Valorisation du Domaine des Orpellières à Sérignan : l’œuvre magistrale de Dado rouvrira au public

L’Agglomération Béziers Méditerranée entreprend la valorisation du domaine des Orpellières, investi par l'artiste Dado de 1994 à 1997, pour l’ouvrir au public, dans le cadre d’un projet global de mise en valeur du site naturel des Orpellières (classé zone Natura 2000) et des œuvres de Dado.

Si la Maison du Chaos n’existait pas déjà aux environs de Lyon, le domaine des Orpellières, situé à Sérignan, aurait pu mériter ce surnom. De 1994 à 1997, l’artiste monténégrin Dado, décédé depuis, a investi cette ancienne cave viticole à la demande du maire de l’époque, pour en faire un lieu dédié à l’expression de son ressenti face aux horreurs de ce monde. Peinture rouge dominant sur les murs comme du sang, carcasses de voitures pendues tels des êtres humains, faux ossements… un constat terrible.

Vingt ans plus tard, l’Agglomération Béziers Méditerranée entreprend la réhabilitation de ce lieu pour l’ouvrir au public, dans le cadre d’un projet global de revalorisation du site naturel des Orpellières (classé zone Natura 2000) et des œuvres de Dado. 

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Le chaos Dado

Dado, de son vrai nom Miodrag Djuric (né en 1933 et décédé en 2010), était un artiste traumatisé… A dix ans, au Monténégro, au détour d’un chemin, il se trouva nez-à-nez avec les corps en décomposition de deux hommes pendus pour leurs opinions révolutionnaires. La Yougoslavie d’alors ne pardonnait aucun écart, même de langage. A l’âge de 17 ans, ce fut au tour du jeune Dado de subir les foudres de la répression orchestrée par Tito : il fut emprisonné pendant quelque temps pour avoir critiqué le pouvoir en place. Exilé à Paris en août 1956, il fit une rencontre décisive avec Jean Dubuffet, chantre de l’Art Brut, qui lui présenta son galeriste, Daniel Cordier, lequel exposait
les plus grands artistes de l’époque : Rauschenberg, Dubuffet, Fahlström… Une carrière internationale s’ouvrit alors à lui dès 1962.

Ses modes d’expression étaient multiples : dessin, peinture, gravure, collage, sculpture, céramique… Et son art était et reste reconnu par les plus grands musées d’art contemporain, notamment le Centre Pompidou à Paris.

Chez Dado, chaque couleur était lourde de signification, chaque objet collecté faisait appel à des souvenirs de guerre civile, chaque trait était un manifeste.

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Dado aux Orpellières, une œuvre magistrale in situ

De 1994 à 1997, l’artiste Dado, dont la renommée était déjà internationale, a redonné une nouvelle vie au mas central du domaine des Orpellières, à Sérignan-Plage, propriété du Conservatoire du Littoral. Dans l’ancienne cave de ce domaine laissé à l’abandon, il a livré la représentation qu’il se faisait du monde : à la fois torturé et en pleine déchéance… Les couleurs vives, voire agressives, qui recouvrent les murs et les piliers du site, et l’imagerie cauchemardesque qui y prédomine, évoquent la rudesse de la vie, sa violence. Les objets accumulés également (carcasses de voitures, ossements géants…). Aux Orpellières, son œuvre, contemporaine, vibrante et effrayante, interroge la société actuelle sur ses principes, sa violence, et met en avant ses laissés-pour-compte…

En 2011, évoquant ce lieu, Hélène Audiffren, alors directrice du musée de Sérignan, disait : « Les fresques, réalisées sur des tags anonymes, figurent des personnages monstrueux, corps mutilés et souffrant, des gueules béantes et yeux globuleux, des organes disséminés, des pantins gesticulant, des visages figés dans une vraisemblable douleur. Eparpillés dans l’espace, des voitures ossuaires, une collection de squelettes, des poupées démantibulées participent à cet univers d’une force créatrice incroyable, à la fois atroce et émouvant. Commencée au moment de la guerre des Balkans, cette œuvre est un véritable manifeste qui dénonce l’horreur de la guerre. Dado a composé un manuscrit ouvert sur la violence du monde, une sorte de Guernica en couleur ». 

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Une réhabilitation complexe

La réouverture au public du mas des Orpellières nécessite plusieurs préalables, selon Sandra Patron, l’actuelle directrice du Musée régional d’art contemporain de Sérignan. Tout d’abord, elle estime qu’il faudra procéder à une étude de prévention et de conservation du site. De plus, les ayants droit de Dado devront être consultés. Car si le mas des Orpellières appartient au Conservatoire du Littoral – ses façades intérieures peintes incluses –, la question de la propriété des œuvres laissées sur place est plus délicate. Et, la volonté de Dado étant de laisser ses œuvres vieillir et se déliter, faut-il réellement réaliser des actes de conservation, ou se contenter d’agir en prévention ? Ses ayants droit auront sans doute le dernier mot. Mais leur volonté semble en tout cas de faire profiter le public de l’art de Dado. Catherine Dumont, de la Direction régionale des affaires culturelles, soulève un autre problème : celui de l’authentification des œuvres, puisque Dado a peint sur des graffitis, et qu’il y a eu de multiples recouvrements. Mais pour les connaisseurs de Dado, et pour les personnes qui étaient présentes lorsqu’il a investi le lieu, les peintures sont caractéristiques de l’artiste. D’autant que Dado a été le dernier à intervenir sur le lieu, qui a ensuite été sécurisé et protégé par des grilles et la présence d’un gardien.

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Quelle que soit sa forme définitive, cette valorisation des œuvres de Dado, dans un site naturel protégé à couper le souffle, est incontestablement une bonne nouvelle pour le public et le milieu de l’art.

 

> Pour en savoir plus sur Dado, visitez son anti-musée virtuel sur www.dado.fr/

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