Baltazar : quand l’art donne du lustre aux objets du quotidien

La foire méditerranéenne des arts contemporains Art Montpellier a été l’occasion pour le galeriste…

La foire méditerranéenne des arts contemporains Art Montpellier a été l’occasion pour le galeriste biterrois Fabrice Delprat, de Dupré & Dupré Gallery, de présenter un artiste qui a nouvel­lement intégré son équipe. Après avoir suivi des études – théoriques donc – en histoire de l’art à l’université Paris 8, Baltazar, autodidacte au niveau de la pratique, s’est longtemps tenu loin des galeristes, par méfiance. Ses créations étaient donc stockées chez lui et montrées uniquement à son entourage. Lorsqu’il a rencontré Fabrice Delprat, ses doutes se sont effacés, la confiance s’est installée, et il a accepté que celui-ci expose ses œuvres et le représente.

Rencontre avec Baltazar, jeune artiste aux multiples talents…

 

L’amour de la peinture

Baltazar a eu un parcours chaotique. Quand il dit : « Depuis mon enfance, j’ai toujours peint. Puis j’ai dû m’interrompre pendant quinze ans. J’ai recommencé il y a trois ou quatre ans », on a bien du mal à croire
que l’interruption ait été aussi longue, tant sa maîtrise de la peinture à l’huile est grande. Il se dit inspiré par les grands maîtres et ajoute : « J’aime détourner des archétypes de la peinture. Notamment des tableaux de Léonard de Vinci que les gens connaissent tous… ».

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“La Vache qui rit” (technique mixte, 140 cm de diamètre) et sa vignette, “La jeune fille à l’hermine” (peinture à l’huile, 105 cm / 89 cm).

On en veut pour preuve la magistrale Jeune fille à l’hermine peinte à l’huile sur toile qui sert de vignette
à son installation sculpturale La vache qui rit. Une demoiselle qu’il représente en « bunny girl », autrement dit en danseuse de cabaret, en pleine pâmoison. Il faut voir la façon dont il rend les matières – tissu rouge sombre de sa robe, pelage de l’hermine, couleur de sa chair – pour mesurer son talent. 

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“La Belle Ferronnière câblée” (140 cm x 140 cm).

Il réinterprète également La Belle Ferronnière, du même Léonard de Vinci, en prenant là aussi des libertés par rapport au tableau de départ : la jeune femme se tient dans l’autre sens et, au lieu d’être lisse, sa chevelure est hérissée de câbles, ainsi que l’indique le titre de l’œuvre. « Ce tableau est un archétype de la peinture. J’ai doté la dame d’un appareil inquiétant évoquant – dans mon esprit – les traitements contre l’hystérie. Il s’agit en fait de l’ancêtre d’un appareil à bigoudis. Cette mise en scène du câblage m’a permis de matérialiser toutes les contraintes pesant sur les femmes et empêchant leur émancipation, leur liberté, limitant leur liberté de penser… Les câbles ont un léger côté kitsch qui ne me dérange pas. Tant qu’il y a un propos derrière, j’assume d’être à la limite entre le bon et le mauvais goût » indique Baltazar. Personnellement, la rédaction n’a vu ici aucun mauvais goût.

Le plaisir de la sculpture et de l’installation

Loin de se limiter à la peinture, Baltazar aime le volume « L’idée de départ de plusieurs de mes œuvres, comme La vache qui rit et Docteur Maboul, est de choisir un objet auquel on ne prête aucune attention – une boîte de fromage, un jeu – et que tout le monde connaît et a ou a eu chez lui, quel que soit son bagage culturel. Je fais appel à la mémoire universelle. Ma volonté est d’attirer l’attention et de faire un clin d’œil à l’intelligence de la personne qui va regarder. » Et comme Baltazar aime faire les choses en grand, son œuvre Vache qui rit fait tout de même 1,40 mètre de diamètre ! Et représente un énorme travail. D’ailleurs, approuve l’artiste : « J’aime que l’on sente que l’œuvre a été façonnée manuellement ; qu’elle résulte d’un travail long et patient ». 

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“La Vache qui rit” (technique mixte, 140 cm de diamètre) et sa vignette, “La jeune fille à l’hermine” (peinture à l’huile, 105 cm / 89 cm). © Virginie Moreau / HJE 2019

Pour La vache qui rit, tout a commencé lorsqu’il a peint La jeune fille à l’hermine version « bunny girl ». Il se remémore : « Je cherchais un cadre décalé dans lequel mettre ce tableau. J’ai alors pensé au milieu de la publicité et des marques, à Mondrian mis en scène pour Studio Line et à La Laitière de Vermeer revisitée pour La Laitière. Je me suis souvenu de mon enfance, quand j’espérais être le premier à récupérer l’autocollant dans la boîte de Vache qui rit. Et soudain ça m’a semblé évident : ma Jeune Fille à l’hermine ferait office de vignette dans la boîte de fromage, pour une confrontation entre pop art et classique. » Baltazar ne va pas s’arrêter en si bon chemin. Il souhaite réaliser une série de 10 boîtes avec 10 vignettes différentes. 

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“Docteur Maboul” (196 cm x 91 cm) © Virginie Moreau / HJE 2019

Autre œuvre marquante de l’artiste, son Docteur Maboul, qui mesure 196 sur 91 centimètres. Baltazar l’explique en détail : « Je suis parti du principe que la boîte de jeu paraît bien plus grande quand on est enfant qu’elle ne l’est en réalité. D’où sa taille. Je me suis basé sur la boîte d’origine, avec les couleurs de mon enfance. J’y aborde le profane et le sacré. Le personnage, qui appartient à la mafia russe, est tatoué. Chacun de ses tatouages a une signification : les dômes sur sa poitrine évoquent le nombre d’années qu’il a passées derrière les barreaux ; le sabre sur son avant-bras montre qu’il a commis un crime de sang et qu’il va se venger… Ici, c’est sa vie qui se joue. On est loin du jeu de notre enfance. Je mets la tragédie au premier rang. Dans une niche, j’ai placé, au niveau d’un de ses avant-bras, une balle, symbole de violence. Et j’ai disposé divers moulages dans les autres niches : un cœur, un crucifix et un fémur, qui rappellent les reliques religieuses. Sans oublier la Vierge à l’enfant sur sa cuisse. Le cerclage métallique existait déjà dans le jeu. » Ainsi, le profane et le sacré se côtoient, la violence et le monde de l’enfance se retrouvent.

Dans ses œuvres, Baltazar développe une esthétique soignée tout en maniant à la perfection les confrontations d’univers, les références universelles à la fois artistiques, publicitaires et ludiques, et la critique sociétale. Une réussite.

Virginie MOREAU
vm.culture@gmail.com

Baltazar est représenté par le galeriste Fabrice Delprat, de Dupré & Dupré Gallery, désormais hors les murs.  Plus d’informations : https://www.dupre-et-dupre.com Contact : dupredupregalerie@gmail.com

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