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Sète : Bad Georges, une méchante société de design passe au mixeur la culture sétoise

La marque, connue pour ses affiches touristiques décalées et ses divers textiles, a gagné le cœur des gens du cru en valorisant la culture sétoise dans un esprit décalé. Elle cherche aujourd’hui à élargir ses horizons.

Tout le monde aime Georges. Qu’il soit Brassens ou mauvais, l’iconique moustachu, qui cassa sa pipe il y a plus de quarante ans, reste bien vivant dans les mémoires de Sète et de Navarre. Ce n’est donc pas un hasard si le graphiste Christopher Dombres, originaire de l’île Singulière, a fait de son image l’égérie de sa petite fabrique artisanale sétoise d’affiches et de textiles, la bien nommée Bad Georges. Fan sincère du chanteur, il s’est imaginé son destin s’il n’avait pas rejoint celui de la chanson française jusqu’au firmament pour développer l’esprit de sa marque. A coup sûr, l’auteur de Je suis un voyou en serait devenu un. “J’ai fait une première campagne d’affiches pour montrer Brassens tel qu’il aurait été, sans arrière pensée commerciale”, se remémore le graphiste qui a fondé la marque en 2014 avec le sérigraphiste Bastien Garnier.

“Je détourne le travail des autres”

Le quinquagénaire n’en était pas à son coup d’essai artistique. Montée à Paris dans les années 1990, à la manière d’un Brassens partant conquérir la capitale, Christopher Dombres a travaillé comme illustrateur de presse (Libération, notamment) et dans la pub avant de faire décoller la marque Kulte grâce à ses visuels baignés dans l’univers suave des seventies et teintés de provocation. “Mon modèle, c’est Oliviero Toscani, l’ancien directeur de Benetton”, explique l’artiste. Enfant de la pub biberonné à l’anti-consumérisme tendance “No logo, la tyrannie des marques”, ouvrage culte de Noami Klein, Christopher Dombres aime particulièrement détourner les codes pour distiller ses idées un brin provocatrices. “Mon style est un non-style, dit-il. Je détourne le travail des autres, je ne calque pas directement ce que font les autres mais je m’en inspire fortement et je rajoute mon truc à moi. En fait, je fais ce que tout le monde fait sauf que moi je le dis.”

Brassens version Mesrine

Un principe qu’il transposa sur Bad Georges de retour au bercail sétois. Armé de colle, il a plaqué des affiches façon avis recherche d’un Brassens imaginaire dans la même pose que celle de Jacques Mesrine en couverture de Libération en 1979. Une campagne d’affichage qui ne passa pas inaperçue et qui marqua le lancement de la marque au logo en forme de pouffre (animal totémique de Sète) squelettique et d’une tête de mort moustachue. Un visuel singulier pour représenter l’âme d’une île qui ne l’est pas moins.

Le premier visuel de Bad Georges, à gauche © Cyril Durand.
Le premier visuel de Bad Georges, à gauche © Cyril Durand.

L’identité sétoise au mixeur

Car Bastien Garnier, maître ès sérigraphie, et Christopher Dombres passent au mixeur de leur atelier de la rue Gabriel-Péri les marqueurs de l’identité sétoise, mélangeant les références à la culture pop et l’esthétique vintage des années 1960 et 70 dans un patchwork propre à parler au plus grand nombre selon un angle décalé. “C’est représentatif de l’esprit rebelle de la ville.” Portrait de Paul Valéry, macaronade, joutes, Brassens (évidemment), expressions locales… Tout y passe et les visuels font mouche. “Je ne suis qu’un intermédiaire de diffusion des images, estime Christopher. Pour Sète, j’étais obligé de prendre des trucs rétro, c’est la seule façon de ne pas trop se heurter au copyright mais c’est aussi une histoire d’identification, parce que ce sont des images toujours présentes dans la mémoire collective.”

Exemple d'affiches © Bad Georges.
Exemple d’affiches © Bad Georges.

“Sortir l’affiche touristique du ghetto de la carte postale”

Ils sortent ainsi des sérigraphies en séries limitées, numérotées, avec un objectif : “Sortir l’affiche touristique du ghetto de la carte postale.” Pari gagné. En quelques années, la marque est devenue une référence, déployant petit à petit ses visuels sur des tee-shirts, sweats et autres textiles ainsi si que sur les affiches d’événements culturels phares de la région (Rockstore, ImageSingulières, Centenaire de Brassens…) à l’occasion de collaboration ponctuelle. Illustration du travail de Bastien Garnier dans son atelier de sérigraphie :

Un succès d’estime indéniable

Les plus observateurs remarqueront son empreinte dans plusieurs fictions tournées dans la ville (Zaï Zaï Zaï Zaï ou Demain nous appartient…), les médias ou sur le dos de célébrités locales, ayant les faveurs du milieu culturel. Un succès d’estime indéniable, mais malheureusement pas synonyme de réussite commerciale. “Nous avons une belle clientèle mais pas assez nombreuse, observe Bastien Garnier. Nous avons conquis le public, on fait partie du paysage sétois local mais en réalité, financièrement , nous sommes juste à l’équilibre. La marque nous sert de vitrine pour nos activités respectives, lui en graphisme et moi en sérigraphie”, explique Bastien Garnier, gérant de la société et de l’atelier Brise lame par ailleurs.

“On cherche à faire découvrir la marque ailleurs”

Pour que vive Bad Georges, les deux artisans d’art doivent structurer le versant commercial de leur petite entreprise et partir à la conquête de nouveaux horizons. “On cherche à faire découvrir la marque sur le Cap d’Agde et au national. On revendique d’être de Sète”, souligne Christopher Dombres, “mais la on commence à avoir fait le tour”, poursuit Bastien Garnier. Surtout que nous, on a démarré avec le secteur touristique de l’affiche souvenir et qu’aujourd’hui, il y a une forte concurrence qu’il n’y avait pas au début. Il y a pleins de sites marchands qui vendent de l’affiches imprimées en numérique, moins cher mais sans âme”.

“Les gens ne comprennent pas pourquoi nos affiches sont si chères, mais il y a une démarche artistique, ça raconte quelque chose et elles sont faîtes à la main. Il y a un vraie investissement personnel, souligne Christopher. Il faut que l’on soit plus reconnu comme une marque d’art.” Une bonne réputation qui n’est plus à faire sur l’île Singulière.                          

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