructives
La première Rencontre du droit organisée par le tribunal administratif de Montpellier en 2017 avait pour thème « La médiation en droit public, dans l’intérêt des justiciables et de la justice ». Cette première à Montpellier était organisée par sa présidente Brigitte Vidard, qui avait expérimenté la formule lors de ses précédentes présidences aux tribunaux administratifs de Nîmes, puis Grenoble. Elle avait réuni quelque 270 professionnels à la faculté de droit. Le 16 janvier 2019, c’était sur le thème « Droit, justice et numérique » que le tribunal administratif avait convié les acteurs de la justice, remportant une fois encore un franc succès.
La médiation
Concernant la médiation, on se souvient que, le 29 janvier 2018, une convention relative à la médiation avait été signée avec des représentants de l’Etat et des collectivités territoriales, les barreaux, des centres de médiation et des organismes de formation, sous la supervision du vice-président du Conseil d’Etat. Réunissant d’abord 22 partenaires en janvier, puis 7 autres en septembre 2018.
En 2021, cette convention triennale venait à expiration, mais un forum de la médiation s’est tenu le 29 janvier pour la renouveler. “On a constaté l’adhésion d’un plus grand nombre de collectivités, comme Perpignan, Carcassonne…”, souligne la présidente du tribunal administratif. La nouvelle convention est en cours de signature avec 35 interlocuteurs locaux (préfet, Département…). Par ailleurs, ce mardi 30 mars 2021, le directeur de la CAF de l’Hérault signera une convention d’expérimentation de la médiation dans les contentieux sociaux, avec le tribunal.
“Je souhaite que la médiation s’ancre dans nos relations avec les justiciables, les avocats et les administrations”, a insisté Brigitte Vidard, qui ajoute : “Tout le monde peut gagner à la médiation et au rétablissement du dialogue entre le justiciable et le responsable d’une administration.“
Dépasser les conflits par le dialogue est d’une grande importance. Depuis fin 2017, plus de 260 médiations ont été enregistrées pour 6.000 à 7.000 entrées par an. La médiation vise à “répondre à la demande de justice en termes de qualité, sans enjeu quantitatif ; à faire face à la hausse de la demande de justice”. L’objectif est d’ouvrir 1% de médiations sur le flux total.
Brigitte Vidard cite un exemple de médiation concernant le fameux chêne de Castelnau-le-Lez : “nous sommes intervenus dans la médiation, mais ça n’a pas fonctionné. Mais nous pourrions être de nouveau saisis par une demande de médiation”. Des dissensions entre des communautés de communes et des communes ont également pu être réglées par la médiation, aboutissant à un consensus. La présidente a également relevé “des résultats spectaculaires en termes de marchés publics, notamment dans un dossier inextricable d’une dizaine d’années où la médiation a fonctionné”. Il y en a deux dans l’Hérault actuellement, avec une cinquantaine d’entreprises en défense et des partenaires espagnols, portugais…
“En matière de médiation, nous avons une obligation de moyens mais pas de résultat”, a rappelé Brigitte Vidard, pour qui la médiation est une “offre alternative, parfois plus satisfaisante qu’un jugement de tribunal, car en général, après un jugement, il y a un gagnant et un perdant. Alors que la médiation aboutit souvent à la paix et au consensus.” Notamment lorsqu’il y a des enjeux humains derrière (permis de construire, litige entre voisins)… Ce fut le cas pour une opération de plus de 230 logements, dans laquelle le voisinage a réagi pour la sauvegarde d’arbres. Le positionnement des logements a été revu, un effort a été fait concernant la végétation, ce qui a conduit à l’acceptation par le voisinage
Au tribunal administratif de Montpellier, la pratique de la médiation s’est développée et de nombreuses initiatives ont été prises dans le ressort pour mieux l’intégrer dans le processus de règlement des litiges. Un récapitulatif diffusé par le tribunal administratif dresse le constat suivant : “Alors que l’année 2019 avait permis d’enregistrer 66 nouvelles médiations et de terminer 79 médiations avec un taux d’accord de 34%, l’activité de médiation a été significativement perturbée par le double contexte de la grève des avocats et de la crise sanitaire. Néanmoins, une forte reprise des propositions de médiation à partir de la rentrée de septembre a permis d’enregistrer 51 médiations à l’initiative du juge en fin d’année 2020, et déjà près d’une trentaine en 2021. Il convient, en outre, de noter que le repérage des dossiers propices à une procédure de médiation gagne en performance avec un taux d’accord de 60% pour 65 médiations terminées en 2020. L’année 2020 s’est achevée sur des perspectives positives, avec une mobilisation accrue des acteurs internes, aussi bien par les référents de chaque chambre que par le nouveau binôme des référents du tribunal. Cette dynamique retrouvée s’est concrétisée par l’organisation du forum de la médiation qui s’est tenu en janvier 2021, avec l’élaboration d’une nouvelle convention triennale signée par plus de 35 partenaires institutionnels”.
Le mot de départ de Brigitte Vidard
Au moment d’évoquer son départ à la rentraite, Brigitte Vidard, visiblement émue, a indiqué : “Cela a été un honneur pour moi de présider ce tribunal pendant quatre ans. Je rends hommage à chacun des membres de cette équipe et les remercie pour la qualité du service rendu au public. Je regrette que la pandémie m’empêche de remercier tous les interlocuteurs que j’ai été amenée à rencontrer durant ma présidence : membres du barreau, collectivités publiques, experts, commissaires enquêteurs, universités… Autre regret : la période marquée par le Covid ne nous a pas permis de mener à bien certains projets.
Durant ma présidence, j’ai été attachée à poursuivre la tradition de courtoisie. C’est un gros avantage dans nos relations et cela cimente la qualité du service rendu aux justiciables. Notre objectif commun est de prendre en considération les besoins du justiciable et de répondre au mieux à la demande de justice. Nous avons eu un dialogue riche et constructif, seulement entaché par la grève des avocats.
Je rends hommage au greffier en chef, Philippe Lalloué, aux présidents de chambre, à l’équipe de magistrats et d’agents… Ils ont montré cette capacité de résilience au choc de la pandémie ; ils ont résisté et réagi face aux difficultés.”
Un président par intérim avant la prise de fonctions d’un successeur
Le successeur de Mme Vidard, Denis Besle, actuel président du tribunal administratif de Grenoble, prendra ses fonctions dans un mois, après une période d’intérim. Mettant ainsi fin à une longue période de présidences féminines, puisque pas moins que 4 présidentes du tribunal administratif de Montpellier se sont succédé ces dernières années.