Enseignement — Montpellier Méditerranée Métropole

Montpellier, Pérols, Lattes : des jeunes exclus pour violences participent à des stages de responsabilisation

Depuis 2021, la Police Nationale et le rectorat de Montpellier sont liés par une convention visant à responsabiliser les élèves exclus temporairement de leur établissement scolaire. Le mardi 14 mars 2023, les deux entités dressaient le bilan…

Entre prévention et répression

Face aux actes commis par certains collégiens et lycéens, un dispositif innovant de prise en charge de fauteurs de troubles a été mis en place dans des établissements de la métropole de Montpellier en 2021. Il s’agit d’une prise en charge individuelle qui permet à l’élève de faire face à ses responsabilités et de sortir de ses difficultés. Ce dispositif disciplinaire met l’accent sur l’individualisation de la sanction, la responsabilisation de l’élève et l’implication de sa famille dans un processus éducatif. L’élève est reçu au Centre de Loisirs des Jeunes (CLJ) de la Paillade Mosson durant deux jours, et en immersion chez un partenaire durant une journée. 

Yannick Blouin, directeur de la direction départementale de la sécurité publique de l’Hérault (DDSP 34), rapporte que depuis la signature de la convention, 105 élèves ont bénéficié de ce dispositif. Majoritairement auteurs de violences psychologiques et physiques (coups, menaces, harcèlement) à l’encontre des élèves et des professeurs, certains avaient apporté des armes ou des stupéfiants dans leur établissement. “L’étude du nombre d’élèves pris en charge en 2021, 2022 et début 2023 révèle que la délinquance est en hausse ; c’est l’escalade”, déplore Yannick Blouin. 

En réponse à ce constat, l’inspecteur académique de l’Hérault, Christophe Mauny, explique qu’il faut allier prévention et répression dans une “manière novatrice d’aborder l’éducation.” “L’école est un processus de navigation secondaire avec plusieurs codes qu’il faut intégrer et qui sont différents des codes familiaux ; ce système permet au jeune de les joindre”, ajoute-t-il.

Le processus de responsabilisation intervient lorsque le jeune est exclu temporairement, la plupart du temps, c’est une punition destinée aux récidivistes qui sont déjà passés par le conseil de discipline. “Quand un jeune reproduit plusieurs fois une erreur, ce n’est plus une erreur, c’est une faute, qualifie l’inspecteur académique. Ces jeunes fautent par souci d’encadrement. Ce dispositif sert à le responsabiliser, ainsi que les adultes et pas seulement ses parents, afin de l’aider à construire son identité et son rapport à la règle, à la loi.” Cette méthode sert à accompagner le jeune dans son exclusion afin de faciliter son retour au système scolaire. Cela lui permet également de réviser son rapport à l’autre en lui donnant une nouvelle chance. C’est dans ce but que les écoles et la police travaillent conjointement, afin que les jeunes tirent une leçon, se développent et révèlent leur potentiel.

Christophe Mauny espère que ce dispositif, déjà mis en place dans 13 établissements d’enseignement de Montpellier, Lattes et Pérols, sera étendu au reste du département. 

Une œuvre collective

Le dispositif de responsabilisation se décline en trois journées chargées. “Le premier jour, les jeunes sont accueillis en compagnie de leurs parents, raconte Hakim Hocine, agent de prévention de la DDSP 34. Une discussion se lance alors afin de déterminer s’ils admettent leur faute et son caractère négatif et s’ils adhèrent à la sanction. La majeure partie du temps, les jeunes acceptent sans contrainte de participer au dispositif.” S’ensuit un moment de rappel du respect des règles. Celles-ci, souvent bafouées, sont expliquées en lien avec leur personnalité. “S’ils sont sportifs, je leur parle des codes qui régissent la discipline qu’ils pratiquent et créer un lien avec ceux qui règnent à l’école, explique Hakim Hocine. Je vais également revenir sur la faute qu’ils ont commise de manière personnalisée. S’ils ont allumé un feu, j’invite des pompiers pour qu’ils les éclairent sur le sujet. Ensuite on aborde la place de leurs parents dans leur vie.”

Le deuxième jour, le jeune travaille aux côtés de partenaires, comme le Secours populaire. “Ce moment permet de l’immerger, de le mettre au contact de la population”, définit le directeur de la DDSP 34, Yannick Blouin. La responsable du Secours populaire, Saïda Taachi, se dit très heureuse de recevoir ces jeunes : “J’ai vu des changements de comportement énormes, des caïds aider leur prochain, c’était touchant. Je me plais à leur faire prendre conscience de l’erreur qu’ils ont faite, ils arrivent même à l’avouer d’eux-mêmes. Quand ils aident les plus démunis en distribution, ils prennent conscience qu’il y a des choses plus importantes dans la vie. Cela leur est très utile, ils développent une volonté de rachat.

La troisième journée sert à établir ce que le jeune a retiré des deux jours précédents. Hakim Hocine les reçoit seuls, puis avec leur famille. “Durant cette journée où le jeune revient dans la structure, il est nécessaire de comprendre ce qu’il a appris et quels sont les changements. Ensuite, nous travaillons sur leur avenir”, termine Hakim Hocine.

Les jeunes grandissent

Ce dispositif porte ses fruits “pas pour tous, mais pour certains élèves, tout change en seulement trois jours. Je suis déjà surpris qu’ils me disent bonjour, car le bonjour adressé à un policier leur est très difficile. Quand ils le font, je sais que j’ai tout gagné”, confie Hakim Hocine. La proviseure de la cité scolaire Clemenceau, Sylvie Le Bolloch, explique ce qu’elle met en place pour favoriser le retour des jeunes dans ses établissements : “Souvent, ils n’ont pas d’objectifs et il est nécessaire de faire un point avec les parents. En trois jours, on constate une énorme prise de conscience. Évidemment, elle n’est pas immédiate et l’élève est toujours turbulent, mais cela a permis de mettre un stop et d’éviter que les choses s’enchaînent. La plupart des jeunes admettent avoir subi une sanction constructive. Seul 1 jeune sur les 14 jeunes que j’ai envoyés n’a montré aucune amélioration. Les autres se sentent valorisés. C’est très positif.”

“10 % d’entre eux sont revenus au Centre de loisirs des jeunes pour travailler avec nous. Je me rappelle même d’un jeune qui avait expliqué vouloir arrêter les études pour devenir guetteur à la Mosson. Après trois jours en notre compagnie à réfléchir à ce qu’il pourrait faire plus tard, il s’est lancé dans le Service National Universel (équivalent du service militaire) et a entamé son BAFA”, conclut fièrement Hakim Hocine.

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