Portrait de l'Hérault — Département Hérault

Portrait de l'Hérault : Carine Favier, une vie de combat pour les droits des femmes

Carine Favier est co-présidente du Planning Familial d'Occitanie. Femme d’engagement et de combat, elle lutte dans l’association depuis ses débuts. Portrait.

A 71 ans, Carine Favier, médecin et co-présidente du Planning Familial (PF) en Occitanie, est une femme toujours aussi engagée qu’à ses débuts, en 1973. Elle était à l’époque au PF et au Mouvement pour la libération de l’avortement et de la contraception (MLAC). Créée en 1973, cette association regroupait médecins du Planning et non-médecins voulant que l’avortement soit exercé à la demande de la femme et remboursé par la sécurité sociale, en tant qu’acte médical. L’objectif avait alors été atteint puisque la loi Veil a été votée en 1975. “Le MLAC a donc été dissous et on pensait à ce moment-là que c’était aussi la fin du Planning mais dans la société il y avait encore beaucoup de résistance, alors l’asso est restée mobilisée, raconte Carine Favier. S’en est suivie une période moins héroïque, avec beaucoup plus de gestion.

“On risquait d’être radié de l’ordre des médecins si on se faisait attraper !”

De l’héroïsme et du courage, il en fallait au début des années 70 pour les professionnels qui acceptaient de pratiquer illégalement des avortements. “On risquait quand même d’être radié de l’ordre des médecins si on se faisait attraper !”, confie-t-elle avec un sourire. Mais c’était une époque très formatrice, notamment dans la capacité de mobilisation des personnes. Les femmes venaient dans les locaux du Planning et on décidait ensemble : celles qui avaient des sous partaient en Hollande, où l’avortement était légal, ou bien elles donnaient l’argent à celles qui n’en avaient pas mais qui pouvaient s’absenter. Car sur une trentaine de femmes, on ne pouvaient pratiquer qu’une dizaine d’avortements. Il y avait une solidarité incroyable, je n’ai jamais retrouvé ça depuis !”

Suite à la loi Veil, Carine Favier quitte pour un temps le Planning, se trouvant “trop jeune”. Elle y reviendra en 1985. Elle reste cependant engagée et poursuit ses études de médecine à Montpellier. Devenue médecin généraliste, elle se forme à la cancérologie et aux maladies infectieuses, alors que l’épidémie de Sida ravage l’occident. “J’ai travaillé pendant 30 ans sur le VIH. J’ai vécu les débuts, quand on avait pas de traitement et qu’on passait notre temps à discuter avec les patients de la vie, de la philosophie parce qu’on avait pas grand chose d’autre à leur proposer que du soutien. Là aussi, ça a été très formateur sur l’accompagnement et l’écoute, pour que le soin ne soit pas uniquement technique.”

“Il va falloir faire très attention à nos libertés”

Après avoir passé 9 ans à la Commission Sida du Planning, Carine Favier prend la présidence nationale de l’association de 2009 à 2016. Son rôle est alors de piloter le réseau français composé d’environ 70 associations départementales et 13 régionales. C’est aussi un rôle de représentation politique, de relations avec le ministère et avec les institutions. 15 ans en responsabilité nationale, donc, et comme c’est la règle au Planning, elle passe la main. “La transmission m’intéresse beaucoup, j’aime partager et pour moi il faut laisser la place aux jeunes. Je vois bien que les choses se posent de façon différente dans les nouvelles générations. Il faut créer le Planning de demain, je peux apporter mon expérience mais je ne peux pas être l’avenir.”

Car si les femmes ont acquis un certain nombre de droits, les combats à mener sont encore nombreux. “Il va falloir être très prudent dans les mois et les années à venir car un contexte de réactions contre les avancées se met en place. Les anti-choix sont un courant fort et bien organisé et on risque un retour en arrière sur l’IVG, le mariage gay et l’éducation à la sexualité, sujet sur lequel ils sont en train de se mobiliser. On sent une résistance plus forte depuis un ou deux ans et il va donc falloir faire très attention à nos libertés.” La question des violences faites aux femmes revient également car malgré le mouvement MeToo, “ça reste un enjeu de société et même si la perception sociale change, les violences restent”, regrette-t-elle.
Autant de raisons de soutenir le Planning qui, dans l’Hérault, a connu une année 2023 très difficile, avec un budget déficitaire, faute à des engagements financiers pas tenus. Une grande campagne de soutien s’en est suivie, “on a été très touchés par cet élan de solidarité, il faut maintenant que ça s’inscrive dans la durée”, insiste Carine Favier. Si cette femme de combat aime passer du temps avec ses quatre petits-enfants, elle ne compte pas raccrocher de suite : “Je ne vois pas ma vie sans cet engagement social”, conclut-elle.

Qu'en pensez-vous ?

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

Depuis 1973, d’abord sous format magazine, puis via son site, Hérault Tribune informe le public des événements qui se produisent dans le grand Agathois, le Biterrois et le bassin de Thau.

Depuis 1895, l’Hérault Juridique & Economique traite l’économie, le droit et la culture dans son hebdomadaire papier, puis via son site Internet. Il contribue au développement sécurisé de l’économie locale en publiant les annonces légales.