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Congrès du notariat - Des propositions équilibrées pour mieux sécuriser la propriété immobilière

Réunis à l’occasion de leur 112e Congrès, les 3 000 notaires présents à Nantes…

Réunis à l’occasion de leur 112e Congrès, les 3 000 notaires présents à Nantes ont adopté une quinzaine de propositions pour améliorer le cadre juridique de la propriété immobilière. Les quatre commissions ont voulu le rendre plus équilibré et sécurisé. Sans oublier de faire œuvre créatrice.

 

Conséquence de la forte hausse des prix de l’immobilier depuis une quinzaine d’années, le logement constitue le premier budget de dépenses des ménages. En première ligne sur cet enjeu sociétal, les notaires doivent répondre aux demandes de leurs clients. C’est pourquoi ils ont consacré leur 112e congrès à la propriété immobilière et adopté 15 propositions d’améliorations législatives ou réglementaires, votées, pour la première fois, par les 3 000 notaires présents dans la salle via des boîtiers électroniques. « La propriété est devenue un droit subjectif ; une situation d’équilibre social souvent fragile entre les droits et les devoirs de chacun, après un arbitrage politique », a souligné Pierre-Yves Sylvestre, président du 112e congrès. « C’est l’objet des travaux de notre congrès que d’analyser et de réduire autant que possible les fractures qui existent entre la propriété privée et l’intérêt général. » Le droit de propriété a tout d’abord besoin d’être rafraîchi. Depuis 2012, la Cour de cassation a insufflé un vent de liberté en matière de démembrement du droit de propriété. « Il est désormais permis de créer de nouveaux droits réels dont le régime juridique et la durée pourront être conventionnellement définis », a expliqué François Devos, rapporteur général du congrès de Nantes.

Créer le bornage translatif

La première commission, dénommée « Etablir et protéger la propriété immobilière », a formulé des propositions dans ce sens. Elle s’est notamment attelée au bornage, qui délimite la surface d’une propriété. Pour en sécuriser les effets, elle propose d’ajouter deux alinéas à l’article 646 du Code civil. Le bornage serait alors officiellement un acte déclaratif et par là même informatif pour le propriétaire et le nouvel acquéreur. « Si les gens le veulent, ils pourront lui donner un caractère translatif. Ce qui supposera un acte notarié afin de le rendre opposable », ont indiqué Vivien Strieff et Cédric Pommier, respectivement président et rapporteur de la première commission. A cet effet, ils préconisent un régime de publicité en modifiant l’alinéa 2 de l’article 710-1 du Code civil. Dans une autre proposition, cette commission entend donner une consécration légale à de nouveaux droits réels afin d’en développer l’usage.

Autre enjeu essentiel, il s’agit de trouver un équilibre entre le propriétaire et l’occupant. « Le déséquilibre dans les rapports propriétaire-locataire est aujourd’hui une évidence, a insisté François Devos. Ce déséquilibre aura une conséquence tout aussi évidente, et à court terme : la mise à mal de l’offre de logement du parc privé, complément pourtant indispensable de l’offre publique ». Pour trouver un équilibre et restaurer la confiance, la deuxième commission, intitulée « L’exercice du droit de propriété immobilière, des limites aux contraintes », a formulé elle aussi plusieurs propositions. L’une d’entre elles crée un certificat unique qui atteste du caractère décent du logement. Car « les diagnostics obligatoires édictés à l’article 3-3 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ne garantissent pas que le propriétaire- bailleur respecte son obligation de délivrer un logement décent », ont estimé Marie-Hélène Pero Augereau-Hue et Olivier Boudeville, respectivement présidente et rapporteur de la deuxième commission. Dans la proposition n° 3, ces deux notaires suggèrent la suppression de quelques dispositions législatives pour rééquilibrer le droit au maintien dans les lieux du locataire avec le droit du propriétaire de disposer de son bien.

Sécuriser la copropriété

Dans une copropriété, des litiges peuvent survenir entre les copropriétaires ou avec le syndicat. Une telle situation est source d’insécurité juridique. Pour y remédier, la troisième commission, appelée « La propriété immobilière face à ses défis. L’espace, les voisins, le temps », suggère de réduire à cinq ans le délai décennal applicable aux actions personnelles en copropriété. Elle le considère plus adapté au rythme actuel des affaires. Dans une autre proposition, la commission recommande une modification législative afin de sécuriser le champ d’application de la division en volumes, alternative à la copropriété. « Nous avons clarifié et voulu refondre en fonction de la jurisprudence qui existait », ont expliqué Thierry Vaillant et Anne Muzard, respectivement président et rapporteur de la troisième commission. Ils suggèrent aussi que soient supprimées les servitudes complètement inutiles.

Au-delà de ces problématiques, l’immeuble est le plus souvent un investissement ou un placement financier. « Il faut donc rechercher les meilleures stratégies à mettre en place à travers le prisme de la constitution d’un patrimoine immobilier, de sa rentabilisation une fois acquis et de son optimisation fiscale », a insisté le rapporteur général du congrès. A partir de 3 cas pratiques, la quatrième commission intitulée « L’optimisation de la propriété immobilière » s’est penchée, notamment, sur l’usufruitier successif d’un immeuble et sur l’immobilier d’entreprise. « La sélection de ces trois cas pratiques s’est faite naturellement », ont précisé Sophie Sabot-Barcet et Violaine Trambouze-Livet, respectivement présidente et rapporteur de la quatrième commission. Elles recommandent notamment de mieux sécuriser la mutation d’un immeuble en présence d’un usufruitier successif en uniformisant les règles de publicité foncière lors de la mutation de la pleine propriété de ce bien. Et d’exiger l’intervention de l’usufruitier. « Avec nos propositions, on travaille dans le sens d’une amélioration du droit, a souligné François Devos. On peut être satisfait du travail qui a été fait ». Les propositions de l’équipe du 112e Congrès vont être transmises, via le Conseil Supérieur du Notariat (CSN), aux pouvoirs publics. Elles sont déjà attendues place Vendôme. « J’attends avec intérêt vos propositions pour mieux établir et protéger la propriété immobilière, pour faciliter et organiser ses usages, privés et collectifs ou encore valoriser sa jouissance et son objet », avait lancé le ministre de la Justice, Jean-Jacques Urvoas, lors de son allocution à l’ouverture du congrès. Seront-elles ensuite insérées dans la législation ? Une chose est sûre : la balle est désormais dans le camp du gouvernement Valls et des parlementaires.

Frédéric HASTINGS

 

 


Le prochain congrès à Lille

Le 113e Congrès des notaires se tiendra du 17 au 20 septembre 2017 à Lille.
Intitulé « Famille, solidarités, numérique », il vise à conforter la place du notaire au cœur des mutations de la société. Trois commissions y formuleront des propositions.


 

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