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BESSAN - Transmettre la chance d'une réconciliation

Transmettre la chance d’une réconciliation(regard transversal sur la Victoire et la Journée de l’Europe)Dans…

Transmettre la chance d’une réconciliation

(regard transversal sur la Victoire et la Journée de l’Europe)

Dans le calendrier, la Victoire de 1945 et la journée de l’Europe se succèdent d’un jour sur l’autre : le premier événement est commémoré le 8 mai, le second est célébré le 9. Scellant la Victoire, la signature du 8 mai 1945 clôt une période marquée par la mort et la misère. La déclaration Schuman du 9 mai 1950 ouvre une voie nouvelle pour lier l’Allemagne et la France concernant leurs intérêts communs sur le charbon et l’acier. Considérée comme le texte fondateur de la construction européenne, c’est l’anniversaire de cette déclaration qui a été choisi pour célébrer la journée de l’Europe. Lier les deux événements illustre bien l’enjeu qui fait sens. Il s’agit bien de «transmettre la chance d’une réconciliation que nous devons à ceux de 1945 qui ont eu l’audace de concevoir un avenir plus radieux fondé sur la réconciliation et sur la paix». Ces paroles sont celles d’un ancien président de la République «né pendant la première guerre mondiale» et qui «avait combattu durant la seconde». Dans ce discours qui était l’un de ses derniers actes publics, il appelait sous forme de testament à «vaincre ses préjugés» mettant en garde son auditoire en lui rappelant que «le nationalisme, c’est la guerre».

Oui l’enjeu est bien celui-ci : transmettre la chance d’une réconciliation. «Chacun a vu le monde de l’endroit où il se trouvait et ce point de vue était déformant» avait précisé François Mitterrand au cours de la même allocution ci-dessus rapportée.

Du discours d’un ancien combattant à un autre, celui du maire de Bessan en 1970 apporte aussi son témoignage et ses recommandations pour l’avenir. Alors qu’il célébrait le 25ème anniversaire de la Victoire, l’élu bessanais de l’époque écrivait :

«Notre patrie nous était rendue, elle nous accueillait et nous étions rendus à notre patrie que nous entendions servir. De cette guerre qui fit tant de victimes, les enseignements qu'elle comportait n'ont pas été partout tirés. Ni le nationalisme, ni le racisme, ni l'oppression ouverte ou déguisée n'ont disparu de notre monde. C'est pourquoi malgré l'immense hécatombe de la seconde guerre mondiale, pas un seul instant depuis vingt-cinq ans, ce monde n'a encore connu la Paix totale».

«Depuis 25 ans» dit l’élu d’alors, soit à peine le tiers du temps écoulé depuis 75 ans … et la même réalité perdure toujours et encore. Il poursuivait ainsi : «A l'égard de tous ceux qui sont tombés dans l'éclat d'un assaut ou dans l'ombre de la clandestinité, de tous ceux qu'ont réduit en cendres les crématoires ou l'embrasement de nos villes, nous avons un devoir : les honorer en servant la Paix qu'ils espéraient et la Liberté qu'ils attendaient».

Le paragraphe suivant du discours du maire de Bessan en 1970 énonce : «Au-delà de l'amertume et du ressentiment, il nous faut d'abord réconcilier avec lui-même ce continent qui est le nôtre et qui fût si souvent ensanglanté ; redire sans relâche à ceux qui viennent après nous que les respects de la liberté, de la justice et de la dignité de l'homme constituent la première condition de Paix ; que la volonté de puissance et de domination conduisent inéluctablement aux deuils et aux ruines».

Ces lignes d’un maire de province en 1970 et la teneur du discours du président de la République en 1995 expriment la même conviction. Ils ont été témoins de la même guerre. Ils ont combattu et ont été faits prisonniers au cours du même conflit mondial. Leurs dires respectifs relèvent de la même conviction forgée par l’expérience et appuyés sur l’espérance : celle de la nécessaire transmission de la réconciliation.

Olivier Goudou, conseiller municipal sortant

Illustrations : Monument du Souvenir à Bessan (oeuvre d’Auguste Azéma, 1925)

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