Réforme du code du Travail : ce qui nous attend (2/2)

La réforme du code du Travail par ordonnances est lancée. Le projet de loi d’habilitation englobe plusieurs sujets. Des mesures visent à limiter et sécuriser les contentieux. Outre la réduction des délais de recours en cas de rupture du contrat de travail et un référentiel obligatoire des dommages-intérêts en cas de licenciement abusif1, le gouvernement mise sur la conciliation prud'homale.

Prud’hommes : favoriser la conciliation

Jusqu’en 2008, le système était marqué par une absence de recherche de consensus dans le traitement de la rupture du contrat du travail. Certes, la rupture amiable était envisageable, mais elle était très peu mise en œuvre, puisqu’elle ne permettait pas au salarié de toucher l’assurance chômage. Devant cette carence, par la loi du 25 juin 2008 sur la modernisation du travail, le législateur, a inventé un nouveau mode de rupture pour le contrat à durée indéterminée : la rupture conventionnelle. Le système fonctionne bien (même s’il se révèle onéreux pour les caisses d’assurance chômage) : en moyenne plus de 30 000 ruptures conventionnelles seraient ainsi formalisées chaque mois. Selon les derniers chiffres du ministère du Travail, en mai 2017, 34 700 conventions de rupture ont été homologuées, soit une hausse de 5,5 % sur un an.

En 2014, Alain Lacabarats, alors président de la Chambre sociale de la Cour de cassation, soulignait dans un rapport : « la juridiction prud’homale ne fonctionne pas dans des conditions conformes aux exigences des standards européens et connaît de graves carences ». Deux arguments pouvaient motiver ce constat : alors que les conseils de prud’hommes connaissent d’un plus faible nombre d’affaires par rapport aux tribunaux de commerce, aux tribunaux d’instance et de grande instance, leurs délais moyens de jugement et leurs taux d’appel sont le double ou le triple des autres juridictions. Et seulement 6 % des litiges devant les conseils de prud’hommes seraient réglés par la conciliation, alors que le contentieux en droit du travail est important.

La procédure de conciliation devant les conseils de prud’hommes ne fonctionnant pas correctement, on aurait pu croire que le législateur aurait eu à cœur de développer des modes privés de résolutions des conflits. Paradoxalement, en droit français, d’autres systèmes existent, mais se révèlent peu efficaces. Ainsi, la transaction n’est pas suffisamment adaptée aux besoins des entreprises. Quant à l’arbitrage, la médiation ou la convention de procédure participative, ils constituent des dispositifs largement méconnus par les entreprises et les salariés, contrairement à ce qui peut être constaté à l’étranger. La loi Macron de 2015 pour la Croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques a tenté de développer ces modes alternatifs de règlement des conflits. Il semble que le gouvernement entende franchir un pas supplémentaire : il prévoit « d’encourager le recours à la conciliation devant la juridiction prud’homale en modifiant les règles de procédure applicables durant la phase de conciliation ».

Sécuriser les contestations en cas d’inaptitude

Parmi les autres mesures de ce volet de sécurisation des relations de travail, le projet de loi d’habilitation prévoit de revenir sur la loi Travail, qui a modifié les règles relatives à l’inaptitude du salarié. Le texte entend sécuriser les modalités de contestation de l’avis d’inaptitude du médecin du travail. A peine la loi Travail  promulguée et le décret n° 2017-1008 du 10 mai 2017 – précisant certaines dispositions procédurales relatives aux juridictions du travail – publié, on réforme la réforme ! Les obligations de l’employeur en matière de reclassement du salarié pour inaptitude devraient aussi être clarifiées, selon le texte.

François TAQUET, avocat, spécialiste en droit du travail et protection sociale, et B.L.

 

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