Projet de décharge de Montblanc : exemple type du manque de transparence de l’administration
Dans un courrier adressé, le 19 avril 2007, par M. Sarkozy à un Président…
Dans un courrier adressé, le 19 avril 2007, par M. Sarkozy à un Président d’association de la région de Morlaix dans le cadre de sa lutte contre un projet de décharge de 20 ha on peut lire : « Je propose que la première des ruptures de notre politique écologique soit de mettre un terme aux craintes. La peur ne vient pas de la connaissance du danger. Elle vient du sentiment qu’ont les Français que la vérité leur est dissimulée, que les moyens d’expertise ne sont pas à la hauteur des risques et que, par voie de conséquence, les bonnes décisions ne sont pas prises.
C’est pourquoi je propose et j’exigerai que la transparence de l’information devienne la règle. C’est une nouvelle culture pour l’administration. C’est une nouvelle éthique pour la classe politique. C’est avant tout un devoir à l’égard des français.
D’ores et déjà, le pouvoir constituant a eu raison de donner au principe de précaution une valeur constitutionnelle… »
La procédure de lancement de cette demande de PIG pour le projet de Montblanc est à l’opposé de ce qu’écrit le Président de la république :
– arrêté du 27 juin d’un Préfet quittant la région le lendemain,
– maires des communes voisines et réellement concernées par les inconvénients pas informés,
– publication dans la presse la semaine du 15 août, semaine de pointe des vacances,
– affichage en mairie de Montblanc dans un couloir,
– pas d’affichage dans les zones habitées dans un rayon de 3 000 mètres,
– pas d’affichage dans les communes proches du site,
– pas de dossier dans les mairies des communes voisines,
– registre à remplir entre le 27 août et le 28 septembre, en pleine période des vendanges,
– forage dans l’astien sans avertir le syndicat intercommunal concerné,
– commune de Montblanc qui prend en septembre 2006, par hasard, la décision de ne pas accepter de décharge sur son territoire, prouvant par là même qu’elle était au courant du projet (sans en informer les montblanais) et préparant déjà la fausse excuse qu’elle n’y est pour rien, qu’elle est obligée d’accepter… 1,5 € par tonne entrant.
Cette façon d’agir est honteuse et indigne de la République. Elle a fait l’objet de notre intervention dans la cadre de la préparation du Grenelle de l’environnement et d’un courrier au Président de la République.
« Chez les autres » :
quand les bessanais s’opposent à un tel projet, certains leur reprochent de vouloir avant tout les mettre chez les autres. Dans l’agglomération Hérault Méditerranée et le Sictom il n’y a qu’une seule commune qui, solidairement, dans une décharge de classe 2 a accueilli les déchets d’Agde, de Vias, de Marseillan, les mâchefers fortement polluants des usines d’incinération obsolètes d’Agde et Pézenas (donc de toutes les communes du Sictom) et les encombrants du Sictom, c’est la commune de Bessan. Il ne faut pas l’oublier et il est logique que « les autres » assument à leur tour leur part de solidarité, mais pas hypocritement à quelques centaines de mètres de Bessan, dans une commune voisine.
« Qu’ont-ils fait ? »
Lors des premières réunions du Syndicat de l’Ouest renouvelé après les élections municipales de 2001, les dirigeants précédents étaient critiqués : « Ils n’ont rien fait, on a perdu des années pour traiter le problème des déchets…. ». Qu’ont fait les dirigeants actuels depuis 6 ans ? Autant que les précédents à tel point que le Préfet veut maintenant prendre un PIG pour enfin traiter le problème des déchets dans l’Ouest Hérault qu’ils n’ont pas résolu.
Argumentaire : Ce projet est critiquable sur les points suivants :
1 – La localisation du site : le projet fait référence à une étude du syndicat mixte de l’Ouest Hérault sur les sites potentiellement propices à la création de centres d’enfouissement. Dans ce projet le site de Bessan-Montblanc est classé en première position. Cette référence est très trompeuse car le site étudié n’est pas celui de la demande en cours, mais celui de la Garrigue Haute entièrement situé sur Bessan et en cours de réhabilitation.
Le projet situé administrativement sur la commune de Montblanc porte préjudice à deux communes qui n’ont pas eu droit à l’information préalable :
– la commune de Bessan par laquelle transitera un important trafic de camions dans le centre du village composé de petites rues,
– la commune de Vias, important centre touristique et dont les plus importants domaines viticoles (zone AOC) sont proches du projet : La Jourdane et Preignes.
Par contre les ressources du projet sont pour la commune de Montblanc qui ne subira pas ces nuisances directes. Il n’existe aucune route entre son centre ville et Montmarin (site du projet). Par contre les résidents des premières habitations de Bessan (dont une cave privée à quelques centaines de mètres du projet) n’ont pas été consultés et ne sont donc aucunement respectés.
2 – L’oubli des études antérieures : le site est proche des pistes de l’aéroport Béziers-Agde : ce qui n’a pas été pris en compte dans le dossier. Pas plus que les cartes géologiques établies pour le Syndicat mixte et le BRGM. La carte réalisée par la Safege Cettis pour le Syndicat mixte ne place pas le site dans aucune des zones géologiques dites « des plus favorables », mais dans une zone d’appellation d’origine contrôlée. Les cartes établies par le BRGM lors du précédent projet dans une zone voisine ne placent pas le site dans une des zones dites « favorables » aux centres d’enfouissement.
3 – Les besoins de la zone Ouest en matière de déchets à traiter : ils sont à géométrie variable dans le projet : 115 000 tonnes par an (en page 7), en page 9, 191 000 tonnes (addition des différentes origines), 199 493 tonnes selon le premier schéma. Environ 200 000 tonnes en page 105.
4 – Le non respect du plan départemental en ce qui concerne la valorisation des déchets. Selon la nature des déchets les objectifs de valorisation fixés par le Plan départemental d’Elimination des déchets sont de 25 %, 60 %, 45 à 75 % et 28 % pour 2010. Ce projet ne respectera pas ces objectifs : 200 000 tonnes entrant et 180 000 tonnes mises en décharge : la valorisation est donc limitée à 10 %. Le projet concernerait-il d’autres gisements de déchets ? De plus une partie des déchets de l’Ouest est déjà traitée dans d’autres centres : Béziers, Soumont, Vendres, etc… Le projet est volontairement surdimensionné pour faire de la seule garrigue de la région Agde-Béziers le dépotoir du département.
5 – La concertation préalable au dépôt du projet : a été inexistante. Elle est pourtant prévue par la loi. Comme est inexistante l’étude du préjudice subi par les viticulteurs (zone AOC).
6 – Le coût du traitement et la « note » pour le contribuable : absence totale d’indication. Il faudrait autoriser un projet totalement privé sans connaître le coût qui sera facturé aux contribuables dans la colonne « ordures ménagères » ! Où est l’intérêt général ?
7 – Qui est derrière ce projet ? Officiellement porté par une SARL de 5 000 € de capital et une SAS de 50 000 € de capital, domiciliées à Villeneuve lez Béziers mais dont le numéro de téléphone commence par 03. La société mère de ces deux boites postales est domiciliée dans le département de l’Aisne. En consultant les informations légales publiées, ce bureau d’études de 8 personnes et sa filiale accusent 98 % de dettes et présentent des charges d’exploitation sensiblement égales ou supérieures au chiffre d’affaires. Qui se cache donc derrière ? Peut-on déclarer d’intérêt général un projet réalisable par on ne sait qui ? En aucun cas cette petite entreprise ne pourra apporter les garanties financières nécessaires à ce genre de projet.
8 Le trafic routier : 75 camions par jour mais 150 trajets sur la petite route départementale 28 où les voitures doivent frôler les platanes lorsqu’elles croisent un camion. Combien de bouquets sur les platanes ? Un fort trafic de poids lourds sur cette route est très dangereux. Cette route est de plus fortement inondable sur plusieurs kilomètres (du Rouge Gorge à Coussergues en venant de Béziers et juste avant la Guinarde en venant de Bessan). La circulation des poids lourds dans Bessan est limitée du fait de l’étroitesse des rues. Peu de camions emprunteront les routes du village habité de Montblanc. C’est pourtant cette commune qui encaissera 1,5 €/tonne de déchets.
9 – Danger pour la nappe astienne : l’eau est un bien précieux et nous risquons d’en manquer à terme. A quoi bon placer une décharge de cette importance juste au dessus. Les dangers pour la nappe sont largement sous évalués. La mise en place d’un SAGE pour protéger cette nappe d’eau naturellement potable, vaste et sensible n’est pas compatible avec un projet de décharge géante. De plus un forage a été réalisé dans la nappe astienne sans l’autorisation du syndicat concerné ; cela dénote une pratique qui ne manquera de se reproduire en cas d’autorisation.
10 – Faune et flore : où est passée l’espèce protégée (une fougère) du projet de 1993-94 qui avait conduit à réduire de moitié la superficie totale du projet. Pas un mot dans le dossier. Au contraire, affirmation qu’il n’y en a pas.
Cette fausse affirmation, l’absence des coûts, la référence à une étude d’un autre site, l’oubli des cartes géologiques antérieures, le danger pour la nappe astienne, la faible lisibilité de la société, le non respect des exigences de valorisation du Plan département font que ce dossier est inacceptable et ne correspond en aucun cas à l’intérêt général.
Des solutions. On nous dira « il faut bien les mettre les déchets quelque part ». C’est certain mais les décideurs s’obstinent à ne considérer que des projets de grande envergure. Les parcs à ressources (petites zones d’activités – à l’échelle d’un gros canton ou de plusieurs petits – traitant la récupération, le recyclage, le compostage, la revente des objets récupérés remis en état et du compost..), et les décharges d’inertes limitées aux cantons sont systématiquement oubliés. C’est pourtant la solution acceptable pour l’environnement et les populations. Elle serait moins coûteuse et créerait davantage d’emplois que ce qui est proposé à Montblanc.
Il manque surtout la volonté politique de la mettre en œuvre. La seule volonté politique actuelle consiste à mettre les déchets sur le territoire des petites communes dans de gigantesques centres de stockage ou incinérateurs.
Roland Fontaine
Conseiller municipal
Co-président de Bessan Environnement