Entreprises

La France fait-elle vendre ?

La France représente-t-elle un argument de vente vis-à-vis des étrangers ? Pays de râleurs, du luxe ou de la gastronomie, son image sert aux marques d’entreprises, qui la nourrissent à leur tour... Débat récent, au ministère de l’Economie.

« Paris vous aime. » Impossible, pour les cohortes de voyageurs qui débarquent à Roissy, de rater le message, répété et illustré par de grands visuels de la Capitale, le long des couloirs de l’aéroport. Tout un symbole de la manière dont une entreprise peut s’appuyer sur l’image du pays et, à son tour, la nourrir…

Le 10 juillet, à Bercy, l’Association des agences-conseil en communication (AACC) et l’Union des annonceurs (UDA) organisaient une matinée consacrée au « pouvoir économique des marques ». C’est dans le cadre d’un débat sur « Marque France : la France qui attire » que plusieurs entrepreneurs, dont Augustin de Romanet, PDG du groupe Aéroports de Paris (ADP), ont témoigné des relations complexes entre l’image de la France et celle de leur entreprise. Orly et Roissy représentent « la première vitrine de la France. Nous sommes la porte d’entrée du pays, et nous nous devons d’être le porte-parole de tout ce que la France fait de mieux », explique Augustin de Romanet. Une obligation qui guide la stratégie du groupe : le dirigeant a dû renoncer à son idée de développer une implantation de boutiques de milieu de gamme dans l’aéroport, pour rester sur une offre positionnée sur le luxe, que préfèrent les clients. Apparemment, l’image de la France, dont les voyageurs ont envie d’emporter un souvenir dans leur valise, est indissociable de celle du luxe…

« La fertilisation avec la marque Paris est évidente », confirme pour sa part Grégoire Champetier, directeur général adjoint aux affaires commerciales et à la stratégie client de Disneyland Paris. Pour lui, le mélange entre les marques de Paris et Disneyland est « très heureux ». Pour autant, alors qu’une marque comme McDonald’s est parvenue à s’implanter dans le pays en se transformant, « aujourd’hui, la force de Disney est d’être restée, dans son intégrité, liée à l’imaginaire de Broadway, Hollywood… », estime Grégoire Champetier. Avec les attentats du 13 novembre 2015 au Bataclan, la fréquentation du parc, très liée à l’image de Paris, a fortement diminué. Mais « depuis quelques mois, il y a une dynamique formidable. Nous rattrapons une clientèle », constate-t-il.

« Un jour, les Chinois feront de très grandes marques de luxe »

Pour Grégoire Champetier, l’image d’une France paralysée par les grèves n’a pas vraiment eu d’effet négatif sur l’activité. « Nous avons une très grande confiance dans le potentiel de développement de ce parc. La perception de la France a évolué. Auparavant, il existait un sentiment de défiance dans les milieux politiques américains, mais aujourd’hui, ils doivent faire face à leur propres problèmes. Les Californiens, par exemple, ne sont pas fiers… Chez les clients, le mécanisme systématique des grèves a été intégré : ils font contre mauvaise fortune bon cœur en considérant cela comme un comportement un peu adolescent, qui fait partie d’une culture… Les étrangers l’ont compris plus qu’on ne le pense. Ils ne sont pas dans le ‘ French bashing ’, mais dans une attitude plus distanciée », explique-t-il.

Les enjeux concernant l’image de la France sont bien différents pour une marque historique comme Guerlain, parfumeur né en 1828, qui exporte aujourd’hui dans le monde entier. « Nous sommes conscients du fait que nous avons une maison qui fait un peu partie du patrimoine national. Nous avons la responsabilité de le préserver mais aussi de le transmettre et de le développer », explique Laurent Boillot, PDG de l’entreprise. Ici, lorsqu’on évoque le patrimoine, il ne s’agit pas seulement d’image, mais aussi de savoir-faire, de métiers artisanaux qui risquent de se perdre. « Si nous ne protégeons pas nos filières, la qualité des produits sera remise en question (…). Il ne s’agit pas d’une coquetterie », insiste Laurent Boillot. Etre une entreprise patrimoniale ne constitue pas non plus un acquis de toute tranquillité : il faut éviter le risque de s’enfoncer dans une vision « poussiéreuse » du patrimoine. La marque France doit rester « connectée au monde », poursuit le dirigeant. Car la concurrence va arriver. D’après lui, puisant dans leur culture et leur art pluriséculaires, « un jour, les Chinois feront de très grandes marques de luxe ».

Anne DAUBREE

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