REGION LR/MP - Articuler le national et local, ou faire le grand écart ? Par Francis DASPE
Qui peut oser soutenir que les orientations nationales n’auraient que peu d’impact sur les…
Qui peut oser soutenir que les orientations nationales n’auraient que peu d’impact sur les politiques locales menées par les collectivités territoriales ? Le discours de politique générale de la présidente de la région Languedoc-Roussillon / Midi-Pyrénées à l’occasion de la plénière du 15 avril 2016 à Montpellier conduit une fois de plus à se poser la question. Il a eu le mérite de faire percevoir la forte imbrication entre les deux échelons.
Les priorités indiquées par Carole Delga sont louables : elles peuvent être a priori partagées. Hélas, elles se fracassent sur le mur des réalités politiques nationales. C’est ainsi que la présidente s’est targuée d’avoir demandé auprès des services de l’Etat que la baisse des dotations publiques soient moindres que prévues. L’austérité constitue bien un verrou bien difficile à faire sauter : le cadre contraint qu’elle impose transforme toute négociation en marchandage bien dérisoire.
Il en va de même pour la priorité affichée en faveur de l’éducation et de la formation. C’est peine perdue que de vouloir atténuer les dégâts occasionnés par les politiques nationales de démantèlement de l’éducation nationale (promesse non tenue de la création des 60 000 postes, réforme des rythmes scolaires démantelant le cadre national, réforme du collège donnant une conception des savoirs minimaliste et utilitariste, dévitalisation de l’enseignement professionnel etc.). Le choix de l’apprentissage fait par la région ne vise qu’à la satisfaction des besoins de court terme des entreprises. Certainement pas à des impératifs de déprécarisation et d’émancipation sur le long terme. Ce choix ne pourra pas non plus contribuer à inverser durablement la courbe du chômage en vue des Présidentielles de 2017….
La priorité donnée à « l’équité territoriale » a de quoi laisser songeur. Pourquoi substituer le terme d’équité, de nature fondamentalement libérale, à celui d’égalité, d’essence véritablement républicaine ? Comment croire que cet objectif puisse se réaliser dès lors que l’on a voté la loi NOTRe qui promeut des métropoles tentaculaires (au nombre de deux dans cette grande région, ce qui en fait une particularité) et marginalise les espaces ruraux éloignés (très nombreux au sein des 13 départements) ? Comment espérer tenir cet objectif dès lors que l’on soutient un gouvernement qui poursuit l’entreprise de privatisation des services publics en appliquant servilement les directives de libéralisation de l’Union Européenne ?
Le développement durable comme horizon pour la région se heurtera semblablement à quelques verrous. Les politiques d’accompagnement de la mondialisation libérale invalident mécaniquement les belles promesses en la matière. C’est le système économique de production, d’échanges et de consommation qui est à remettre radicalement en cause. Il ne s’agit pas de se contenter de culpabiliser les individus pour au final mieux pérenniser un système socialement et écologiquement destructeur, et au bout du compte économiquement inefficace. Le capitalisme vert est bien une imposture, aux antipodes de la vision écosocialiste portée par le Parti de Gauche.
Enfin, si l’on veut promouvoir avec succès une « croissance bleue » et pour que cette expression ne risque au final de n’être pas plus heureuse que celle de capitalisme vert, le mieux serait de prendre connaissance du projet d’économie de la mer proposée par le Parti de Gauche et Jean-Luc Mélenchon…
Par ces quelques exemples, on constate le grand écart auquel la majorité de Carole Delga risque d’être confrontée. Le national et le local s’interpénètrent puissamment : c’est une vue de l’esprit que de croire qu’il pourrait y avoir un cloisonnement. Les priorités sont toujours vertueuses. Elles sont forcément des déclarations de (bonnes) intentions. Souvenons-nous qu’il en allait de même quand un candidat aux présidentielles déclarait que « son ennemi, c’est la finance ». On sait ce qu’il en advint dès l’installation à l’Elysée effectuée. La majorité de Carole Delga risque bien de subir des avanies identiques à oublier l’épée de Damoclès que constituent les politiques nationales d’austérité.
Francis DASPE, co-secrétaire départemental du PG
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