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HERAULT - Discours de Pierre Pouëssel, Préfet de l'Hérault, à l'occasion de son départ

DISCOURS D’ADIEUX AUX ÉLUS ET FORCES VIVES DE L'HÉRAULT Je suis arrivé à Montpellier le 31…

DISCOURS D’ADIEUX AUX ÉLUS 

ET FORCES VIVES DE L'HÉRAULT

 

Je suis arrivé à Montpellier le 31 décembre 2015 par « un soir de demi-brume ». J’en partirai le 6 août prochain au matin dans la chaleur estivale. Au moment de tourner la page et de laisser à mon successeur Jacques WITKOWSKI le soin d’en écrire une nouvelle, à partir du 26 août prochain, je dois vous confesser que j’éprouve des sentiments mélangés de fierté et de tristesse.

Fierté d’avoir été nommé par le Président de la République en conseil des ministres le 17 juillet dernier Préfet de la Région Centre-Val de Loire, Préfet du Loiret. C’est un nouveau défi qu’il me faut relever. Une nouvelle étape – et sans doute la dernière – de mon tour de France préfectoral entamé à Nîmes en 1982 comme directeur de cabinet du préfet du Gard.

J’éprouve aussi de la tristesse « sous le soleil noir de la mélancolie » – car j’aime ce département. J’aime sa géographie contrastée avec son littoral parsemé de vastes étangs et de lidos, avec ses hauts cantons qui courent, à l’ouest vers les contreforts de la montagne noire – aux limites du Tarn – et vers les causses aveyronnaises, à l’est du Pic Saint Loup – la montagne magique des montpelliérains – aux Cévennes gardoises en passant par une succession de collines où prospère la garrigue et qui s’ouvre sur la plaine recouverte de son manteau de vignes sur lequel veillent de loin en loin des bouquets de pins parasols et de platanes. J’aime ses fleuves et ses rivières : l’Hérault qui vient terminer sa course à Agde avant de mêler ses eaux à celles de la Méditerranée, l’Orb qui s’écoule au pied du promontoire d’où domine la cathédrale de Béziers, j’aime ses villes, celles que je viens de citer et toutes les autres avec une tendresse particulière pour le port et la ville de Sète sa plage de la corniche, si chère à Brassens, son cimetière marin, sa Pointe courte et l’étang de Thau.

Last but not least, j’aime, par-dessus tout Montpellier ville d’art et d’histoire qui garde la mémoire des rois d’Aragon et de Majorque. J’aime Montpellier qui cultive l’intelligence depuis des siècles avec son université de droit et son université de médecine emblématique de la diversité des influences, juive avec Maïmonide, gréco-arabe avec Averroes et Avicenne, italienne avec Placentin qui en marquèrent les origines au XIII siècle.

J’aime Montpellier la savante, l’innovante et l’entreprenante avec son label French Tech, son BIC et son université d’excellence MUSE. J’aime Montpellier la décoiffante avec ses 70 000 étudiants. J’aime Montpellier l’artiste avec ses phares culturels : le MOCO que nous venons d’inaugurer, l’exceptionnel Musée Fabre qui doit tant à son conservateur général – l’Opéra Orchestre National de Montpellier, le merveilleux domaine d’O avec son printemps des comédiens , Montpellier Danse, la ZAT, Arabesques et tant d’autres évènements culturels et artistiques qui ponctuent la vie montpelliéraine.

Enfin, j’aime Montpellier et tous ses quartiers dans leur diversité avec une dilection particulière pour l’Ecusson et une affection pour la Mosson et ses habitants.

Je m’arrête là – Vous l’avez compris pour moi quitter Montpellier, quitter l’Hérault sera un arrachement.

Avant de vous dire « au revoir » je voudrais vous adresser deux messages en forme d’impératifs catégoriques : Ayez confiance et Unissez-vous.

Ayez confiance ! J’ai pris mes fonctions de Préfet de l’Hérault au moment où s’est mise en œuvre la fusion des deux régions Languedoc Roussillon et Midi-Pyrénées. J’ai immédiatement compris que vous aviez perçu la perte du statut de capitale régionale et de département Chef-lieu de région comme une « capitis diminutio » et qu’il fallait contrebattre ce sentiment car vous aviez les moyens de rebondir en concourant au développement du territoire héraultais et à la structuration de l’Est de l’Occitanie.

  • La situation économique et sociale héraultaise se signale par un paradoxe : le département est un de ceux en France qui connaît le plus grand nombre de création d’emplois (entre 5000 à 7000 par an au cours des 3 dernières années) mais c’est aussi un de ceux qui enregistre le plus fort taux de chômage (14,5 % en 2016 – 12,5 % aujourd’hui) et le plus fort taux de pauvreté (19,6%). Ce paradoxe s’explique assez largement par la forte pression démographique qui accroit le déséquilibre entre population active et emploi. Ce paradoxe pourrait être atténué grâce à une accélération de création d’emplois qui se confirme depuis le début de l’année mais aussi grâce à la mise en œuvre du « Plan d’Investissement dans les Compétences » visant à former les chômeurs les plus éloignés de l’emploi et à la relance de l’apprentissage telle que prévue par la loi de Septembre 2018 relative à la liberté de choisir son avenir professionnel.

Même s’il est dépourvu d’un tissu industriel – à l’exception de la région biterroise qui dispose d’entreprises dynamiques dans le secteur de la mécanique – le département de l’Hérault a de véritables atouts pour son développement.

a)    Le tourisme y est robuste avec des perspectives intéressantes pour en améliorer la qualité comme l’oenotourisme dont Kléber Mesquida a eu l’intelligence de se faire le chantre.

b)    La viticulture (80 % du CA de l’agriculture héraultaise) a réussi sa révolution qualitative et a désormais un rayonnement national et international.

c)     Le BTP qui avait connu une grave crise de 2009 à 2015 poursuit son redressement et crée des emplois (1750 entre 2017 et 2018)

d)    Sur la métropole de Montpellier 2 grands pôles d’excellence, la santé d’une part l’agronomie et l’environnement d’autre part irrigués par une économie numérique en plein essor. Ils constituent deux grands piliers de l’économie du futur fondée sur l’innovation.

C’est dans cette perspective qu’a été conclu le 5 janvier 2017 le pacte métropolitain d’innovation Capital Santé entre l’État et la métropole visant à soutenir des investissements (6 au total) particulièrement emblématiques de l’excellence montpelliéraine dans le domaine de la santé. L’État a apporté 8,2 millions d’euros, la Métropole : 3,6 et le Conseil Régional ainsi que le Conseil départemental ont contribué au financement du plus important de ces investissements l’IRM Radiothérapie maintenant installé à l’ICM. Elaboré dans des délais record, grâce à une mobilisation exceptionnelle de l’État, des services de la métropole et des partenaires de la santé ce pacte a été mis en œuvre très rapidement. 3 des 6 investissements majeurs ont d’ores et déjà été réalisés.

C’est dans cette même perspective de développement de l’économie du futur, et en partant de l’expérience du mas numérique de Villeneuve les Maguelone, que M. Augier Directeur Régional de l’Agriculture d’Occitanie, Mme Bellon Maurel de l’IRSTA et Anne Lucie Wack, directrice générale de Sup Agro ont eu l’idée, que j’ai ardemment soutenue dès l’origine, du projet Occitanum, un living lab qui met le numérique au service de l’innovation collective dans les territoires agricoles de la région.

e) enfin dernier atout et non des moindres, les quartiers populaires dits dans le jargon technocratique : quartiers politique de la ville. 22 dans le département, 12 à Montpellier. Nous connaissons les difficultés auxquelles se heurtent les habitants de ces quartiers : le chômage, la pauvreté, parfois le sentiment de relégation. État et collectivités territoriales, nous nous efforçons d’y remédier avec les 7 contrats de ville, et les 7 opérations de rénovation urbaine dont le grand projet de rénovation de la Mosson qui verra l’implantation au cœur du quartier d’activités économiques, pourvoyeuses d’emplois.

Au-delà de la mise en œuvre de ces politiques publiques indispensables il faut le dire et le redire nos quartiers ont des talents qu’il faut aider à faire éclore, nos quartiers ont une jeunesse ardente à laquelle il faut ouvrir des perspectives d’intégration sociale par le travail, nos quartiers ont des femmes et des hommes  qui s’engagent dans la vie associative et qu’il faut soutenir. Je voudrais saluer celles et ceux qui me font l’amitié d’être ici ce soir et saluer une nouvelle fois mes 6 délégués dans les quartiers de Montpellier, de Lunel, de Sète, d’Agde et de Béziers, Souad, Alain, Isabelle, Hervé, Laurence et Pascale qui y font un formidable travail pour toujours plus de cohésion sociale.

Ce département a des atouts, il a aussi vocation à structurer l’Occitanie orientale à travers un réseau des villes languedociennes dont Montpellier a naturellement vocation à être le pivot. Je sais que la métropole y réfléchit et a déjà conclu des contrats dits de réciprocité avec des communautés de commune de l’arrière pays. Il faut aller plus loin en jouant sur les complémentarités entre Alès et Nîmes à l’est de Montpellier et à l’ouest Sète, Béziers, Narbonne. Si ce réseau de villes en forme de grappe de raisin voyait le jour – en tout ou partie – c’est l’équilibre de la région qui en sortirait renforcé.

Alors oui, ayez confiance mais en même temps « unissez-vous »

Je sais qu’il y a des discordes politiques, elles sont légitimes. Je sais qu’il y a le choc de personnalités bien affirmées, elles sont naturelles. Je sais qu’il y a une propension locale aux joutes verbales, c’est dans l’ADN méditerranéen. Mais quand l’essentiel est en cause, c’est à dire le développement de la métropole et du département de l’Hérault il faut savoir oublier les querelles, finalement subalternes, pour faire converger les efforts de grandes collectivités au premier rang desquelles figure la Région au service des grands projets structurants.

Neutre et impartial l’État est dans son rôle lorsqu’il intervient comme médiateur. C’est ce que je me suis efforcé de faire avec des fortunes diverses.

Je suis toutefois très heureux d’avoir réussi deux actions de médiation sur des dossiers majeurs avec le concours précieux et efficace de mes deux secrétaires généraux successifs Olivier Jacob et Pascal Otheguy.

La première connut son épilogue, après 5 mois de discussions – le 3 juin 2016 ici dans cette salle où j’ai accueilli Philippe Saurel et Carole Delga qui, à mes côtés et à ceux du préfet de Région, ont signé le volet métropolitain du Contrat de plan Etat-Région.

La deuxième médiation connut son aboutissement en forme d’apothéose le 22 décembre 2016 lorsque Kléber Mesquida et Philippe Saurel firent ratifier, en ma présence, devant leur assemblée respective la convention de transfert du département à la métropole, des compétences FSL, FAJ, Culture ainsi que la compétence voirie.

Ce fut une journée inoubliable, un moment de grâce à la veille de Noël et à quelques jours du délai qui nous était fixé par la loi Notre et qui expirait le 31 décembre 2016. Je voudrais une fois encore remercier les artisans techniques de cet accord Pascal Otheguy, Christian Fina et Daniel Villessot avec le concours très précieux et bienveillant du Président de la CRC. Je voudrais bien sûr remercier Philippe Saurel et Kléber Mesquida pour la confiance qu’ils m’ont témoigné à cette occasion, confiance qui ne s’est jamais démentie d’ailleurs en 3 ans et demi et dont je leur sais gré.

En terminant je voudrais remercier devant vous et chaleureusement l’équipe de l’État dans le département. 
J’adresse d’abord un bravo amical à ma « dream team » préfectorale – je sais ce que je lui dois. J’ai eu l’occasion ce matin de remercier les fonctionnaires de la préfecture et des sous-préfectures pour leur soutien sans faille.

Je veux enfin saluer les chefs de service de l’État dans le département et leurs collaborateurs. Mille mercis à Mathieu Gregory notre DDTM à son adjoint Xavier Eudes, à M. Bol et Mme Barthélemy ainsi qu’au DML Cédric Indjirdjian.

Mille mercis à Didier Carponcin DDCS à son adjointe Mme Mathey et à tous les fonctionnaires de ce service qui joue un rôle essentiel pour la cohésion sociale.

Mille mercis à Mme MEDOUS DDPP et son adjoint M. HIRSCHY pour leurs précieux concours technique.

Mille mercis à M. Liger patron de l’unité départementale de la DIRECCTE à partager avec M. Sampietro et Eve Deloffre et tous les fonctionnaires de la Direccte.

Mille mercis à M. Labelle responsable de l’UD DREAL  pour ses conseils toujours avisés dans les dossiers environnementaux toujours compliqués.

Mille mercis à Isabelle Redini qui était jusqu’à ces derniers jours déléguée départementale de l’ARS.

Mille mercis à Christophe Mauny DASEN qui agit sous l’autorité de Béatrice Gille, très grande rectrice d’une très grande Région.

Grand merci aussi à Mme Desachy remarquable directrice des archives départementales qui a la chance de travailler dans un des plus beaux bâtiments de Montpellier, Pierre Vives fruit du génie de Zaha Hadid.

Merci aussi à Mme Loubens, responsable de l’unité départementale de l’architecture et du patrimoine de l’Hérault.

Enfin je termine par le chef de service départemental par lequel j’aurais dû commencer si j’avais suivi l’ordre protocolaire mais je m’en suis affranchi – je veux remercier chaleureusement notre DDFIP Samuel Barreault qui est non seulement très compétent et expérimenté mais aussi et surtout un homme d’écoute et de dialogue avec les élus et les forces vives de ce département en particulier les viticulteurs trop souvent frappés par les aléas climatiques. J’associe à ces remerciements son adjoint M. Citron.

Enfin je renouvelle mes remerciements à l’ensemble des forces qui concourent à la sécurité intérieure et qui ont toujours su faire preuve eux aussi d’esprit d’équipe dans une période particulièrement troublée.

C’est grâce à cet esprit d’équipe qui nous anime, c’est grâce à notre travail collectif que nous pouvons être efficaces au service de l’intérêt général en ayant toujours le souci du dialogue et de la concertation avec vous, les élus de ce département ainsi qu’avec vous, les forces vives de ce territoire héraultais.

Au moment de vous dire « Au Revoir » je suis submergé par l’émotion. 

Je ferme les yeux et je vois un océan de vignes à deux pas des flots bleus étincelants sous le soleil de la Méditerranée, je vois des vignerons à la tâche et je pense à leurs aïeux, à ceux de 1907, à Marcelin Albert, aux braves soldats, aux braves pioupious du 17ème de ligne qui refusèrent de tirer sur leurs frères et dont la chanson de Montéhus nous dit « ils auraient en tirant sur nous assassiné la République »

Oui décidément j’aime l’Hérault.

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