Santé — Montpellier

[VIDEO] L’Éco de l’Hérault : Vigicard, la blockchain au service du suivi d’allergies

Vigicard est un projet initié il y a 5 ans au CHU de Montpellier et porté par deux allergologues : la docteure Anca Chiriac et le professeur Pascal Demoly. L’objectif : répondre à un enjeu de santé publique sur les allergies, à travers une application innovante, basée sur la blockchain et développée par Codinsight.

D’une part, il y a la nécessité de pallier un manque d’information sur les médicaments potentiellement allergènes, dont il vaut mieux connaître les effets indésirables. D’autre part, il est indispensable d’assurer une meilleure connaissance et un meilleur suivi des allergies médicamenteuses en elles-mêmes. En effet, 5 à 10 % de la population européenne est concernée par ce risque. Pourtant, après test, seules 20 % des allergies déclarées spontanément par les patients sont confirmées. Dans une majorité des cas, il s’agit seulement d’intolérances ponctuelles plus que d’allergies véritables.

L’application Vigicard vient en réponse à ce besoin d’information médicale, pour le patient comme pour l’allergologue. Actuellement en phase bêta, l’application est développée par Codinsight, une entreprise montpelliéraine experte en digital et notamment spécialisée sur les technologies blockchain. Ces technologies présentent une caractéristique essentielle à un projet de ce type : la sécurisation des données, ici médicales.

NB : ​​La blockchain est un système informatique décentralisé, utilisé pour des transactions et du partage d’informations sécurisés. Les données sont enregistrées de manière permanente, avec un historique facilement retraçable, le tout pensé sous forme d’une chaîne de blocs.

Sur quels types de projets travaillez-vous chez Codinsight ? Qu’en est-il de Vigicard plus spécifiquement ?

Fabien Bucamp : J’ai cofondé Codinsight il y a deux ans avec Jorick. L’objectif est d’accompagner les porteurs de projets innovants dans la construction et le développement technique de leurs produits. C’est-à-dire la création de sites web, d’applications web et mobiles, avec une expertise particulière sur les technologies blockchain. Le projet Vigicard est un exemple.

Jorick Lartigau : D’ailleurs, ce projet Vigicard était finaliste de Horizon 2020, un programme européen qui vise justement à l’emploi de la blockchain pour des applications sociales, dans le domaine de la santé notamment. Ça fait maintenant deux ans qu’on travaille sur l’application Vigicard. Après une première phase majeure de développement, nous en sommes à une version bêta fonctionnelle, mais il reste des ajustements à faire. L’objectif c’est d’avoir une version prête pour un essai clinique dans l’année 2024, avec 400 patients et 200 professionnels de santé sur la région Occitanie.

Fabien Bucamp : Ça va dépendre aussi des financements qu’obtient le CHU pour l’essai clinique, pour prendre en charge à la fois la partie technique et les participants : patients et professionnels.

[VIDEO] Démonstration de l’application Vigicard

Quels besoins des personnes ont motivé cette création ?

FB: Pour le contexte, il faut savoir qu’il y a une forme d’immunisation collective aux antibiotiques qui se développe. Face au manque d’efficacité et parfois au risque d’allergie, le médecin peut prescrire ce qu’on appelle un traitement de seconde intention. Souvent, ce traitement “plan B” est moins efficace et plus coûteux : la question du financement de la sécurité sociale se pose aussi.

JL : Au niveau européen, l’antibio-résistance est vraiment un sujet sérieux. Il y a des molécules qui commencent à ne plus être efficaces et pour lesquelles il n’y a pas de substituts. D’où l’intérêt d’évaluer le degré de sévérité de l’allergie. Car dans la mesure du possible, les unités allergologiques du CHU de Montpellier privilégieront le traitement adéquat – de première intention- couplé à un antihistaminique ou quelque chose pour contenir l’allergie, plutôt que d’aller vers un dérivé.

L’idée derrière Vigicard, est-ce que c’est d’améliorer la détection d’allergies ou le suivi d’allergies ?

JL : C’est avant tout un outil d’accompagnement du patient pour qu’il déclare une suspicion d’allergie. Ici, on se concentre vraiment sur les allergies médicamenteuses. Exemple : je prends un doliprane, j’ai une réaction allergique, donc j’utilise l’application pour faire une déclaration simple. Je peux déclarer mes symptômes, à travers une liste donnée. Est-ce que c’est cutané ? Est-ce que j’ai des maux de ventre… Je peux même prendre en photo la boîte du médicament pour aider. Une fois que j’ai fait ma déclaration, une fiche récapitulative est établie. A partir de là, le professionnel de santé va pouvoir la compléter. Ainsi, le jour où la personne consulte un allergologue, le médecin va pouvoir retracer tout l’historique, avec des données qui ont été captées en temps réel. Il va pouvoir émettre un certificat pour valider ou non cette allergie, déterminer le niveau de sévérité, et le traitement de substitution qui devrait être administré au cas où.

FB : En résumé, cette application est une carte d’allergie numérique, avec ce suivi des allergies d’une part, les traitements éventuels de l’autre. Contrairement aux cartes physiques que certaines personnes portent parfois sur elles, pas de risque de perte. Surtout, ce n’est pas figé. L’application tient compte du caractère évolutif des allergies, tout en gardant l’historique depuis la suspicion.

Je crois que ce sont effectivement des caractéristiques permises par la blockchain ? En quoi cette technologie est utile dans le cadre de Vigicard ?

FB : Le premier objectif, c’est la sécurité. Actuellement, on passe par un intermédiaire classique : un hébergeur de données de santé. A terme, nous voulons qu’une copie de ces informations, sur Mon Espace Santé par exemple, soit possible, tout en faisant en sorte que ces données soient stockées directement sur le téléphone de la personne. Que permet la blockchain dans ces cas-là ? Si le patient stocke lui-même ses informations, il pourrait les modifier ou les falsifier. La blockchain permet de s’assurer de cette conformité. Le deuxième aspect, c’est tout la partie historique, la traçabilité des informations dans le temps. Si demain Vigicard s’arrête, les données seront toujours disponibles car enregistrées sur une infrastructure publique. Grâce à la blockchain, il n’y a plus cette dépendance vis-à-vis d’une entité. Le dernier point, c’est ce qu’on appelle l’interopérabilité. Comme la blockchain est une technologie open source, il est plus facile d’interconnecter les systèmes entre eux, pour récupérer les certificats d’allergies émis par Vigicard par exemple, et pouvoir les utiliser au niveau des hôpitaux par exemple.

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