Lunel : une triple exposition enchanteresse au Musée Médard autour des oiseaux
Le Musée Médard présente jusqu'au 17 mars 2018 une exposition portant sur l'un de ses trésors, "L'Histoire naturelle des oiseaux" en dix volumes, écrite par le comte de Buffon, naturaliste, et illustrée par le dessinateur et graveur François-Nicolas Martinet. Considéré comme le plus bel ouvrage ornithologique du XVIIIe siècle, cet ouvrage est mis en scène et accompagné de façon poétique par des diffusions de chants d'oiseaux, des œuvres en papier végétal de la créatrice contemporaine Laure Essinger et des gravures de Jean-Marie Granier.
L’Histoire naturelle des oiseaux de Buffon, un ouvrage remarquable
L’Histoire naturelle des oiseaux de Buffon a déjà été présentée au public, au Musée Médard, par le passé. Mais vu l’importance de cet ouvrage, il semblait impensable de le remiser au fond d’une bibliothèque.
Les grands in-folio conservés au musée constituent une première édition en dix volumes de plus de 30 cm de haut. Cet ensemble conservé dans un état remarquable est assez unique dans le monde. Les quelques exemplaires qui ont été retrouvés sont notamment conservés à la Bibliothèque Nationale de France, à Saint-Pétersbourg en Russie et… à Lunel ! L’exemplaire lunellois fut acquis par Louis Médard en 1830 aux marchands Abraham et Auguste Fontanel. Un “bijou” rejoignait ainsi sa collection.
Cet ouvrage réalisé par l’imprimerie royale était destiné aux plus grandes autorités de l’époque. Il fut écrit par l’éminent naturaliste, mathématicien et biologiste Georges-Louis Leclerc, comte de Buffon (1707-1788). Celui-ci était l’intendant du Jardin des plantes et chargé du cabinet d’histoire naturelle du roi Louis XV, de 1739 jusqu’à sa mort. Edition de luxe, L’Histoire naturelle des oiseaux de Buffon est illustrée de 973 planches d’oiseaux et 35 planches de coléoptères, papillons, etc. Il fallut dix-neuf ans à François-Nicolas Martinet (1731-1800) pour illustrer ces 1.008 planches, entre 1760 et 1779. De très belles gravures à l’eau forte furent réalisées à partir de ses dessins, et pas moins de 80 ouvriers mirent les ouvrages en couleurs, à l’aquarelle et à la gouache. Un travail très soigné.
Parcours
Au sein du musée, plusieurs vitrines présentent donc des planches de l’Histoire naturelle des oiseaux de Buffon, merveilleusement illustrées par le graveur François-Nicolas Martinet, en regard de leur description par le comte de Buffon.
Le responsable du Musée, Claudio Galleri, a souhaité remettre ce livre de référence à l’honneur, mais de façon plus vivante qu’auparavant. Il a souhaité lui “ajouter une dimension poétique”. Pour cela, il a fait appel aux prises de sons naturalistes de Bernard Fort, cofondateur et responsable du Groupe Musiques vivantes de Lyon, musicologue, musicien et ornithologue passionné.
Les visiteurs peuvent, au moyen de casques audio, écouter les chants d’oiseaux représentés dans l’ouvrage. Plusieurs salles disposent d’une ambiance sonore propre à un oiseau en particulier : les chants du verdier à l’extérieur, de la grue pour le cabinet des curieux, et du loriot dans le bureau-cabinet de Louis Médard. Le directeur du musée rappelle que le chant d’oiseau est souvent un chant d’amour interprété par le mâle pour séduire la femelle. Mais parfois, le chant se fait cri et signal d’alerte, pour prévenir ses congénères d’un danger. Les chants sont très divers ; les enregistrements de Bernard Fort en attestent.
Les gravures sont complétées par des oiseaux empaillés prêtés par l’université de Montpellier et le musée de Saint-Gilles, donnant une idée de la taille des spécimens. Ces oiseaux apportent une touche “cabinet de curiosités”, très appréciable, à l’ensemble, et permettent au public de voir en vrai certaines espèces qu’il n’aurait jamais pu voir autrement.
Pour compléter cette exposition, l’artiste contemporaine Laure Essinger a été invitée à créer des œuvres en résonance avec l’aérien pour le cabinet des curieux. Habituellement inspirée par la nature, elle crée du papier végétal à partir de fibres de bananier, de lin ou de chanvre. Dans cette présentation, par les formes données à ses sculptures en papier, jouant avec la transparence et en suspension, elle semble aborder les notions de vol, parfois de métamorphose. Pour l’occasion, elle a pour la première fois introduit de la couleur dans son travail. Derrière les vitrines paraissent s’étirer des ailes, des créatures naissent, des nids s’ouvrent… Tout est dans la suggestion.
Au rez-de-chaussée, Claudio Galleri a souhaité montrer les gravures de Jean-Marie Granier (1922-2007), artiste qui fut inspiré sa vie durant par la nature camarguaise et cévenole, et plus spécifiquement par les oiseaux. Les visiteurs peuvent apprécier ses premiers travaux, très figuratifs, et son évolution stylistique vers une abstraction qui réduira l’oiseau à un signe.
Tout au long de l’exposition, des vidéos jalonnent le parcours des visiteurs, qui peuvent ainsi approfondir leurs connaissances sur divers sujets relatifs aux thèmes abordés. Sans oublier l’espace tactile, qui permet aux personnes malvoyantes et aux autres de ressentir quelques éléments de l’exposition par le toucher.
On sort de l’exposition En vol et en chant réjoui de ce moment passé en lien avec la nature, et avec l’envie profonde de se promener en scrutant le ciel, tout ouïe. Tout en étant conscient d’avoir eu le privilège d’accéder à un ouvrage naturaliste de référence, qui n’était à la base destiné qu’aux élites de la société du XVIIIe siècle.
Virginie MOREAU
vm.culture@gmail.com
Informations pratiques
Musée Médard
71, place des Martyrs de la Résistance
34400 Lunel
Tel. : 04 67 87 83 95.
www.museemedard.fr
Ouvert du mercredi au vendredi de 14h à 18h, et le samedi de 10h à 18h.
> Conférence de Bernard Fort le 6 décembre 2017 au Musée Médard.