Fernand Khnopff, un symboliste aux tableaux énigmatiques et envoûtants, au Petit Palais à Paris

A la fois peintre, dessinateur, graveur, sculpteur et metteur en scène de son œuvre, Fernand Khnopff (1858-1921), maître du symbolisme belge, a nourri, sa vie durant, une profonde fascination pour l’onirisme et les mythes antiques. Au sein de l’exposition "Fernand Khnopff, maître de l’énigme", le Petit Palais montre les grands thèmes traités par l’artiste, au travers d’une rétrospective riche de 150 œuvres présentées comme emblématiques.

La convocation des sens

Cette rétrospective propose plusieurs dispositifs originaux pour coller au plus près à la personnalité de l’artiste. Tout d’abord, elle reprend les codes couleurs de la maison qui servait d’atelier à Fernand Khnopff, et que les spécialistes qualifient de « temple du Moi » ou de « Castel du rêve ». Les visiteurs sont ainsi plongés de bout-en-bout dans l’univers du créateur. De plus, rappelant les diffuseurs de parfum présents dans sa maison-atelier, quatre stèles audio-­olfactives sont placées au sein de l’exposition et diffusent un parfum alors qu’est émise, au même moment, une musique, et qu’est lu un poème, tous deux liés aux œuvres exposées. L’idée est de « recréer une atmosphère de résonance entre les arts et les sens, chère aux symbolistes ». 

De plus, un « salon symboliste » présente des livres, des photographies, une stèle audio-olfactive, des animations littéraires, théâtrales et musicales. On le voit, rien n’a été laissé au hasard : les visiteurs baignent ainsi dans l’ambiance artistique de la seconde partie du XIXe siècle et du début du XXe.

Du paysage au symbolisme

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Fernand Khnopff. “À Fosset, l’entrée du village”. 1885, huile sur toile, Collection privée 29 / Babut du Marès. Namur. Crédit : Photo akg-images.

Fernand Khnopff passa plusieurs étés en famille dans les Ardennes belges, dans le petit hameau de Fosset. Il y peignit de petits paysages dans lesquels les personnages semblaient plantés de façon irréelle, sans ombre aucune. Son goût pour l’introspection et la solitude s’y reflétait. Il représentait également Bruges, avec un portrait de femme ou un objet symbolique. 

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Fernand Khnopff. “Portrait des enfants de Monsieur Nève”. 1893, huile sur toile, collection privée. Crédit : Photo akg-images.

Il réalisait de nombreux portraits de son entourage : sa mère, les enfants de la maisonnée, et surtout sa sœur Marguerite, qui devint vite sa muse et son modèle principal. Khnopff dessina et peignit également de nombreux nus féminins ayant pour point commun leur rousseur caractéristique.

Pour lui, l’éternel féminin était forcément évanescent. Khnopff représentait Marguerite dans des ambiances mystérieuses, plongée dans de profondes rêveries, que l’on dit inspirées des Primitifs flamands. Certains tableaux rappellent même les icônes sacrées. A tel point que ses portraits sont des « interrogations de l’être », selon le spécialiste Michel Draguet. L’ésotérisme et l’hermétisme s’installèrent dans ses œuvres…

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Fernand Khnopff, “Le masque au rideau noir”, 1892, crayon et pastel sur papier, 26,5 x 17 cm, collection particulière. © Christie’s Images / Bridgeman Images.

Progressivement, Fernand Khnopff développa une mythologie personnelle autour d’Hypnos. En effet, il était fasciné par le père de Morphée. C’est sous forme symbolique que le dieu du Sommeil apparaissait régulièrement dans ses œuvres. Selon les commissaires d’exposition Michel Draguet, Christophe Leribault et Dominique Morel : « La petite tête à l’aile teintée en bleu, couleur du rêve, est représentée la première fois en 1891 dans le tableau I Lock My Door Upon Myself (ci-dessous).

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Fernand Khnopff, “I Lock My Door Upon Myself”. 1891, huile sur toile, 72 x 140 cm, Munich, Neue Pinakothek. Crédit photo BPK, Berlin, Dist.RMN-Grand Palais images BStGS.

Hypnos est l’objet de plusieurs tableaux, tout comme la Méduse ou bien encore Œdipe, qui esquisse dans le tableau Des caresses (ci-dessous) un étrange dialogue avec un sphinx à corps de guépard ». 

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Fernand Khnopff, “L’Art” ou “Des Caresses”. 1896, huile sur toile, 50,5 x 150 cm, Bruxelles, Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique. Crédit photo J. Geleyns Art Photography.

L’attrait pour la photographie

Outre la peinture, Khnopff se passionnait pour la photographie. Ce procédé moderne lui permettait d’analyser les moindres gestes et poses de sa sœur Marguerite, dont il avait fait depuis longtemps son modèle favori. Il lui faisait revêtir des vêtements éthérés, des étoles orientales, des étoffes chatoyantes, et reportait ensuite ces séances de pose sur la toile, transformant sa sœur en princesse de légende ou en divinité orientale. Il faisait également appel à un professionnel de renom, Albert Edouard Drains dit Alexandre, pour photographier un certain nombre de ses œuvres. Il rehaussait ensuite les tirages au crayon, à l’aquarelle ou au pastel.

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Fernand Khnopff, “Blanc, noir et or”. 1902, aquarelle, pastel et gouache sur papier marouflé sur toile, Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, Bruxelles. Crédit Photo J. Geleyns/ Art Photography.

De merveilleuses énigmes 

Malgré les quelques clés qu’ils offrent pour leur compréhension, les tableaux de Khnopff restent souvent des énigmes, reflétant la profondeur de l’inconscient de leur créateur, mais aussi les méandres de sa réflexion. Car, au-delà de symboles décryptables, Fernand Khnopff créa « un symbolisme caché » connu de lui seul, émanant de sa riche vie intérieure. Lui-même ne possédait d’ailleurs peut-être pas toutes les clés de ses œuvres impénétrables, Michel Draguet avançant que Khnopff donna naissance à « une peinture plus interrogative qu’affirmative »

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Fernand Khnopff, “Sleeping Medusa” ou “Méduse endormie”. 1896, pastel sur papier. Collection particulière. Crédit : collection particulière.

Informations pratiques

Petit Palais – Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris
Avenue Winston-Churchill
75008 Paris

Tel. : 01 53 43 40 00.

L’exposition Fernand Khnopff, le maître de l’énigme est visible jusqu’au 17 mars 2019.

Entrée plein tarif : 13 euros.

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