Economie — France

Interview, Nautisme : “On a un marché qui vole au vent”, glisse Jean-Paul Chapeleau, président de la Fédération des Industries Nautiques

C’est sur les pontons de l’International Multihull Show de La Grande-Motte, acquis par la Fédération des Industries Nautiques en septembre 2023, que son président fraîchement reconduit, Jean-Paul Chapeleau, a partagé ses perspectives sur la filière nautique.

Une filière sur le pont

Naviguant sur les flots changeants du marché mondial, la France, leader mondial de la voile, de la glisse et quatrième producteur mondial de bateaux à moteur, tente de maintenir le cap dans son industrie nautique. Après avoir affronté trois saisons mouvementées post-pandémie, marquées par une vague de demandes sans précédent tant pour la vente que la pratique, le secteur nautique se retrouve maintenant à ajuster ses voiles pour faire face à de nouveaux défis. “Nous avons un marché qui vole au vent, lance Jean-Paul Chapeleau. C’est normal puisque le contexte socio-économique s’y prête. Nous venons de vivre trois années particulièrement exceptionnelles liées au fait, qu’après Covid, beaucoup de personnes ont eu envie d’aller sur l’eau. Ça nous a permis d’avoir une nouvelle clientèle sur l’ensemble du nautique, notamment le secteur du multicoques, qui en a encore plus profité que les autres.” 

Malgré une légère baisse des immatriculations de nouveaux bateaux en France, notamment dans le domaine des motorisés, la construction navale maintient le cap, avec 70 534 unités mises à l’eau lors du dernier exercice, soit une croissance de 7,3%. Une dynamique alimentée par une brise favorable provenant des exportations, avec 80,6% des ventes réalisées à l’international.

Les industries nautiques, un marché comme les autres ? 

Tendances inflationnistes, banques frileuses, préoccupations environnementales : si ces éléments sont familiers, c’est parce qu’ils viennent, depuis quelques années, perturber la dynamique des industries, en France et ailleurs, dans le nautisme et bien d’autres secteurs. Cette marée descendante intervient après la saison record 2021-2022 durant laquelle la filière avait enregistré 5,4 milliards d’euros de chiffres d’affaires au global, dont 1,5 milliard pour la seule production de nouveaux bateaux. 

“Depuis l’été 2023, le marché est ralenti et, en trois ans, le prix des bateaux a augmenté de 25 %, mais ce ne sont pas des tendances spécifiques à notre métier, affirme le président de la Fédération des Industries Nautiques. Comme l’immobilier, les financements sont également plus difficiles à obtenir. Il y a une baisse de la demande, sur les petits et moyens bateaux à moteur, les prêts bancaires sont plus difficiles à obtenir”. Si ces vents contraires exigent selon lui que l’industrie se montre attentive, le dirigeant semble raisonnablement optimiste quant au futur du marché : “D’après nos premiers chiffres, qui seront dévoilés en juin prochain, il semble que les affaires reprennent.”

Une économie bleue à verdir

En 2023, sous l’impulsion de la Fédération des Industries Nautiques (FIN), les acteurs de la filière se sont attelés à travailler vers une meilleure durabilité, la généralisation de la déconstruction responsable et la préservation des écosystèmes marins. Ce travail de longue haleine a pris la forme d’un projet collaboratif au sein de la fédération européenne EBI (European Boat Industry), destiné à élaborer une méthodologie commune pour évaluer l’impact environnemental des navires tout au long de leur cycle de vie. In fine, l’ambition est de matérialiser, sur le plan européen, puis mondial, un outil partagé et un langage commun, pour accompagner les entreprises. 

L’enjeu est tel que cette réflexion est désormais soutenue financièrement par une large majorité des grands constructeurs européens et des fédérations nationales. Cette démarche résolument tournée vers la durabilité vient compléter une dynamique déjà entamée par le marché français : sensibilisation accrue à l’environnement, réaménagement des ports, mises en place d’actions telles que l’Alliance Posidonia, le programme “Bateau Bleu”, le dispositif Ecogestes… 

Autre moteur, en plein essor, de l’éco-gestion : le marché de l’occasion. “Le marché de plaisance du catamaran a vraiment démarré dans les années 2000 et depuis 2 ou 3 ans, il est arrivé à maturité, pointe du doigt le dirigeant. Cela conduit à la naissance et croissance du marché de l’occasion. Il y a un an encore, il n’y avait pratiquement pas de bateaux d’occasion multicoque de disponible. Aujourd’hui, il y en a. On va voir comment il va évoluer, quel courant il suit.”

Le sujet houleux de la déconstruction 

Mais, alors que la France se positionne en tête dans le domaine de l’Analyse du Cycle de Vie (ACV) et que des progrès sont réalisés en matière d’éco-conception, avec en cap la réduction de l’empreinte écologique des nouveaux navires et l’utilisation de matériaux durables et recyclables, des questions subsistent, notamment sur l’avenir de la filière de la déconstruction. “Les bateaux vivent longtemps, 40 ans en moyenne. Cela induit deux sujets : il faut gérer les bateaux en fin de vie et il faut améliorer l’espérance de vie des bateaux plus récents. Nous avons une chance incroyable car nous disposons de l’APER, le seul éco-organisme au monde consacré à la déconstruction et au recyclage des bateaux de plaisance et de sport en fin de vie, agréé en France par le Ministère de la Transition Écologique et Solidaire. C’est une filière qui a un très bel avenir. En Europe et même au-delà de ses frontières, cette activité est regardée de façon très positive.” 

Comment expliquer que cette dynamique ne soit pas encore visible sur le marché ? Pour le président de la FIN, la réponse est simple : “Nous sommes juste dans une période de renouvellement de l’agrément en France où il y a quelques incompréhensions avec certains services de l’État qui ont une vision différente des chiffres et de l’enjeu. On a lancé une étude avec les associations de plaisanciers, les organisations écologistes, des services de l’État pour remettre à plat la réalité des chiffres, pour mieux connaître le gisement exact de bateaux à déconstruire. Il faut qu’on obtienne des chiffres concrets afin que l’agrément à venir soit basé sur des chiffres réalistes et réalisables, et non des chiffres qu’on rêve de réaliser. D’après nos estimations, nous avons actuellement un peu plus de 3 000 bateaux déconstruits par an.”

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Commentaires

  1. Sincèrement, du mensonge à l’état pur , la filière nautique sait pertinemment que la FIN est à la botte du Groupe Beneteau , il oublie de dire que les usines de ce groupe sont à l’arrêt en Pologne … en chômage technique sur certains sites Français et que le nombre de bateaux vendus en France prend en compte un parc de bateaux stock vendus en foor plan aux concessionnaires qui aujourd’hui ne savent plus quoi en faire et payent tous les mois Les agios chez SGB , Cgi et compagnie……. l’art de se moquer des gens… une fédération qui ne sert strictement à rien sauf à organiser des banquets petits fours et champagne sur leur péniche parisienne

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