Patrimoine — Sète Agglopôle Méditerranée

Poussan : les Capitelles, un patrimoine à découvrir et à conserver

Une Capitelle est une cabane en pierre sèche, c’est-à-dire sans mortier, servant autrefois d'abri temporaire à de petits propriétaires, à leurs outils et à leurs produits agricoles dans les anciennes garrigues.

En référence au plan de gestion des collines de la Moure, Sète Agglopole Méditerranée a organisé fin juin, une visite des Capitelles de Poussan pour découvrir le patrimoine vernaculaire des garrigues. Le patrimoine ‘vernaculaire’, « c’est le patrimoine des garrigues, le patrimoine des pierres sèches », précise Philippe de Montredon, service espace naturel et agricole de l’Agglomération. Il s’agit de permettre de mieux connaître ce patrimoine, de mieux le protéger, et mettre en valeur le travail réalisé par les associations. « C’est aussi un moyen de transmettre aux jeunes générations et de mobiliser certains jeunes pour qu’ils rejoignent ces associations. Les jeunes connaissent mal leur patrimoine, leur garrigue ou le patrimoine de leur village », précise-t-il.

Un patrimoine représentatif

Laurent Fabre, responsable du patrimoine et de l’archéologie préventive de l’Agglomération, a commenté la visite : « nous sommes ici sur un espace qui mêle le patrimoine naturel et culturel. L’un ne va pas sans l’autre, l’entretien du parcellaire, des murets, participent aussi à maintenir une certaine biodiversité. Par le biais des ressources qui sont exploitées comme les pierres sèches, on redéfinit des paysages. L’action humaine permet de maintenir ce modelage des paysages, ce qui est très important. Paysages qui aujourd’hui ont une valeur patrimoniale certaine, tant pour les touristes que pour les usagers. Le travail est aussi réalisé dans les parcelles. »

« Ici, nous avons des paysages de qualité, des paysages anciens qui datent du 11e siècle. Ces paysages sont liés à une certaine forme de foresterie, d’agriculture, de pastoralisme, avec des signatures : ces murets, ces cabanes, ces Capitelles qui forment une trame très identitaire au territoire. Ces zones ont basculé aujourd’hui sur des intérêts touristiques, de balades en nature. Nous sommes passés d’un patrimoine culturel à un patrimoine naturel. La question d’un inventaire se pose effectivement, car nous avons des personnes très impliquées, et il nous faut un vocabulaire commun et pouvoir définir les différentes formes de ces petits paysages dont l’architecture peut signer de grandes architectures. Le service patrimoine de l’agglo est ravi de pouvoir participer et soutenir toutes les bonnes volontés qui vont entretenir ces paysages et leurs alentours, dont la biodiversité (elle aussi une signature pour les paysages de qualité). Notre travail est là, nous nous rendons disponibles. Nous avons également décliné avec les écoles sur la thématique des paysages nourriciers, » détaille Laurent Fabre.

L’homme présent depuis 8 000 ans

Laurent Fabre raconte : « ce parcellaire peut avoir des origines très anciennes. L’homme occupe ce type d’espace, qui est une forêt de chênes au départ (confirmer par l’archéologie), depuis 8 000 ans. On sait que sur nos massifs forestiers, nous avons une implantation avec une culture néolithique, et on va voir des limites se créer notamment en pierres sèches qui limitent de grandes parcelles et des habitats perchés, ainsi que des signaux de tertre funéraire (dolmen, menhir…) qui font référence à des situations particulières où l’on exploitait des ressources sur le lieu même. On était dans des formes de culture type agro-sylvo-pastoralisme, au travers de la forêt, on faisait à la fois de l’agriculture et du pastoralisme. À l’âge du fer, avec les outils de plus en plus performants, la dynamique forestière subit alors une transformation plus profonde où la forêt de chênes va se transformer en une forêt de plus en plus verte. À ce moment-là, on a de plus en plus de rotation de culture à des échelles humaines. Les parcelles agricoles s’étendent au maximum sur 1/5 d’hectare pour pouvoir être exploitées correctement par un homme et un animal. Cela commence à structurer ces espaces, notamment pour les dynamiques végétales qui s’installent. La ressource principale recherchée dans ces espaces est le combustible : dans l’antiquité, l’archéobotanique a démontré qu’on faisait des coupes à très courte révolution chaque 12 ans, sur de toutes petites parcelles, ce qui donnait une mosaïque de micropaysages, amenant une certaine biodiversité. Vers le 2e siècle, l’habitat va basculer en plaine (viticulture…), mais ces espaces restent importants pour la ressource en bois et pour le pâturage. Il va falloir attendre ensuite le 11e, 12e siècle pour revoir une installation type paysanne sur ces zones. Ces zones, abandonnées peu à peu vont également connaître des transformations profondes par le biais du climat. Ce sont ensuite les proto-industries qui s’installent en garrigue pour fabriquer le charbon de bois, la chaux, puisque c’est là que se trouve le combustible et que l’on peut utiliser les pierres. Cela durera jusqu’au 17e siècle. Ensuite, ce sont les usages qui priment : le droit d’usage de tailler les arbres a donné la forme à sa physionomie. La révolution industrielle et la découverte du charbon de terre font que ces espaces sont peu à peu abandonnés. Au cours du 19e, ces petites zones sont réinvesties à partir des villages pour une agriculture de type familiale. Nous avons la plus grande trace de ces paysages-là aujourd’hui. »

Une « somme de patience »

Le président de l’association Pierres et Chemins de la Mourre, Philippe Stein, explique « il faut venir voir, se rendre compte du travail et de la somme de patience de notre intervention. »

Philippe Stein détaille : « nous avons encore beaucoup de travail devant nous. J’aimerais partager cette passion avec de nouvelles personnes. Le travail du caillou, c’est un travail de passion. C’est contraignant, mais cela reste très satisfaisant quand on voit le résultat. Le visuel du rendu en vaut la peine. Nous essayons de promouvoir cette passion de restaurer le patrimoine et nous sommes ravis, car une première femme nous a rejoints ! Nous venons régulièrement sur place. Nous ne sommes pas des professionnels, nous sommes des gens de bon sens et de pratique. Nous ne touchons que ce qui s’est effondré, nous ne construisons rien. Nous respectons ce qui était déjà présent, nous le faisons avec cœur. Cela fait déjà 10 ans que nous y sommes, nous nous bonifions. »

Une promesse de campagne

Florence Sanchez, maire de Poussan explique qu’elle « est ravie d’accueillir le groupe sur le site de l’ancienne Oliveraie, car c’est une véritable volonté politique de l’équipe municipale de restaurer et de mettre en valeur le patrimoine naturel que nous avons sur la commune. Nos élus travaillent beaucoup sur ce sujet et nous avons la chance d’avoir sur la commune une association qui travaille à cela depuis de nombreuses années. Leur travail est remarquable, j’en profite pour les remercier. L’association a travaillé, les chasseurs sont aussi venus nous aider et les citoyens également. Nous prévoyons d’ailleurs de mettre en place de nouvelles journées citoyennes pour continuer à entretenir le lieu et le faire vivre. J’espère que ce travail sera mis en valeur, notamment par des circuits de balades et de patrimoine qui pourront être réalisés par les différents partenaires. Nous allons travailler dans ce sens-là. »

Capitelles001
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La maire précise que « c’était une promesse da campagne. Nous avons autour de Poussan tout le travail qui a été réalisé par l’association. Nous avons tout un parcours promenade qu’ils ont fait bénévolement, en restaurant plusieurs Capitelles. Nous y amenons les scolaires, les habitants, notamment lors des journées du patrimoine. On aimerait pouvoir le développer et le mettre en valeur : par des circuits de visite, avec peut-être des dégustations… C’est très important pour notre équipe municipale. Nous avons également créé la première fête de la nature au cours de laquelle nous avons fait une initiation pour remonter les murs en pierres. Nous essayons d’intéresser les gens, de toucher différentes générations. Nous allons également mettre en place le permis citoyen pour les jeunes : la commune finance le permis en échange d’heures, cela pourrait être des jeunes que l’on investit dans l’association, qui vont l’aider ? Nous y réfléchissons, car nous avons un joli patrimoine architectural et naturel sur la commune à offrir. »

Des élus pleins de projets

Michel Garcia, vice-président de Sète Agglopole Méditerranée, détaille « venir ici, c’est souligner ce travail réalisé sur la commune de Poussan, c’était une promesse de campagne de Florence, promesse tenue. Au niveau de l’agglomération, on s’aperçoit de cette richesse de la pierre sèche et de tout le patrimoine vernaculaire dans son ensemble, que l’on aimerait non seulement préserver, mais également mettre en valeur et avoir ce devoir de mémoire et transmettre ce savoir-faire. Nous voulons mettre en place toute une politique au sein de collines de la Moure et de la Gardiole sur ces objectifs. Nous pourrions peut-être même susciter une passion chez certains jeunes qui permettrait de maintenir ce patrimoine à l’échelle du territoire. 3 associations sont présentes sur ce thème sur l’agglomération : Pierre d’Iris à Loupian, Pierres et chemins de la Moure à Poussan et le Cercle de Recherche sur le Patrimoine Montbazinois. Cela fait 8 mois que nous travaillons avec ces 3 associations pour démarrer un projet. Nous commençons par créer un inventaire afin d’avoir les mêmes mots pour les mêmes choses. Ensuite, nous rentrerons dans ‘l’action’ : rénover et remettre en état du patrimoine qui le mérite et qui peut être remis en place. Nous avons également parlé de faire du social avec ce patrimoine : associer la MLJ, faire découvrir à ces jeunes ce vrai métier de la pierre sèche. »

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