Innovation

L’innovation pour toutes les entreprises héraultaises

La 6e Nuit des Entrepreneurs du Medef Hérault Montpellier a mis en avant l’innovation, soulignant qu’elle concerne toutes les entreprises et peut prendre de multiples facettes, du technologique au social en passant par le commercial, le managérial… Au-delà de son aspect purement concret, elle suppose une attitude d’ouverture de la part du chef d’entreprise et de ses équipes. Objectif : être toujours prêt à innover afin de faire face aux changements… ou de les anticiper.

S’adressant aux plusieurs centaines de chefs d’entreprise venus assister le 15 mars dernier à Montpellier à la 6e Nuit des Entrepreneurs, Samuel Hervé, président du Medef Hérault Montpellier (lire aussi l’article HJE : S. Hervé : un an et une nuit au service des entrepreneurs), explique : « Cette soirée, nous l’avons conçue pour qu’elle soit la vôtre, et pour qu’elle soit riche en échanges, en contacts, en informations, en convivialité. La vitalité du territoire, c’est pour beaucoup les entrepreneurs. Vous méritez qu’on parle de vous ». Il salue la présence de Marc Aufort, président du Medef Béziers Littoral Ouest Hérault, et d’André Deljarry, président de la CCI de l’Hérault, et souligne que cette 6e Nuit des Entrepreneurs est vouée à « L’innovation pour toutes les entreprises héraultaises ».

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Samuel Hervé, président du Medef Hérault Montpellier. © HJE 2018, Y. Topol.

Des enjeux décisifs pour l’entreprise

Samuel Hervé définit clairement les enjeux : « Véritable opportunité dans un monde qui bouge, l’innovation est à la fois source de différenciation vis-à-vis des concurrents, facteur d’attractivité pour les talents, moteur du changement des pratiques managériales, et surtout levier d’efficacité économique. Nous devons, tous ensemble, nous emparer de l’innovation ». Et pour passer de l’idée d’innovation à sa concrétisation, il faut faire preuve de beaucoup de créativité, d’agilité et de réactivité. « L’opportunisme peut aussi parfois se révéler bénéfique ; celui que procure notamment la sérendipité, ce concept défini comme un concours de circonstances fortuit ayant permis de faire une découverte scientifique ou une invention technique de manière imprévue (pénicilline, micro-ondes, Viagra®…). Pour favoriser l’innovation, il faut potentialiser la sérendipité » ajoute Samuel Hervé.

 

Un esprit d’ouverture et d’initiative

Des différentes interventions de la soirée, il ressort que l’innovation, loin d’être purement technologique, concerne les diverses facettes de la vie de l’entreprise : le commercial, l’organisation, la gestion des relations humaines, le dialogue social…. Elle exige du chef d’entreprise un esprit d’ouverture et une capacité d’initiative. Exemple de cette attitude positive, Frédéric Salles, président de la société Matooma, élu Meilleur Entrepreneur de l’Année 2017. En créant sa start-up il y a 5 ans, il n’a pas hésité à s’attaquer à des marchés dominés par les grands opérateurs de télécommunications que sont Orange, Bouygues, SFR…

Frédéric Salles explique : « Nous avons eu l’idée de créer des cartes SIM implantables dans les objets connectés (horodateurs, autobus, tramways…) et capables de capter tous les réseaux. Il nous a fallu d’abord comprendre comment, en innovant, on pouvait répondre à des besoins jusque-là non satisfaits dans notre environnement, et ensuite fournir beaucoup de travail et mobiliser toute notre énergie ». Au fil des ans, 45 emplois ont été créés, et aujourd’hui, Matooma distribue ses produits dans 18 pays.

L’innovation au service des usages

Arnaud Grof, président de la Fabrique à Innovations, directeur général d’Inovatech et professeur en management technologique à la Toulouse Business School (TBS), met lui aussi en avant la prise en compte des besoins non satisfaits dans la société pour innover. La start-up qu’il préside, appelée La Fabrique à Innovations, a fait de ce credo sa raison d’être. Arnaud Grof précise : « Nous représentons aujourd’hui une communauté de 6.000 utilisateurs qui conçoivent collectivement des produits, puis ces projets d’innovation sont vendus clés en main aux entreprises. Celles-ci achètent ainsi des projets en quelque sorte conçus par le marché ».

Le succès est au rendez-vous, et la société procède à une levée de fonds pour accélérer son activité. Les PME sont bien souvent mieux armées pour faire réussir ce genre de projet fondé sur le besoin exprimé dans la société. « Elles jouent alors le rôle d’engrenage entre le marché, les usages et l’activité de production », résume André Grof. Dans le même temps, on constate que 90 % des créations de produits par les grands groupes sont vouées à l’échec.

L’innovation et « les intérêts collatéraux »

Inversant la notion de « dommages collatéraux » liés à la guerre, André Grof insiste sur les « intérêts collatéraux » de l’innovation. Celle-ci entraîne l’accroissement de la motivation des salariés et leur engagement dans l’entreprise, les conduit à développer leurs compétences et renforce l’esprit d’équipe. Pour lui, l’innovation assure à l’entreprise sa capacité de s’adapter : « Elle est la condition de survie, et le chef d’entreprise a pour rôle de mobiliser ses équipes, de faire du training en permanence et de mettre en place l’organisation nécessaire afin de permettre à l’entreprise de se transformer afin de faire face aux changements ». Dans cet esprit, bien observer, développer la capacité d’écoute et créer du lien avec l’utilisateur final sont des clefs incontournables du succès.

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Marie-Thérèse Mercier, conseillère régionale d’Occitanie, vice-présidente de l’agence Ad’Occ, l’agence régionale de développement économique. © HJE 2018, Y. Topol.

L’accompagnement par la Région

Afin de mener à bien leurs projets, les chefs d’entreprise peuvent s’adresser à diverses structures privées ou publiques. Pour ces dernières, les agglomérations et métropoles ont la compétence dans l’assistance à l’implantation dans les parcs d’activités et les locaux. Et il revient à la Région d’être le chef de file en matière de développement économique. Elle est par exemple la seule à avoir la compétence de distribuer des aides directes aux entreprises. Marie-Thérèse Mercier, conseillère régionale d’Occitanie, vice-présidente de l’agence Ad’Occ, l’agence régionale de développement économique, souligne que l’une des nouveautés des dispositifs d’aide concerne l’accompagnement des TPE/PME et des start-ups non plus seulement sur la partie technologique, mais aussi sur la faisabilité commerciale. Autre priorité, l’accompagnement de l’ensemble des TPE/PME, y compris les toutes petites entreprises, les artisans et les commerçants.

Marie-Thérèse Mercier rappelle que l’Occitanie investit 3,7 % de son PIB pour la recherche et le développement, contre 3 % en moyenne pour les autres Régions de France et d’Europe. Or, très peu de TPE et de PME en profitent. « La clef pour remédier à cette situation est de votre côté, affirme-t-elle. Et cette volonté d’aller vers les laboratoires, on peut vous y aider. C’est là un rôle majeur de l’agence de développement économique. L’accélération de l’influence de la transformation numérique, de la transformation digitale, de l’intelligence artificielle, de la robotisation… a des impacts sur pratiquement l’ensemble des métiers traditionnels. Il faut en avoir conscience pour assurer la pérennité de l’entreprise. Avec les mutations actuelles, c’est en faisant du collaboratif, en répondant aux appels d’offres, en travaillant en réseau que l’on peut innover efficacement. Et du coup, on fera de cette région la première région de France pour l’innovation. » 

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De gauche à droite : Frédéric Salles, président de Matooma ; Jean-François Manlhiot, membre du directoire de la CELR ; et Marie-Thérèse Mercier, conseillère régionale d’Occitanie, vice-présidente de l’agence Ad’Occ, l’agence régionale de développement économique. © HJE 2018, Y. Topol.

Plusieurs dispositifs d’aides proposés

« Dans le domaine du financement de l’innovation, il faut tordre le cou à l’idée selon laquelle il y aurait une opposition entre le privé et le public. Les enjeux sont tels que seule l’alliance public/privé permet aux innovations d’émerger », prévient Jean-François Manlhiot, membre du directoire de la Caisse d’Epargne Languedoc-Roussillon (CELR). Le mariage d’Irdi et de Soridec, réalisé grâce à la Région Occitanie, la BPI et les banques – dont en particulier la CELR – en est l’une des illustrations. Jean-François Manlhiot indique que le groupe Irdi Soridec Gestion vient de lever 80 millions d’euros en matière d’innovation. Il insiste par ailleurs sur le dispositif Neo Business créé à l’initiative de sa banque. Ce système de labellisation, d’accompagnement et de financement des start-up bénéficie de l’apport de 3 chefs d’entreprise chevronnés qui apportent leurs conseils et leur relationnel aux responsables des entreprises innovantes.

Le Fonds Occitanie de soutien territorial aux entreprises régionales (Foster), mis en place par la Région avec le soutien de l’Europe et auquel participe la CELR, facilite l’accès aux prêts bancaires pour les TPE, les PME, certaines professions libérales, les artisans et les commerçants. La garantie est portée à 80 % par la Région, et le taux du prêt bancaire est réduit. Créalia est pour sa part un outil qui permet de renforcer les fonds propres. Des prêts d’honneur personnels sont accordés à des chefs d’entreprise soutenus par la Région et des partenaires privés. La Région dispose  par ailleurs d’une panoplie d’aides aux différents stades de la vie de l’entreprise : création, innovation, développement, transmission/reprise.

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Au micro, François Péréa, linguiste et vice-président délégué au numérique de l’université Paul-Valéry de Montpellier ; et à sa gauche Frédéric Salles, président de Matooma. © HJE 2018, Y. Topol.

L’apport des lettres et des sciences humaines au numérique

L’innovation peut avoir pour sources fructueuses des domaines auxquels on ne pense pas spontanément. François Péréa, linguiste et vice-président délégué au numérique de l’université Paul-Valéry de Montpellier, met en avant ce que l’étude des lettres et des sciences humaines peut apporter au numérique. Ainsi, la demande à IBM dans les années cinquante de numériser les œuvres complètes de saint Thomas d’Aquin réunies à l’université de Montpellier a posé les bases de tout un questionnement qui ressurgit avec le Big Data. « Comment par exemple faire comprendre à des informaticiens que le « suis » de « je suis » et le « sommes » de « nous sommes » ne se ressemblent pas du tout mais sont deux formes du même verbe ? Et comment automatiser cela ? », demande François Péréa. L’apport d’une solution à ce problème montre l’intérêt d’associer la sémantique et le monde du numérique. « Une petite entreprise californienne créée en 1998 a très bien compris l’intérêt de manipuler les mots et de les comprendre sémantiquement. Il s’agit de Google », rappelle-t-il.

Beaucoup plus récemment, des spécialistes de l’Egypte antique à l’université Paul-Valéry de Montpellier ont élaboré – en partenariat notamment avec la société montpelliéraine Intactile Design – un dictionnaire en ligne qui s’appelle Vocabulaire de l’égyptien ancien (Vega). L’outil ainsi créé est désormais incontournable pour tous les égyptologues dans le monde.

François Péréa insiste lui aussi sur le respect des usages pour que l’innovation soit acceptée. Il indique qu’en vue d’imaginer les logements étudiants du futur, le Crous a confié à l’université Paul-Valéry de Montpellier la mission d’observer au niveau national les usages des étudiants dans leurs logements et de proposer des solutions adaptées et acceptées. L’Ecole d’architecture de Nîmes est partenaire de ce programme.

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Sophie Garcia, présidente du Medef Occitanie ; Frédéric Motte, vice-président du Medef national en charge de l’animation des territoires ; et Samuel Hervé, président du Medef Hérault Montpellier. © HJE 2018, Y. Topol.

Faire savoir son savoir-faire

Tout au long de la soirée, plusieurs des intervenants ont souligné l’erreur de nombreux porteurs de projets innovants insistant pour garder secrète leur innovation afin de ne pas se faire voler l’idée. Frédéric Salles, qui accompagne la création de start-up dans le cadre du dispositif Synerg’Innov (voir encadré), les met en garde : « N’en parlez à personne. Ainsi, personne ne sera au courant de ce que vous avez fait, et c’est là le meilleur moyen de ne pas réussir ». En fait, c’est l’attitude inverse qu’il faut adopter, souligne-t-il : « Quand on a un savoir-faire, il faut le faire savoir. On met en avant son innovation. Et plus on en parle, plus cela marche ». Une autre erreur consiste à se lancer trop rapidement dans la recherche de fonds. « Avant de penser à lever des fonds, il faut vendre son innovation. Et ensuite on trouve les fonds », prévient Frédéric Salles. On le voit : l’innovation n’est pas seulement le « plus » pour créer de la valeur. Elle est bien sûr cela, et va bien au-delà, pour devenir un véritable moteur permanent de la vie de l’entreprise.

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400 chefs d’entreprise ont assisté à l’événement organisé par le Medef Hérault Montpellier. © HJE 2018, Y. Topol.

Le dispositif Synerg’Innov bientôt sur les rails

En matière d’innovation concrète sur le territoire, Samuel Hervé, président du Medef Montpellier Centre Hérault, annonce le lancement d’ici l’été d’un appel à candidatures auprès des start-up et des entreprises de la nouvelle économie. Auparavant, le dispositif Synerg’Innov, qui vise à modifier durablement les relations et la perception réciproque entre la nouvelle économie et l’économie traditionnelle (bâtiment, restauration, hôtellerie, industrie…) aura été installé. Il s’agira dans un premier temps de scanner les besoins en innovation des branches professionnelles sur le territoire héraultais, puis de repérer des porteurs de projet en innovation afin de faciliter les rencontres entre les acteurs de ces deux mondes de l’économie. Le Medef s’engage à accompagner les entreprises dans la transformation numérique et à les alerter sur les risques qui lui sont liés. Une soirée sur la cybersécurité sera ainsi organisée le 26 avril prochain.

 

 

 

 

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