Le musée de Lodève accueille la collection picturale de Lucien ARKAS
Certaines rencontres sont cruciales en matière d’art. Rencontre d’un artiste avec un marchand d’art…
Certaines rencontres sont cruciales en matière d’art. Rencontre d’un artiste avec un marchand d’art ou un collectionneur, d’un artiste avec une muse ou d’une conservatrice de musée et d’un collectionneur… C’est ce dernier cas de figure qui est à l’origine de la nouvelle exposition d’hiver du musée Fleury de Lodève. La conservatrice du musée, Ivonne PAPIN-DRASTIC, a en effet fait la connaissance en 2012, en Turquie, d’un grand armateur collectionneur d’art (tapis, verreries, peintures…), qui est notamment à la tête d’une collection de 1 300 tableaux, dont un grand nombre de chefs-d’œuvre. L’armateur a accepté de lui en prêter une soixantaine, le temps d’une exposition entièrement dédiée à sa collection. Un délice visuel ! A voir jusqu’au 30 mars 2014.
« Me défaire d’autant d’œuvres même temporairement, c’était pour moi comme donner ma fille à marier. Ma collection n’avait jamais quitté Izmir, où ma famille demeure depuis trois générations, et encore moins les frontières de la Turquie. Il a fallu toute la force de persuasion d’Ivonne PAPIN-DRASTIC pour que j’accepte cette idée. Sans elle, cette exposition n’aurait jamais eu lieu »… Ces mots du Français Lucien ARKAS donnent la mesure de son attachement au pan occidental de sa collection picturale, qui débuta il y a une quinzaine d’années par l’achat du Port de Saint-Mandrié, de KISLING. Le conseiller au commerce extérieur pour la France en Turquie avoue qu’il n’aurait jamais pensé que sa collection, basée sur sa passion pour l’art et non sur un aspect commercial, prendrait un jour une telle ampleur. Il ne s’est jamais séparé d’un seul de ses tableaux, alors qu’une seule vente – notamment du portrait de madame Thurneyssen par RENOIR – pourrait générer une appréciable plus-value.
Aux cimaises du musée Fleury, Ivonne PAPIN a souhaité faire figurer des chefs-d’œuvre de peintres reconnus, notamment signés par RENOIR, VUILLARD, VAN DONGEN… mais également des tableaux de très grande qualité peints par de quasi-inconnus. Car c’est l’une des caractéristiques de la collection ARKAS : elle ne se focalise pas uniquement sur les maîtres de la peinture et laisse sa chance à des artistes moins importants, mais tout autant talentueux.
Ainsi, le parcours muséal, scindé en quatre sections – les portraits, les nus, les paysages et les scènes de genre – recèle de véritables petits bijoux picturaux. Comment ne pas tomber en admiration devant la jeune femme espiègle de Chut, de Pierre-Auguste COT, ou devant le Portrait de Mary Louis Mc Bride par le Belge Louis BUISSERET, plein de délicatesse dans le travail des étoffes et l’expression du personnage ? Et bien évidemment, on fond devant les splendeurs des représentants du post-impressionnisme, des Nabis, du fauvisme et du cubisme de seconde génération exposés aux cimaises du musée. Comme la magnifique Femme aux bijoux de VAN DONGEN, l’intime mais monumentale Lecture (œuvre luministe) de DE SMET, ou encore l’impressionnant Mme Gillou chez elle de VUILLARD, où la perspective nous fait quasiment plonger dans le salon de cette collectionneuse… L’exposition s’achève sur la Nature morte à la théière noire de BRAQUE, réalisée pendant la guerre dans une palette sombre. Un seul regret, on aurait aimé admirer la dernière acquisition de Lucien ARKAS, un nu de Foujita que la conservatrice convoitait, mais les délais de préparation de l’expo ne l’ont pas permis.
Virginie MOREAU
> Musée Fleury – Square Georges-Auric – 34700 Lodève – Tel. : 04 67 88 86 10
> Exposition visible du mardi au dimanche, de 10h à 18h, jusqu’au 30 mars 2014.
Légende du visuel : Mme Gillou chez elle ou L’accord parfait par Edouard VUILLARD. 1932-33.