Quelle est la valeur juridique des « foires aux questions » rédigées par l’Administration ?
Dans un arrêt récent, le Conseil d'Etat précise qu'une « foire aux questions » mise en ligne sur un site gouvernemental ne constitue pas une circulaire administrative.
Qui n’a pas un jour été confronté à une incompréhension administrative ? Déclaration d’impôt, retrait de points, voire annulation du permis de conduire, ou encore problèmes de scolarisation… l’administration est présente dans chaque aspect de la vie quotidienne. Souvent démuni face à la bureaucratie et au « mille-feuille administratif », on peut être tenté de chercher la réponse à une question sur un moteur de recherche, pour inévitablement atterrir dans l’onglet « Questions-réponses » d’un site internet gouvernemental.
Le contenu de ces onglets est bien évidemment rédigé par les ministères concernés. Ils ont pour but de répondre, dans des termes compréhensibles, aux questions les plus fréquemment posées par les internautes. Mais que se passe-t-il si un administré se retrouve dans l’illégalité après avoir pourtant suivi de bonne foi les prescriptions énoncées par une administration dans une « foire aux questions » (FAQ)?
Tel était le cas d’un individu qui avait adopté le comportement prescrit par l’administration fiscale dans une FAQ. Toutefois, l’administration s’était trompée, et des erreurs juridiques s’étaient glissées dans la réponse sur laquelle il s’était basé. A qui la faute ? « A l’Administration », serait-on tenté de dire… Ce n’est pourtant pas la réponse qu’a retenue le Conseil d’Etat.
Pas de recours pour excès de pouvoir
Dans un arrêt du 17 mai 2017 ( n° 404270), il précise que le document rédigé sous la forme d’une FAQ et dans lequel se trouvait, en l’espèce, la réponse contestée, « ne constitu[ait] pas une circulaire administrative s’adressant aux services fiscaux ». La FAQ est simplement destinée « à présenter aux contribuables, pour les aider dans leurs démarches, les modalités pratiques du dispositif […] en répondant à diverses questions juridiques et pratiques qu’ils sont susceptibles de se poser. Ce document, qui se borne à renvoyer, sans s’y substituer, aux circulaires ministérielles encadrant l’action de l’administration fiscale […], ne peut être regardé comme étant au nombre des prises de position de l’administration pouvant lui être opposées par un contribuable ».
Et le Conseil d’Etat de poursuivre : « le document attaqué ne contient aucune disposition impérative à caractère général et, alors même qu’il comporterait des énonciations réitérant une règle qui serait contraire à une norme supérieure, les énonciations contestées de cette FAQ ne sont pas susceptibles de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir ».
Par cette décision, le Conseil d’Etat cherche à limiter les recours contre les administrations en responsabilisant les administrés. Face à des questions pointues, il les incite à avoir recours à des professionnels (avocats, comptables, etc.) plutôt que d’y répondre par eux-mêmes. Ceci étant, alors même que les pouvoirs publics prônent la transparence et la sécurité juridique, il est permis de s’étonner que des questions / réponses rédigées par un ministère n’engagent pas l’Administration !
Nicolas TAQUET, juriste