Société — Département Hérault

Hérault : des polluants éternels dans l’eau ?

La dernière enquête de l’association Générations Futures a permis d'identifier une nouvelle forme de pollution parmi les pesticides : les polluants éternels, qui ont des effets délétères sur la santé. Marie Azorin, responsable du relais de l’association dans l’Hérault, est revenue sur leur présence dans le département.

Générations Futures est une association reconnue d’intérêt public et agréée par le ministère de l’environnement et de la transition écologique depuis 2008. Elle s’appuie sur un comité scientifique composé d’experts bénévoles. Au moyen d’enquêtes et d’actions en justice, elle veut sensibiliser le public et faire réagir les gouvernements face aux différents risques de pollution. 

Polluants éternels, PFAS, qui sont-ils ?

Les PFAS sont aussi connus sous le nom de polluants éternels ou de substances perfluorées. Un groupe qui réunit plus de 10 000 produits chimiques selon l’OCDE. Particulièrement persistants, en particulier dans l’eau, les PFAS sont utilisés pour l’agriculture intensive et l’industrie. Une caractéristique qui en fait un pesticide aussi efficace que dangereux.

Au-delà de l’impact sur la faune et la flore, les risques pour la santé humaine sont en effet multiples : perturbations endocriniennes, risques de cancers, infertilité, problèmes de développement chez l’enfant, atteinte du système immunitaire et du foie… En France, cette utilisation pesticide des PFAS représente 13 % du total des substances  pesticides utilisées, révèle Générations Futures dans son enquête.

Occitanie : une présence dans 63 % des échantillons testés

D’un point de vue local, la région n’est pas non plus épargnée. En Occitanie, sur 16 PFAS recherchés par l’association dans une précédente enquête, leur présence était notable dans 63 % des échantillons testés. Concrètement, “cela met en cause la qualité des eaux en particulier des eaux dures, des nappes phréatiques, car ce sont des molécules très résistantes”, apprend Marie Azorin, responsable de l’antenne de l’Hérault de Générations Futures.

La militante rapporte ainsi des précédents de pollution dans le golfe du Montagnac . Au sein de Montpellier et son agglomération, alimentés par le Lez, pas de contamination à signaler comme le rappelait René Revol, président de la régie des eaux dans nos pages. Cependant, cette problématique globale trouve sa source dans des réseaux très localisés, ce qui complexifie sa prise en charge locale. “Le fait qu’il n’y ait pas de problème sur cette zone ne signifie pas qu’il n’y en a pas ailleurs dans l’Hérault. Chaque commune peut avoir un, deux voire trois captages. On nous a donné l’exemple d’un village qui avait un captage par habitant, dans un village de 10 habitants. Dans les forages qui sont faits et où l’on pompe l’eau, l’ARS fait des contrôles sanitaires et vérifie de temps en temps l’état de pollution”, explique la responsable d’antenne.

Agriculture intensive et industrie : une double responsabilité

Dans l’Hérault, région peu industrialisée, c’est surtout l’agriculture intensive qui est en cause. Une observation qu’a faite Marie Azorin plus largement, concernant l’usage de pesticides. “Nous (ndlr : Générations Futures) avons constaté qu’ils étaient utilisés au travers de la pulvérisation d’herbicides, des  fongicides l’été et des pesticides l’hiver, au niveau de l’agriculture viticole ou arboricole”.Une première solution réside dans un changement de modèle agricole : “on ne favorise pas suffisamment l’agriculture biologique et écologique et l’agroécologie”, considère la responsable. 

Un lobbying à deux vitesses, alors qu’à l’échelle nationale, les ventes de pesticides PFAS ont triplé depuis 2008, atteignant 2332 tonnes en 2021. Deux herbicides en particulier posent problème, représentant plus de la moitié des ventes : le flufenacet et le diflufenican. Le premier met 54 ans à se décomposer complètement et l’enquête de Générations Futures relève des taux de présence  en eaux souterraine parfois supérieurs aux normes en vigueur. Comme il s’agit en fait d’un produit issu d’une dégradation (métabolite), le règlement européen sur les pesticides ne l’encadre pas.

Une utilisation qui est avant tout l’apanage des grands groupes. A l’origine de ces deux demandes d’approbations et dans le top 10 des fabricants : Bayer, au travers sa filiale agricole Crop Science. Un groupe allemand, à l’origine du rachat de Monsanto en 2018.

Les perfluorés ? RAS pour les ARS

Pour Marie Azorin, une anticipation de la problématique des PFAS est nécessaire, alors qu’une réglementation européenne fixant ses seuils entrera en vigueur en 2026 seulement. De quoi dérouter les pouvoirs publics, notamment la direction générale de la santé et leurs délégataires, les ARS, qui ont le soin de prendre la mesure de ces PFAS, de manière volontaire pour l’instant. “Jusqu’à présent, on ignorait ces polluants éternels, on ne les recherchait pas dans l’eau […] on recherche les nitrates, les pesticides, mais les PFAS sont encore ignorés “, spécifie la responsable.

Quant à savoir si une eau est polluée en PFAS, difficile pour l’heure de le déterminer précisément. “On pourra faire un état des lieux réaliste une fois qu’on aura instauré des contrôle sanitaires, avec les outils qui vont avec. Vous imaginez, des perfluorés il y en a plus de 4000, et c’est seulement les perfluorés.”, conclut Marie Azorin.

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Commentaires

  1. Il semble que la prise de conscience de la pollution des eaux se soit accélère après les inondations de septembre ou de nombreuses petites villes et villages ont découvert que leur eau était pollué. Par des bactéries seulement ?? Voir St André de Sangonis et la présence de manganèse.

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