Mécénat : l’analyse de Clémence Boisanté, fondatrice de BCult¡
Pour"l’Hérault Juridique & Economique, Clémence Boisanté, fondatrice de BCult¡ – agence de conseil en art…
Pour”l’Hérault Juridique & Economique, Clémence Boisanté, fondatrice de BCult¡ – agence de conseil en art contemporain basée à Montpellier – évoque les actions qu’elle supervise, livre des conseils aux futurs mécènes et analyse la demande en la matière.
Les actions mises en place
« Nous travaillons actuellement sur deux projets d’interventions artistiques pour des entreprises. Celles-ci avaient le souhait de soutenir la création actuelle en offrant à un artiste de s’exprimer, dans les deux cas, dans un contexte architectural. Ces interventions se rapprochent dans l’esprit de la commande publique : un lieu et une œuvre d’art spécifique à celui-ci. Mais la collaboration entre le commanditaire et l’artiste est beaucoup plus ténue. Chaque projet est une aventure ! D’un côté il y a le commanditaire, qui a une sensibilité esthétique, une idée, un budget, et souhaite que le projet véhicule certaines valeurs. De l’autre l’artiste, choisi en fonction de ces exigences, avec son univers, sa vision et sa liberté de création. Les échanges sont fructueux et l’implication des acteurs totale. S’agissant de ce type de projets, on ne peut parler de mécénat stricto sensu. Rappelons que le mécénat est une libéralité que les donateurs peuvent « signer »1. L’administration fiscale admet un rapport de 25 % entre le montant du don et sa contrepartie. Mais le mécénat culturel bénéfice d’avantages supplémentaires par rapport aux avantages de droit commun. Ces actions ont un caractère d’intérêt général – le soutien de la scène artistique contemporaine – et bénéficient à ce titre de déductions fiscales (voir l’encadré).
“Nous réfléchissons également avec des collectionneurs à mettre en place un fonds de dotation en faveur des arts plastiques.”
Les conseils
« Cernez et ciblez vos actions ! Un don est une question singulière. Il est motivé par des facteurs liés à l’histoire de l’entreprise, à son organisation. L’accent est mis aujourd’hui sur la valeur ajoutée du mécénat en termes de communication ; il renforce le rôle sociétal des entreprises. Le développement durable est un des enjeux de la communication depuis plus de dix ans. Les arts permettent d’enrichir notre environnement intellectuel, ce en faveur de quoi je milite. Pour une action efficace, il faut impérativement faire la part des choses entre la communication commerciale, cristallisée par le sponsoring ou le parrainage, et la communication, qui véhicule des valeurs et que l’on veut désintéressée : le mécénat. Ce n’est pas une question de hiérarchie, mais de visée. « Le mécénat se signe , le parrainage s’affiche »2. Tout dépend de la finalité recherchée par l’entreprise. Dans le domaine de la culture et plus spécifiquement de l’art contemporain, la question du mécénat est sensible. Le marché de l’art est associé au luxe, au clinquant, car on ne considère souvent que sa frange ultramédiatisée des ventes aux enchères records et artistes superstars. Ces phénomènes sont loin de représenter l’ensemble du marché. Le mécénat culturel a reculé ces dernières années, les entreprises préférant labelliser leurs libéralités en donnant aux activités sociales ou éducatives, plus populaires. Il est donc important de choisir le secteur que vous souhaitez soutenir et de vous assurer ensuite du sérieux de la structure qui reçoit votre don. Il me paraît essentiel de se faire accompagner dans cette démarche. Nombreux sont les acteurs accompagnateurs des entreprises, au niveau ministériel, associatif ou privé. L’information est essentielle. »
Réalité de la demande
« La demande est réelle, mais elle doit être encouragée pour se concrétiser. Des études sont menées ; les chiffres laissent présumer un fort potentiel. Si la défiscalisation n’est pas l’argument incitatif, elle conditionne souvent le montant des dons. Or, pour les TPE et PME, le plafond de 0,5 % est un frein. En 2010, 85 % des mécènes étaient des PME, mais les deux tiers des dons versés l’étaient par les entreprises de plus de 200 salariés, disposant généralement de leur propre service mécénat intégré. La question de ce plafond pour les TPE et PME est en discussion au ministère. Nous assistons depuis plus d’une décennie à une évolution importante, du « mécénat de contribution » au « mécénat d’initiative »3. Les mécènes souhaitent avoir un rôle actif qui mène à une action tangible, souvent de proximité. La fondation d’entreprise soutenant le Musée Fabre ainsi que le fonds de dotation de la CCI le démontrent. L’ère du « financement de la danseuse du Président » est révolue. Les projets de terrain vont se multiplier, pour autant que les demandes soient suivies. »
Propos recueillis par Virginie MOREAU
1 – Loi de Finances de 2000.
2 – Robert Fohr, audition du 21 septembre 2011 par la commission des affaires culturelles et de l’éducation, présidée par Michel Herbillon.
3 – Jacques Rigaud, « L’exception culturelle, culture et pouvoirs sous la Ve République », Grasset, 1995.
> Pour en savoir plus : BCult¡ – agence conseil art contemporain
9, rue de la Vieille Intendance – 34000 Montpellier – www.bcult.fr – contact@bcult.fr